Crime organisé – Résumé de recherche 2017-H007

Différences dans l’évaluation des groupes du crime organisé

Les différences dans le niveau de danger que posent les groupes du crime organisé perçu par les autorités d’application de la loi sont reliées à des facteurs touchant le mandat de l’organisme.

Le niveau de menace que pose un groupe du crime organisé peut jeter les bases de la politique du gouvernement et des stratégies de la police. C’est pourquoi il est important d’évaluer les groupes du crime organisé en fonction du danger qu’ils posent au moyen de méthodes d’évaluation normalisées. L’une de ces méthodes est la technique de mesure de la menace nommée Sleipnir, conçue par la Gendarmerie royale du Canada (GRC) pour comparer les groupes du crime organisé selon certaines caractéristiques ou certains attributs classés en ordre décroissant.

Dans le cadre d’une enquête auprès de 157 participants à un séminaire tenu durant une conférence de formation organisée par l’International Association of Law Enforcement Intelligence Analysts et l’Association of Law Enforcement Intelligence Units, 12 caractéristiques utilisées dans Sleipnir ont été présentées à des représentants de l’application de la loi. En employant une méthodologie de type Q, on a demandé aux répondants de classer les caractéristiques du modèle de la plus importante pour le succès du groupe à la moins importante. Chaque caractéristique a été cotée en fonction de son classement par le répondant, les caractéristiques considérées comme étant les plus importantes ayant gagné jusqu’à trois points et celles vues comme étant les moins importantes ayant perdu jusqu’à trois points.

Les résultats montrent des différences importantes dans diverses régions et divers ordres de gouvernement en ce qui concerne les traits qui mènent au succès d’un groupe du crime organisé. La cohésion, c’est-à-dire la présence d’un fort sentiment de solidarité ou d’un lien solide avec les autres membres du groupe, a été classée au premier rang par les répondants américains et au deuxième rang par les répondants canadiens. Or, l’outil Sleipnir considère la cohésion comme la caractéristique la moins importante. Les répondants canadiens et Sleipnir s’entendent généralement pour dire que la corruption est le facteur le plus important, tandis que les Américains l’ont placée au neuvième rang. Les organismes étatiques et provinciaux considéraient le blanchiment d’argent comme important et l’ont classé au deuxième rang, contrairement aux organismes locaux ou fédéraux qui l’ont classé au dixième et au septième rangs respectivement.

Ces données soulèvent plusieurs questions quant à savoir pourquoi les différences dans le pays ou l’ordre de gouvernement influenceraient les caractéristiques qui sont considérées comme les plus importantes pour le succès des groupes du crime organisé. Les auteurs soutiennent qu’il existe des différences distinctes entre ce qui permet à un gang de réussir au Canada en particulier par rapport aux États Unis. Des facteurs tels que la culture et la législation pourraient influencer la façon dont un groupe du crime organisé doit agir pour connaître le succès, ce qui pourrait expliquer la différence dans l’opinion des répondants américains, puisque Sleipnir est un cadre canadien. Les auteurs théorisent en outre que les organismes fédéraux tels que la GRC et le FBI voient différentes caractéristiques comme étant plus importantes parce que leur mandat les met davantage en contact que les organismes locaux avec des groupes affichant certaines qualités. Par exemple, les organismes locaux ont tendance à se concentrer sur les groupes violents à grande visibilité, tandis que la GRC porte généralement son attention sur des groupes criminels moins connus qui ont des racines profondes.

Il vaut la peine de souligner que l’étude repose entièrement sur la perception de l’agent individuel. Il ne s’agit pas d’un test objectif de la probabilité que les groupes mettent le public en danger en réalité, mais d’une représentation de la probabilité que le groupe réussisse dans le crime organisé d’après le répondant. De plus, les répondants venaient de partout dans le monde alors que les seules options de réponse étaient « Canada », « États Unis » et « Autre ». Enfin, les différences régionales entre différents États ou provinces pourraient varier grandement en fonction de plusieurs facteurs (comme les différences dans la formation des agents fédéraux), et les groupes mesurés pourraient ne pas être très homogènes. Si l’on répétait l’étude au fil du temps, il serait peu probable qu’on obtienne des résultats très similaires.

