Gangs de jeunes au Canada : Examen des questions et enjeux actuels

Gangs de jeunes au Canada : Examen des questions et enjeux actuels Version PDF (356 Ko)

par Laura Dunbar

Table des matières

Résumé

Les gangs de jeunes ne sont pas un nouveau phénomène au Canada. Des recherches et des évaluations théoriques et empiriques continuent d'être menées afin que l'on puisse mieux comprendre cette question et intervenir en conséquence. Des progrès ont été réalisés afin de définir la nature des gangs de jeunes et leurs activités, les motivations des personnes qui se joignent à de tels gangs ainsi que les facteurs de risque et de protection qui ont une incidence sur l'adoption d'un mode de vie axé sur un gang. Il n'existe pas de mesure précise de l'adhésion aux gangs de jeunes et de l'importance de leurs activités au Canada à l'heure actuelle, mais au cours des dernières années des progrès ont été effectués quant à la compréhension de l'affiliation au sein de plusieurs populations clés, notamment les jeunes autochtones, les jeunes immigrants et les jeunes femmes. Des connaissances supplémentaires sur des facteurs de risque précis et les facteurs menant à l'adhésion et à l'abandon et des directives en matière de prévention et d'intervention pourraient contribuer à l'élaboration de solutions pour aborder l'adhésion aux gangs de jeunes et les activités liées aux gangs au Canada. Sécurité publique Canada continue de soutenir les stratégies efficaces de prévention et d'intervention auprès des gangs de jeunes qui sont reconnues pour fonctionner, selon des données empiriques et des leçons apprises découlant d'activités passées de mise en œuvre et d'évaluation.

Note de l'auteur

Les opinions exprimées dans le présent rapport sont celles de l'auteur et ne traduisent pas nécessairement celles de Sécurité publique Canada. Prière d'acheminer toute correspondance à propos du présent rapport à l'adresse suivante :

Division de la recherche
Sécurité publique Canada
340, avenue Laurier Ouest
Ottawa (Ontario) K1A 0P8

Courriel : PS.CPBResearch-RechercheSPC.SP@ps-sp.gc.ca.

Introduction

Il faut remonter à 1945 pour obtenir les premiers travaux consignés sur les gangs de jeunes au Canada, une étude menée par Kenneth H. Rogers sur les jeunes appartenant à des gangs de rue à Toronto. Depuis ce temps, de nombreuses recherches et études d'évaluation se sont ajoutées à ce domaine grandissant. Au cours des années 1990, les gangs et leurs activités ont fait l'objet d'une attention renouvelée quand les médias et de nombreux services de police ont commencé à attribuer de plus en plus la responsabilité des fusillades survenues dans les rues de nombreuses villes aux gangs de jeunes (Ezeonu, 2010). Au cours des 25 dernières années, cela a fait en sorte que des chercheurs, évaluateurs et décideurs ont déployé des efforts accrus pour mieux comprendre la question et élaborer des solutions afin d'aborder l'adhésion aux gangs de jeunes et les activités liées aux gangs au Canada.

Sécurité publique Canada s'est engagé à générer et à diffuser des connaissances afin de lutter contre le problème des gangs de jeunes au Canada. Pour mettre en œuvre des stratégies de prévention et d'intervention efficaces, nous devons tout d'abord comprendre la nature et la portée du problème. Le présent rapport de recherche fournit un aperçu des progrès qui ont été réalisés afin de définir la nature des gangs de jeunes et leurs activités, les motivations des personnes qui se joignent à de tels gangs ainsi que les facteurs de risque et de protection qui ont une incidence sur l'adoption d'un mode de vie axé sur un gang. En outre, au cours des dernières années des progrès ont été effectués quant à la compréhension de l'adhésion aux gangs au sein de plusieurs populations clés, notamment les jeunes autochtones, les jeunes immigrants et les jeunes femmes. La présente publication met également en relief des renseignements sur des facteurs de risque précis et les facteurs menant à l'adhésion et à l'abandon et des directives en matière de prévention et d'intervention touchant ces groupes. Enfin, certaines conclusions clés tirées jusqu'à maintenant et des recommandations pour aller de l'avant sont fournies à la lumière de données empiriques et de leçons apprises découlant d'activités de mise en œuvre et d'évaluation menées antérieurement par Sécurité publique Canada dans le cadre de projets relatifs aux gangs de jeunes.