Ces différences dans le classement des caractéristiques par des représentants de l’application de la loi remettent en cause l’idée selon laquelle des tests objectifs universels peuvent déterminer la menace que posent les organisations criminelles. Différents acteurs peuvent percevoir de façons très différentes le risque potentiel que présente un groupe donné selon leur propre poste. Les différences remettent aussi en question l’idée de stratégies universelles de répression du crime organisé. Si différentes caractéristiques revêtent une importance différente pour les groupes du crime organisé selon le milieu, alors les stratégies fondées sur des caractéristiques données pourraient être considérablement moins efficaces que l’on s’imaginait au départ.

Ratcliffe, J., Strang, S. et Taylor R. (2014). Assessing the success factors of organized crime groups. Policing: An International Journal of Police Strategies & Management, 37(1), 206 227.

Impact de la police sur la traite de personnes en Norvège

Les affaires de traite de personnes lancées par la police sont plus susceptibles d’entraîner une mise en accusation que les affaires non lancées par la police.

La traite de personnes est une préoccupation majeure pour les autorités d’application de la loi dans presque tous les pays. De 2004 à 2013, le nombre d’affaires de traite de personnes en Norvège est passé de 15 cas signalés chaque année à 56. Étant donné la nature du travail policier dans la lutte contre la traite de personnes, la relation entre les activités policières et la traite de personnes vaut la peine d’être examinée en profondeur.

Une étude de la traite de personnes réalisée par la police norvégienne se penchait sur les affaires de traite de personnes et l’intervention policière en la matière. Elle visait à repérer des schémas entre le nombre de cas de traite de personnes portés à l’attention de la police, la façon dont la police en a pris connaissance et le taux de mise en accusation. L’auteure a recueilli les données en accédant à la National Database of Criminal Cases (STRASAK) afin de trouver tous les cas signalés de traite de personnes en Norvège de novembre 2003 à décembre 2013.

Les cas où une enquête a été lancée par des policiers qui ont reconnu un individu comme une victime potentielle de traite de personne étaient considérés comme des affaires lancées par la police. Pour leur part, les cas où des victimes ou des tiers (refuges, services de protection, organisations non gouvernementales ou autres citoyens) ont communiqué avec la police étaient considérés comme des affaires non lancées par la police. Les deux tiers de toutes les affaires n’avaient pas été lancées par la police. Au cours de la période de dix ans, la probabilité que les affaires de traite de personnes aient été lancées par la police a baissé de 13 % par année, alors que le nombre d’affaires de traite de personnes a augmenté. Ces tendances montrent que la police norvégienne comptait de plus en plus sur les affaires non lancées par la police, un résultat possible du fait que les citoyens étaient plus conscients de la traite de personnes ou que les policiers étaient trop débordés pour lancer eux-mêmes un aussi grand nombre d’affaires. Cette distinction dans le mode de lancement d’une affaire est importante, car les données révèlent également que les affaires lancées par la police étaient 13 fois plus susceptibles d’entraîner une mise en accusation que les affaires non lancées par la police. Certaines régions, comme la ville de Bergen, étaient jusqu’à trois fois plus susceptibles de compter une affaire lancée par la police que d’autres.

L’étude qualifie les policiers de bureaucrates de la rue qui doivent gérer soigneusement leur temps et leurs ressources. En effet, les policiers doivent souvent prendre des décisions en fonction de leur propre jugement, ce qui leur donne un pouvoir discrétionnaire immense pour donner suite aux affaires qu’ils considèrent comme les plus importantes. Les policiers disposant de ressources limitées doivent accorder la priorité à certaines affaires plutôt qu’à d’autres, ce qui peut mener à l’oubli d’affaires de traite de personnes parce que les policiers consacrent plus d’attention à d’autres affaires (concernant ou non la traite de personnes) qui sont plus susceptibles d’entraîner une mise en accusation.

Certaines limites ont été recensées dans l’étude. Si les données indiquent que les affaires de traite de personnes sont de moins en moins susceptibles d’être lancées par la police, on ne sait pas si cette tendance est due à un manque de ressources, à une incapacité à reconnaître la traite de personnes ou à d’autres facteurs qui pourraient influencer la capacité de la police à lancer une affaire. On ne sait pas non plus si ces tendances découlent simplement d’une augmentation du taux de personnes ne faisant pas partie de la police qui signalent des cas de traite de personnes, à mesure que les citoyens se font plus vigilants à l’égard de la traite de personnes.

Bjelland, Heidi J. (2016). Identifying human trafficking in Norway: A register-based study of cases, outcomes and police practices. European Journal of Criminology, 4 décembre 2016.

Financement des groupes terroristes et paramilitaires

Les groupes terroristes et paramilitaires agissent souvent de manière semblable aux groupes du crime organisé pour obtenir des fonds.

Il peut être difficile de décrire de façon définitive ce qui constitue du terrorisme. Le mode de fonctionnement et de financement des groupes terroristes est encore moins clair, ces questions étant entourées de mythes. L’article en question définit le terrorisme comme le résultat de l’effondrement de l’État au point où des groupes et des individus recourent à des moyens violents pour soit créer un nouvel État qui correspond à leurs propres idéaux, soit pénétrer de force le processus décisionnel. Ces groupes peuvent également supplanter l’État en offrant des services qui relèveraient normalement du gouvernement d’un pays. Il arrive aussi souvent que les groupes paramilitaires cherchent à atteindre les mêmes objectifs par des actes qui constituent du terrorisme. Ces groupes terroristes ou paramilitaires ont besoin d’un financement stable à grande échelle pour fonctionner. Par exemple, les opérations d’Al-Qaïda en Irak coûteraient jusqu’à 200 000 $ par semaine à maintenir, ou 10,4 millions de dollars par année. Cette somme peut être obtenue au moyen d’activités criminelles.

Il importe cependant d’établir une distinction entre les groupes terroristes ou paramilitaires et les groupes du crime organisé. Ces derniers se livrent à des activités criminelles dans le but de réaliser des profits, alors que les profits réalisés par un groupe terroriste ou paramilitaire au moyen d’actes criminels servent uniquement à financer les activités ultérieures du groupe, ce qui signifie que ces actes visent le terrorisme plutôt que le gain personnel. Selon l’auteur, il peut aussi être difficile de faire la distinction entre le terrorisme et le crime organisé parce qu’il arrive souvent à ces groupes d’agir de façons qui pourraient être attribuées à l’un ou à l’autre : les deux types d’organisations peuvent s’épanouir en conséquence de l’effondrement de l’État, et les deux pourraient chercher à offrir des services comme des rackets de protection pour les citoyens ou l’application des contrats.

L’auteur examine le cas de l’Armée républicaine irlandaise (ARI), un groupe paramilitaire basé principalement en Irlande du Nord qui vise à mettre fin à l’influence britannique sur la région et à retirer le pays du Royaume-Uni. Comme il a besoin de fonds pour financer ses efforts, le groupe s’est souvent tourné vers un éventail d’activités criminelles. En plus d’autres sources de revenus, les rackets de protection, les vols de banque qualifiés et la vente de CD piratés ont tous servi à financer les activités de l’ARI par le passé. Or, ces actes du crime organisé visaient davantage à amasser des fonds pour la campagne continue du groupe qu’à réaliser des profits.

En se penchant sur les groupes paramilitaires et leurs activités comme s’il s’agissait d’activités du crime organisé, ainsi que d’un point de vue économique, l’auteur examine le mode de financement de certains groupes. Ces groupes peuvent créer des réseaux de contrebande pour se procurer les armes dont ils ont besoin. Ces réseaux de contrebande servent ensuite à ramasser et à vendre les armes excédentaires pour amasser des fonds. Il est alors naturel pour les groupes de se tourner vers la vente d’autres marchandises de contrebande de valeur, comme les drogues ou les diamants, pour aider à payer les armes. Les groupes peuvent profiter encore plus de l’instabilité en s’occupant de faire appliquer la loi et en se faisant payer pour assurer des services de protection. Si l’État n’est pas en mesure de faire appliquer les contrats pour cause de corruption ou d’instabilité, il peut être difficile pour les fournisseurs de marchandises légales et illégales de s’assurer que les ententes seront respectées. Le groupe paramilitaire peut alors prendre en charge cette responsabilité, moyennant un prix, et ce faisant assumer le contrôle de secteurs complets de l’entreprise.