La majorité des connaissances théoriques et des travaux empiriques sur les gangs de jeunes proviennent des États-Unis. Apprendre de l'expérience des États-Unis comporte certains avantages, mais il peut être risqué de présumer que les causes et la structure des gangs sont les mêmes aux États-Unis qu'au Canada. Les distinctions historiques et démographiques entre les deux pays ainsi que les différences au chapitre de la culture politique laissent entendre qu'il est important de se pencher de façon indépendante sur la question des gangs au Canada (Ezeonu, 2014). Pour ce faire, le présent rapport s'appuie autant que possible sur des recherches et des ressources canadiennes.

Qu'est-ce qu'un gang de jeunes?Note de bas de page 1

Avant d'analyser la question de l'adhésion aux gangs de jeunes au Canada, il est important d'indiquer clairement ce que l'expression signifie. Au sein des milieux universitaires, gouvernementaux et de l'application de la loi et entre ceux-ci, il n'existe pas de définition convenue de « gang de jeunes ». Plutôt que de fournir une définition précise, voici quelques critères généraux qui peuvent être pris en compte (Mohammed, 2007; Sánchez-Jankowski, 2003; Wortley, 2010) :

Pourquoi les jeunes entrent-ils dans un gang?

La plupart des recherches laissent entendre que l'affiliation à un gang confère souvent des avantages psychologiques, sociaux ou économiques et que les personnes qui entrent dans un gang le font pour répondre à des besoins inassouvis (Chettleburgh, 2007; Wortley et Tanner, 2006). Les motivations pour adhérer à un gang comprennent les suivantes (tel qu'il est décrit dans Dunbar, 2016) :

Il importe de mentionner que les individus se joignent à des gangs pour de multiples raisons, lesquelles ne s'excluent pas les unes les autres. La décision de se joindre à un gang est souvent réfléchie et la personne croit qu'elle le fait dans son intérêt supérieur (Sánchez-Jankowski, 2003).

Quelles sont les conséquences associées aux gangs de jeunes?

Règle générale, les membres de gangs de jeunes sont responsables d'un grand nombre de comportements criminels, et diverses infractions criminelles ont toujours été liées à l'appartenance à un gang, notamment les crimes contre les biens, le trafic et l'importation de drogues, la fraude, les vols qualifiés, les agressions armées, les homicides et le trafic de femmes et de filles (Boyce et Cotter, 2013; Gilman, Hill, Hawkins, Howell et Kosterman, 2014).

Les statistiques nationales récentes donnent une indication de la nature des crimes et des actes violents perpétrés par les jeunes au Canada, ce qui comprend les membres de gangs de jeunes. Globalement, les jeunes âgés de 12 à 17 ans et les jeunes adultes âgés de 18 à 24 ans représentaient plus du tiers des personnes accusées pour des incidents criminels déclarés par la police en 2014 au Canada. La majorité des jeunes accusés pour certaines des infractions les plus graves avaient des complices. Plus précisément, 75 % des jeunes accusés de vol qualifié, 62 % de ceux accusés pour des incidents d'agression sexuelle grave et 57 % de ceux accusés pour des incidents de voies de fait graves avaient des complicesNote de bas de page 2. De 2005 à 2014, 10 % des personnes accusées d'homicide étaient des jeunes et 29 % de ces homicides étaient considérés comme liés à un gangNote de bas de page 3, une proportion beaucoup plus grande que ce qui a été observé pour les homicides pour lesquels un adulte a été accusé (14 %) (Allen, 2016; Allen et Superle, 2016).

Outre les blessures immédiates subies par les victimes, les gangs de jeunes et les activités qu'ils mènent sont nuisibles aux collectivités et à la société en général, même si leur incidence n'est parfois pas bien reconnue. Par exemple, les membres de collectivités touchées par des gangs vivent souvent dans une culture de violence entraînant des coûts sociaux en raison de la perte de potentiel et de la crainte que des actes criminels nuisent aux activités normales des citoyens. Les coûts financiers pour les systèmes de justice et de santé sont également considérables (Chatterjee, 2006).

Les personnes qui adoptent un mode de vie axé sur un gang peuvent également éprouver des problèmes, notamment les suivants : abandon scolaire; absence de réussite professionnelle; consommation de drogues et d'alcool et exposition à cette consommation; et parentalité à l'adolescence. Les membres de gangs participent moins à d'autres activités prosociales et ils peuvent couper les liens avec des organisations et groupes prosociaux, comme la famille, les amis, l'école et les groupes religieux afin de pouvoir participer de façon plus intensive aux activités du gang. Plus la personne participe longtemps aux activités du gang, plus les répercussions peuvent s'aggraver. Les démêlés avec le système de justice pénale peuvent faire en sorte que la personne soit placée en surveillance dans la collectivité ou dans un établissement correctionnel, la laissant avec un casier judiciaire qui pourrait nuire davantage à sa croissance personnelle et à sa progression dans les domaines de l'éducation ou de l'emploi (Pyrooz, Sweeten et Piquero, 2013).

Enfin, alors que le lien entre l'appartenance à un gang et la perpétration d'infractions a été vastement reconnu, moins d'attention a été portée à la nature de la relation entre l'appartenance à un gang et l'exposition à la violence, à la victimisation et aux traumatismes. Les membres de gangs de jeunes disent qu'ils sont très exposés à la violence, et il a été déterminé qu'ils couraient un risque accru de vivre une grave victimisation violente par rapport aux autres jeunes de la collectivité et aux personnes n'appartenant pas à un gang (Pyrooz, Moule et Decker, 2014; Taylor, Peterson, Esbensen et Freng, 2007). Plusieurs motifs peuvent expliquer l'association, dont bon nombre laissent entendre que la nature d'un gang, sa structure organisationnelle, sa culture et ses activités peuvent mener à la violence et donc à la victimisation (Decker, Katz et Webb, 2007). Les membres de gangs de jeunes disent non seulement être très exposés à la violence, mais également vivre des expériences pouvant être classées comme des événements traumatisants. L'exposition à ces formes de violence traumatisantes est associée à des résultats négatifs en matière de santé mentale chez les jeunes appartenant à un gang, notamment le stress post-traumatique, le détachement et l'insensibilité émotionnelle, qui à leur tour sont associés à une probabilité accrue de délinquance (Kerig, Chaplo, Bennett et Modrowski, 2016; Laurier et Guay, 2016)

Étant donné que les jeunes appartenant à un gang peuvent être considérés comme les principaux auteurs d'actes violents et comme les principales victimes, il est important de déterminer les occasions d'empêcher les jeunes à risque de se joindre à un gang et d'intervenir auprès des membres de gangs de jeunes actuels en raison des coûts élevés pour la société.

Quels sont les facteurs de risque et de protection liés à l'adhésion aux gangs de jeunes?

Le recours à des stratégies de prévention et d'intervention fondées sur des données probantes pour aborder l'adhésion aux gangs de jeunes et la violence associée à ces gangs continue d'être soutenu. Pour que ces stratégies soient fructueuses, il faut bien comprendre les facteurs ayant une incidence sur l'adhésion à un gang. La connaissance des facteurs de risque et de protection, même s'ils ne sont pas en soi des indicateurs de mécanismes de cause à effet, permet d'obtenir un aperçu plus vaste de l'adhésion aux gangs de jeunes et offre une orientation fondée sur des données empiriques pour qu'on puisse déployer des efforts ciblés en déterminant les facteurs précis pouvant être plus importants que d'autres (Peterson et Morgan, 2014).