L’auteur avance en outre que différents types de groupes doivent trouver différents moyens de faire de l’argent. Les groupes dominants peuvent obtenir des fonds auprès de gouvernements, de personnes riches (dons) ou d’autres sources légitimes, tandis que les groupes minoritaires possèdent moins de ressources et se sentent obligés d’obtenir des fonds par des moyens illégaux. Les groupes minoritaires idéologiques, ethniques ou religieux se voient souvent forcés de recourir au crime pour financer leurs activités.

Enfin, l’auteur souligne le manque d’information quant à l’efficacité de la politique de financement de la lutte au terrorisme, de même que la nécessité de renseignements plus détaillés concernant le financement du terrorisme en général. Les tribunaux ont jugé illégales plusieurs saisies de fonds effectuées après le 11 septembre et ordonné que les sommes soient restituées. Si des efforts ont été déployés pour faire le suivi des saisies de fonds et veiller au respect des pratiques énoncées par le Groupe d’action financière sur le blanchiment de capitaux, il reste difficile d’obtenir des chiffres précis. C’est pourquoi il est essentiel de mener de plus amples recherches sur la politique de financement de la lutte au terrorisme pour déterminer les prochaines étapes à suivre.

Tupman, W. (2009). Ten myths about terrorist financing. Journal of Money Laundering Control, 12(2), 189 205.

Tendances dans l’évolution des gangs

Les groupes de jeunes criminels passent par des étapes précises au fil de leur participation à des activités criminelles toujours plus graves.

Le terme « gang » est souvent utilisé comme un terme fourre-tout pour désigner tout groupe de délinquants, qu’il s’agisse d’un groupe de jeunes petits criminels ou d’un groupe du crime organisé plus endurci. Il arrive parfois que des groupes de jeunes délinquants se transforment en groupes du crime organisé plus sérieux, mais les étapes de ce processus peuvent être difficiles à déterminer. Selon l’auteur, il existe des étapes définitives dans l’évolution d’un gang que les groupes peuvent finir par franchir pour passer d’un groupe d’amis ayant une orientation sociale, à un groupe criminel motivé par l’appât du gain.

Des données d’observation ont été recueillies auprès de 12 gangs du Grand Londres au Royaume-Uni. Au cours de la période d’observation de deux ans, des membres et des associés de ces gangs ont aussi participé à une série d’entrevues. Un individu était reconnu comme membre d’un gang lorsqu’il s’identifiait comme tel, et lorsque d’autres membres du gang confirmaient son statut. Les associés étaient simplement ceux qui exprimaient un désir d’adhérer à un gang avec lequel ils s’associaient et commettaient des crimes. Ces gangs étaient tous d’anciens groupes de pairs sociaux se livrant à des activités illégales, pourtant certains avaient progressé plus que d’autres dans leur cycle de vie.

Le principal argument de l’auteur veut que la vie d’un gang évolue en passant par quatre étapes différentes : (1) les loisirs; (2) la criminalité; (3) l’entreprise; et (4) la gouvernance. Les gangs entament l’étape des loisirs en tant que groupes de pairs qui se fréquentent dans des contextes sociaux. À cette étape, les gangs sont souvent formés de groupes qui partagent une identité commune et qui se rencontrent à des fins de soutien social. Ils commettent des crimes à l’occasion, mais surtout dans le but de se désennuyer. Toutefois, avec la transformation en gangs, la criminalité et la violence peuvent devenir essentielles à l’identité des groupes. À l’étape de la criminalité, les gangs commencent à se faire une réputation et à vivre des conflits avec d’autres gangs. Il se peut que la police commence à porter une attention particulière au gang, et le concept d’un territoire du gang et de son caractère sacré devient essentiel à l’image du gang. Les activités du gang s’éloignent des crimes informels commis spontanément pour devenir des actes prémédités que le gang se réunit pour planifier. À cette étape, les profits réalisés par des moyens criminels sont minimes. Les crimes de rue, comme le vol de téléphones pour les revendre, n’offrent pas un approvisionnement suffisant en capitaux, et le gang pourrait donc se tourner vers des activités plus lucratives.