Les facteurs de risque de l'adhésion aux gangs de jeunes touchent les cinq domaines du développement social (individuel, pairs, école, famille et collectivité). Il n'existe pas de facteur de risque pouvant à lui seul permettre de prédire une probabilité élevée d'adhésion à un gang; aucune variable unique ne peut expliquer un phénomène aussi complexe (Decker, Melde et Pyrooz, 2013). En outre, les facteurs qui permettent de prédire l'appartenance à un gang chevauchent grandement d'autres comportements problématiques (p. ex. délinquance et violence) (Esbensen, Peterson, Taylor et Freng, 2010). Les jeunes qui entrent dans un gang présentent souvent un nombre relativement élevé de facteurs de risque avant d'en faire partie, et l'accumulation de facteurs à risque dans plusieurs domaines est la meilleure manière connue de déterminer les jeunes qui sont le plus susceptibles d'entrer dans un gang (Decker, Melde et Pyrooz, 2013).

Étant donné que  plusieurs revues  systématiques et des méta-analyses ont déjà été conduites sur les facteurs de risque relatifs à l'adhésion à un gang (p. ex. Howell et Egley, 2005; Klein et Maxson, 2006; Raby et Jones, 2016) et que les facteurs de risque majeurs de l'adhésion à un gang ont été présentés dans une publication antérieureNote de bas de page 4, le présent document ne fournira pas d'aperçu détaillé.Note de bas de page 5Règle générale, voici quelques facteurs de risque relatifs à l'adhésion à un gang qui sont constamment reconnus dans un certain nombre d'études : vivre des expériences de vie négatives (p. ex. maladie grave, suspension de l'école, relations interrompues); afficher de façon précoce des comportements problématiques (p. ex. réactivité, agression, impulsivité); entretenir des croyances délinquantes; faire l'objet d'une faible supervision de la part des parents; fréquenter des pairs délinquants; et s'engager auprès de ces pairs (Peterson et Morgan, 2014).

Comparativement aux facteurs de risque, les facteurs de protection ont reçu moins d'attention dans les recherches sur les gangs de jeunes. Cela s'explique largement par des problèmes de définition et l'incertitude quant à la nature des facteurs de protection et de leur fonctionnement (sont-ils le contraire des facteurs de risque ou permettent-ils de modérer ou d'atténuer l'effet des facteurs de risque? Ont-ils des effets directs ou indirects sur la réduction des comportements problématiques?). Il n'est pas clair non plus si un facteur de protection peut devenir un facteur de risque dans un autre contexte (p. ex. une relation étroite avec les parents peut ne pas constituer un facteur de protection si ces derniers sont des criminels ou font partie d'un gang) (Stoddard et coll., 2013).

Seules quelques études ont été menées pour examiner les facteurs pouvant protéger les jeunes contre l'adhésion à un gang. Comme c'est le cas pour les facteurs de risque, une étude de recherche longitudinale a cerné des facteurs de protection relatifs à l'adhésion à un gang dans chacun des cinq domaines majeurs du développement social de la vie des jeunes (Gilman et coll., 2014). Des facteurs de protection potentiels contre l'adhésion à un gang de jeunes sont présentés ci-dessous. Il importe de mentionner que, même si de nombreuses caractéristiques ont été proposées en tant que facteurs de protection possibles pouvant dissuader les jeunes d'adhérer à un gang, il n'existe pas encore de liste de facteurs de protection complètement fiable (Howell, 2010).