Les groupes peuvent alors passer à l’étape de l’entreprise, où ils cherchent une meilleure rémunération de leurs activités criminelles. Cette étape marque une transition importante dans les activités du groupe, puisque celui-ci devient plus violent et commet des infractions plus graves. Poussés par l’appât du gain, les membres du gang se tournent vers des sources de revenus plus lucratives, par exemple le trafic de la drogue. Des personnes extérieures au groupe sont embauchées pour servir de soldat pour le groupe et sont souvent chargées de faire appliquer la loi ou d’assassiner la concurrence et les informateurs de police. Ces personnes travaillent de façon hiérarchique : elles font le trafic de la drogue et commettent d’autres crimes au nom d’un membre du groupe, qui s’occupe de diriger et de superviser le réseau de subordonnés dont il a la responsabilité. À mesure de son évolution, le gang se concentre davantage sur le crime comme moyen de réaliser des profits et fonctionne surtout comme une entreprise illégale alors que son aspect social se met à disparaître.

Enfin, les groupes peuvent passer à l’étape de la gouvernance, où ils deviennent plus organisés et compétitifs. À cette étape, ils peuvent s’efforcer d’être le seul gang majeur et l’unique fournisseur de leurs services en éliminant la concurrence. Ils peuvent aussi commencer à travailler à l’expansion de leur zone d’influence en essayant d’exploiter de nouvelles possibilités d’affaires et en menant des activités à de nouveaux endroits. La violence fait partie intégrante des activités du groupe, et les risques pour les affaires, comme les gangs qui font concurrence au groupe ou les informateurs de police, sont couramment ciblés. En même temps, les groupes qui en sont à cette étape peuvent se tourner vers des activités plus légitimes et offrir des avantages à la communauté. À Londres, un gang appelé PDC (Poverty Driven Children, auparavant Peel Dem Crew), se serait éloigné de la violence et aurait commencé à se concentrer davantage sur des entreprises légales telles que les barbiers et la musique. Certains groupes sont en mesure d’obtenir la loyauté de la communauté en offrant aux résidents une protection contre la criminalité ainsi qu’une aide financière, et en organisant des activités sociales pour le plaisir du quartier. Enfin, à cette étape les groupes peuvent commencer à tenter d’obtenir de l’information sur les opérations policières. Par exemple, certains groupes se servaient de rapports radio de police pour surveiller les activités de celle-ci, tandis que d’autres prévoyaient des guetteurs pour assurer une surveillance constante des rues. Certains gangs sont même capables de soudoyer des fonctionnaires en échange d’information ou pour qu’ils ferment les yeux sur les activités du gang. Quelles que soient les méthodes employées, à cette étape le groupe commence à émerger comme une force dominante dans la communauté qui cherche constamment à accroître son influence.

La compréhension accrue de l’évolution des groupes depuis des gangs de jeunes jusqu’à des organisations criminelles permet d’élaborer de meilleures stratégies pour combattre le crime organisé. La police pourrait déterminer quels groupes affichent une probabilité accrue de passer à l’étape suivante et cibler ces gangs aux fins d’enquête ou d’efforts de prévention du crime accrus, afin de les attirer vers des styles de vie traditionnels. L’étude comporte toutefois des limites, la principale étant qu’aucune étude longitudinale n’a été réalisée. Les groupes du crime organisé ont simplement été étudiés dans le contexte de l’étape où ils en étaient actuellement, or de plus amples recherches sont nécessaires sur le mode de progression possible d’un groupe d’une étape à l’autre, pour mieux comprendre comment les groupes franchissent ces étapes.

Densley, J. (2014). It’s gang life, but not as we know it: The evolution of gang business. Crime & Delinquency, 60(4), 517 546.

Cerner les tendances relatives au crime organisé

La sous-utilisation de l’indicateur du crime organisé du Programme DUC 2 entrave la compréhension du crime organisé et les efforts pour le combattre.