Facteurs de protection possibles relatifs à l'adhésion aux gangs de jeunes*
Individuel
Intelligence au-delà de la moyenne ou élevée; tempérament résilient; bonnes aptitudes sociales; capacités d'adaptation positives; bonnes capacités décisionnelles; sentiment d'efficacité personnelle; estime de soi élevée; valeurs et attitudes positives
Pairs
Interactions avec des pairs prosociaux; participation à des activités prosociales; groupe de pairs positifs; liens sociaux positifs; soutien des pairs
École
Réussite scolaire; aspirations au chapitre de l'éducation; sentiment d'accomplissement et respect envers le milieu de l'éducation; fort engagement envers l'école et lien étroit avec l'école; relations positives avec les adultes dans le milieu scolaire
Famille
Liens avec la famille; relations familiales fortes; soutien familial; cohésion familiale; capacité pour les parents ou les membres de la famille élargie de passer du temps avec les jeunes; grande participation des parents; supervision et surveillance intensives; relations émotionnelles positives entre les parents et l'enfant (p. ex. relation chaleureuse et axée sur l'acceptation et le soutien)
Collectivité
Vivre dans un bon quartier (p. ex. taux de criminalité faible, statut socioéconomique élevé); cohésion sociale entre les voisins; confiance entre les voisins
*Sources : Krohn et coll., 2014; McDaniel, 2012; O'Brien et coll., 2013; Rossiter et Rossiter, 2009; Shaffer, 2014

Tel que mentionné précédemment, il est bien connu que l'exposition à de multiples facteurs de risque accroît la probabilité de l'adhésion à un gang comparativement à un seul facteur de risque. De même, il existe des données probantes selon lesquelles l'accumulation de facteurs de protection a un effet protecteur contre l'adhésion à un gang (McDaniel, 2012). Par contre, il est moins évident à savoir si l'accumulation de facteurs de protection peut atténuer les effets de multiples facteurs de risque, plus précisément en ce qui concerne la mesure dans laquelle le fait d'avoir des facteurs de protection dans les cinq domaines peut diminuer la probabilité de l'adhésion à un gang ou atténuer les effets de multiples facteurs de risque. D'autres recherches sur le lien entre les facteurs de risque cumulatifs et les facteurs de protection cumulatifs sont nécessaires (Stoddard et coll., 2013).

Qui se joint à des gangs de jeunes au Canada? Regard sur trois populations clés

Il importe de mentionner qu'on ne dispose pas à l'heure actuelle d'une mesure précise de l'adhésion aux gangs de jeunes et de l'importance de leurs activitésNote de bas de page 6 au Canada parce qu'il n'existe pas de processus nationaux de collecte de données et que les gens sont généralement réticents à avouer volontairement leur appartenance à un gang. Tel que mentionné par Sinclair et Grekul (2012), une lacune des documents portant sur les gangs de jeunes tient à l'information que nous utilisons pour évaluer le taux d'adhésion aux gangs de jeunes au Canada. La majorité des rapports et ouvrages universitaires citent une seule source de statistiques sur les gangs de jeunes, soit les Résultats de l'Enquête policière canadienne sur les gangs de jeunes de 2002 (Chettleburgh, 2003). Les conclusions de cette enquête nationale sont fondées sur les perceptions de la police à l'égard du nombre de gangs et de membres de gangs dans certaines administrations régionales et sur des estimations stratifiées dans d'autres administrations. Comme les résultats datent d'il y a 15 ans, on ne sait pas si les données continuent de refléter la situation actuelle des gangs de jeunes au Canada. Certaines études récentes ont tenté de présenter une évaluation systématique de l'ampleur du phénomène des gangs de jeunes à l'échelle provinciale ou territoriale, mais aucune autre enquête nationale sur l'adhésion aux gangs de jeunes n'a depuis été menée. En outre, dans certaines circonstances, il est problématique de compter sur la divulgation volontaire de l'adhésion. L'affiliation et l'appartenance à un gang sont souvent passées sous silence, surtout s'il y a des activités accrues de surveillance et de répression des gangs dans les collectivités ou si la confirmation de l'appartenance pourrait compromettre la sécurité du jeune. Cela peut faire en sorte que ce dernier soit généralement réticent à parler de son adhésion en présence de figure d'autorité.

En général, les recherches laissent entendre que l'appartenance aux gangs de jeunes recoupe de nombreux contextes ethniques, géographiques, démographiques et socioéconomiques. Cependant, il y a souvent un lien entre le sexe, la race, l'origine ethnique et la structure de classe qui entre en ligne de compte dans la formation de certains gangs. Au cours des dernières années, trois populations ont fait l'objet d'un intérêt accru de la part des spécialistes des gangs et des chercheurs sur le sujet au Canada, soit les jeunes autochtones, les jeunes immigrants et les jeunes femmes. Ces trois groupes seront présentés dans cette présente section.

Jeunes autochtonesNote de bas de page 7

Par le passé, le sujet des gangs autochtones avait largement été ignoré dans le cadre des recherches canadiennes sur les gangs, mais le nombre d'études gouvernementales et de travaux universitaires a augmenté au cours des 15 dernières années. La présence de gangs autochtones dans les régions urbaines et rurales, dans les réserves et dans les établissements carcéraux est maintenant bien documentée. Même si les ressources destinées précisément aux jeunes autochtones sont encore relativement limitées, nous continuons de déployer des efforts pour accroître notre connaissance et notre compréhension de cette population par l'entremise de recherches et d'études d'évaluation théoriques et empiriquesNote de bas de page 8.

On croit que l'appartenance aux gangs de jeunes autochtones se répand rapidement dans les provinces des Prairies, surtout dans les villes de Winnipeg, de Regina, de Saskatoon et d'Edmonton (Preston, Carr-Stewart et Bruno, 2012). Les gangs de jeunes autochtones ont également fait leur apparition dans le nord du Canada, soit à Iqaluit et à Yellowknife. C'est préoccupant, car la proportion de membres des Premières Nations, de Métis et d'Inuits continue d'augmenter rapidement comparativement aux autres groupes de la société canadienne, leur moyenne d'âge étant beaucoup moins élevée que dans le reste de la population (Statistique Canada, 2011). En outre, la surreprésentation de cette population dans le système de justice pénale est bien documentée (Grekul et LaBoucane-Benson, 2008; Programme des services correctionnels, 2016), tout comme les taux élevés d'infraction avec violence et de victimisation au sein des collectivités autochtones (Boyce, 2016; Brzozowski, Taylor-Butts et Johnson, 2006).

Les gangs autochtones existent depuis des décennies mais, règle générale, ils n'ont pas atteint le degré de complexité d'autres groupes criminels organisés. Malgré leur nombre et leur présence notable au sein de la population carcérale, les gangs autochtones sont souvent considérés comme des gangs de rue et des groupes « aspirants » connus pour leur violence, leur structure fondée sur les gangs afro-américains (p. ex. tatouages, signes de la main, chaînes de commandement) et leurs conflits avec d'autres groupes. Ils sont relativement changeants, leur force et leur nombre augmentant ou diminuant selon l'évolution des membres et en réaction aux stratégies d'application de la loi (Grekul et LaBoucane-Benson, 2008). Les membres sont habituellement des personnes en marge des structures légitimes et illégitimes offertes dans la société canadienne. Ils ont tendance à avoir un niveau de scolarité moins élevé et à être plus désavantagés sur le plan économique comparativement aux membres d'autres organisations criminelles (Deane, Bracken et Morrissette, 2007; Goodwill, 2016). Les gangs autochtones sont souvent intergénérationnels et, même si certaines données indiquent que la plupart des membres de gangs ont plus de 18 ans, des participants à des études de recherche et à des évaluations de programmes canadiennes ont déclaré avoir participé à des activités de gang dès l'âge de 8 ans (Badger et Albright, 2003; Comack, Deane, Morrissette et Silver, 2013; Prairie Research Associates, 2011; Totten et Dunn, 2012).