Bien que le crime organisé représente une grande priorité des organismes d’application de la loi depuis des années, le Canada possède peu de données utilisables, ce qui rend la tâche considérablement plus difficile aux organismes d’application de la loi lorsqu’il s’agit de lutter contre les groupes du crime organisé. En effet, la capacité policière de lutter contre le crime organisé se trouve entravée en l’absence de données fiables et exactes sur le crime organisé au Canada, et d’une capacité à communiquer ces données à d’autres organismes d’application de la loi.

Afin de fournir aux services de police et aux organismes gouvernementaux de plus amples renseignements sur le crime organisé au Canada, on a apporté des changements au Programme de déclaration uniforme de la criminalité fondé sur l’affaire (DUC 2) en 2005. Ces changements visent le signalement de toute affaire liée au crime organisé, comme les activités de gangs. L’utilisation de l’indicateur du crime organisé pour signaler l’affaire aiderait les organismes d’application de la loi à mesurer les infractions liées au crime organisé au Canada, et ce, par la prestation de chiffres fiables sur la prévalence du crime organisé. La lutte contre le crime organisé pourrait ainsi être facilitée, puisque les tendances apparaîtraient plus clairement et que la police serait mieux en mesure d’élaborer des stratégies en conséquence. Malheureusement, l’utilisation de l’indicateur du crime organisé du Programme DUC 2 par les services de police était inégale et limitée lorsqu’il s’agissait de signaler les affaires de criminalité. Par exemple, les infractions dont les liens avec le crime organisé sont connus, comme le trafic de drogues et le meurtre, étaient rarement signalées comme telles, ce qui fait qu’aucune information utilisable n’était obtenue.

Les services de police se sont par la suite rencontrés en 2009 pour discuter de l’utilisation appropriée de l’indicateur du crime organisé du Programme DUC 2. Ils ont formulé plusieurs propositions pour faciliter le signalement, notamment la prestation d’une formation aux policiers sur la bonne utilisation de l’indicateur du Programme DUC 2. Ils ont également convenu de lancer un projet pilote où la police se concentrerait sur le signalement de toutes les affaires où des infractions précises étaient liées au crime organisé. En 2013, plusieurs services de police se sont portés volontaires pour participer à cette étude pilote, en consignant les affaires où une infraction liée au crime organisé avait été commise afin de déterminer l’efficacité des changements apportés relativement à l’utilisation du système du Programme DUC 2. Treize services de police ont pris part à l’étude sur les infractions liées aux homicides, dont quatre ont aussi participé à l’étude sur les infractions relatives aux drogues.

Les données de l’étude pilote montrent que 15 % des 588 affaires liées aux homicides consignées avaient un lien avec le crime organisé. Ces affaires étaient plus susceptibles d’impliquer des armes à feu de même qu’une victime plus jeune et que le délinquant ne connaissait pas, comparativement à toutes les affaires liées aux homicides. De plus, la victime et le délinquant étaient tous deux plus susceptibles d’être des hommes dans les affaires liées aux homicides ayant un lien avec le crime organisé que dans les affaires liées aux homicides en général. On a aussi observé que le crime organisé était impliqué dans 57 % des 1 010 infractions de trafic de drogues consignées dans le cadre de l’étude pilote. Si l’on compare avec le moment où le Programme DUC 2 a commencé à faire le suivi du crime organisé, où seulement 45 cas de trafic de drogues sur un total de 19 309 avaient été signalés comme ayant un lien avec le crime organisé, il semble évident que les efforts en vue d’augmenter l’utilisation de l’indicateur ont porté des fruits, et que des données utiles peuvent maintenant être recueillies, transmises et étudiées.

Les pratiques suivantes permettraient de veiller à une meilleure collecte de données sur le crime organisé : (1) les services de police doivent faire du signalement des affaires du crime organisé une priorité; (2) il convient d’insister sur l’importance de recueillir cette information; (3) il faudrait mettre quelqu’un en poste pour s’assurer que toutes les affaires du crime organisé sont signalées correctement aux fins de la bonne tenue des dossiers; (4) il faudrait que des personnes ayant accès à tous les renseignements disponibles consignent quotidiennement les affaires.

Munch, C. et Silver, W. (2017). Mesurer le crime organisé au Canada : résultats d’un projet pilote. Juristat, 37(1), 1 13. Repéré à http://www.statcan.gc.ca/pub/85-002-x/2017001/article/14689-fra.htm

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