Selon certaines études (p. ex. Kelly et Caputo, 2005), les gangs autochtones sont utilisés par des organisations criminelles plus organisées pour qu'ils fassent le « travail de rue ». Les jeunes autochtones sont affectés à des activités criminelles plus désorganisées et moins profitables, notamment le trafic de drogues, les voies de fait et les introductions par effraction. Enfin, la violence perpétrée par les gangs autochtones est différente de celle commise par les autres gangs de jeunes du Canada. Les taux de violence interne, y compris les suicides, les surdoses de drogue et les comportements d'automutilation, sont beaucoup plus élevés que les formes externes de violence criminelle. De nombreux actes de violence physique dans les gangs autochtones sont motivés par la vengeance, les représailles et la réputation, faisant en sorte que les jeunes hommes autochtones s'en prennent à leurs semblables (Totten, 2009, 2013).

Facteurs de risque propres à la population

Des recherches canadiennes se sont penchées sur les facteurs de risque spécifiques aux membres de gangs de jeunes autochtones. D'abord et avant tout, l'adhésion à un gang est associée à des facteurs précurseurs remontant aux pertes historiques et culturelles, aux inégalités sociales et politiques et aux obstacles économiques auxquels ont fait face de nombreux Autochtones pendant de multiples générations (p. ex. racisme, marginalisation, colonisation, perte de culture, perte des terres, pauvreté, violence intergénérationnelle, chômage et problèmes liés à une mauvaise santé). Ces niveaux multiples de marginalité engendrent des conditions sociales et géographiques favorables à la formation de gangs et à l'adhésion aux gangs chez les jeunes autochtones. Globalement, ces derniers sont plus susceptibles d'adhérer à un gang de jeunes que les non-Autochtones (Preston, Carr-Stewart et Bruno, 2012; Sinclair et Grekul, 2012).

Il a été montré que des facteurs de risque individuels, comme les expériences stressantes, les difficultés vécues tôt dans la vie et les émotions négatives découlant de la marginalité dans d'autres domaines de la vie, augmentent la probabilité que les jeunes autochtones adhèrent à un gang (Goodwill, 2016). En outre, la colère a été associée à l'introduction à un gang, tandis que les symptômes de dépression et l'hyperactivité/impulsivité ont été associés à l'appartenance à un gang (Hautala, Sittner et Whitbeck, 2016). Par ailleurs, plusieurs études ont révélé que la délinquance est un facteur important de l'appartenance à un gang chez les jeunes autochtones (Freng, Davis, McCord et Roussell, 2012). De plus, les adolescents autochtones ont tendance à commencer à consommer des substances plus tôt que les autres groupes raciaux et ethniques, et il a été constaté que la toxicomanie était un facteur important de l'adhésion aux gangs au sein de ce groupe (Hautala, Sittner et Whitbeck, 2016).

L'influence des pairs est un des facteurs de prédiction les plus constants et solides de l'adhésion aux gangs. Les relations avec des pairs qui font partie d'un gang (notamment le flânage, la délinquance, le fait de prendre les autres membres du gang comme modèle ou de montrer sa valeur au gang) ont été considérées comme un facteur précurseur de l'adhésion ultérieure à un gang chez les jeunes autochtones (Goodwill, 2016; Hautala, Sittner et Whitbeck, 2016). L'école est un autre domaine clé qui peut accroître le risque d'adhésion à un gang. Des recherches ont montré que les jeunes autochtones qui se joignent à des gangs ont peu de liens avec l'école. Il a été constaté qu'un faible attachement scolaire et des liens faibles avec l'école étaient des corrélats de l'introduction à un gang et que les problèmes de comportement à l'école primaire peuvent accroître le risque d'adhésion ultérieure à un gang (Hautala, Sittner et Whitbeck, 2016).

Enfin, la famille est un domaine de risque clé puisque l'adhésion à un gang familial constitue un facteur d'attirance fort et que d'autres problèmes familiaux, y compris une faible supervision de la part des parents et la négligence/les mauvais traitements par les parents, constituent d'importants facteurs d'incitation augmentant l'attrait des gangs (Grant et Feimer, 2007; Grekul et LaBoucane-Benson, 2008). En outre, les démêlés avec le système de protection de l'enfance autochtone représentent un facteur de risque d'adhésion à un gang et de criminalité qui est établi assez solidement dans la littérature. La trajectoire entre le système de protection de l'enfance vers l'adhésion à un gang est favorisée par le déplacement des enfants autochtones qui peut engendrer une vulnérabilité, des mauvais traitements et des préjudices, des problèmes de confiance et d'attachement ainsi qu'une multitude de problèmes de santé mentale. Les membres de gangs eux-mêmes affirment que leurs pairs qui ont été élevés dans ce système sont des cibles idéales pour le recrutement, car les gangs promettent d'agir en tant que famille de substitution (Grekul et LaBoucane-Benson, 2008; Sinclair et Grekul, 2012).

Cheminement vers l'adhésion à un gang et l'abandon d'un gang

Les facteurs de risque des jeunes autochtones concernant l'adhésion à un gang sont exacerbés par les vastes problèmes historiques, structurels et culturels mentionnés précédemment. Parmi les sous-populations marginalisées (c.-à-d. jeunes à risque et jeunes membres de gangs de façon plus générale), les jeunes autochtones sont peut-être les plus marginalisés. Comme il existe peu d'options pour atténuer ces préoccupations, le facteur de motivation le plus fort menant à une vie de gang est la survie ainsi que la protection, le sentiment d'identité et d'appartenance, le soutien financier et l'accès à l'alcool et aux drogues que le gang fournit (Goodwill, 2016; Goodwill et Ishiyama, 2015; Grekul et LaBoucane-Benson, 2008).

Totten (2009, 2013) laisse entendre qu'une approche axée sur le cheminement, soutenue par des données probantes tirées de plusieurs études canadiennes, permet de déterminer les mécanismes principaux par l'entremise desquels les jeunes autochtones se trouvent mêlés aux activités d'un gang. Il existe cinq cheminements principaux qui peuvent se chevaucher pour créer des problèmes complexes pour certains jeunes autochtones :

  • Processus de la violence cyclique dans le cadre duquel les survivants de mauvais traitements et de négligence au cours de l'enfance deviennent les auteurs et les victimes d'actes violents à l'adolescence. Les enfants autochtones qui subissent ce type de mauvais traitements sont très susceptibles de devenir des délinquants et des criminels, de recourir à la violence et d'adhérer à des gangs pendant leur adolescence.
  • Fait de vivre de multiples séjours à l'extérieur du domicile dans le système de protection de l'enfance et les établissements correctionnels. Ces établissements sont de très bons endroits où recruter des membres de gangs, et un nombre important de membres de gangs ont déclaré que c'est seulement après avoir été placés dans de tels établissements qu'ils sont devenus membres de gangs.
  • Effet à long terme des troubles cérébraux et de santé mentale entraînés par l'exposition prolongée aux traumatismes pendant l'enfance ainsi que des troubles du développement et de la vulnérabilité émotionnelle qui en découlent. De nombreux membres de gangs autochtones recourant à la violence ont un mode de pensée « terminal » les poussant à ne penser qu'à leur survie; leur sentiment de sécurité et de confiance ne se forme jamais adéquatement.
  • Exclusion et dévaluation sociales en raison de la classe sociale, de la race, de l'orientation sexuelle et du sexe. La perte d'identité culturelle, combinée à la marginalisation sociale et économique, favorise la violence de gang.
  • Développement de l'hypermasculinité et de la féminité sexualisée. La violence est utilisée pour construire la masculinité, et la sexualité sert à construire la féminité.

La recherche sur le fait de quitter un gang a révélé que les membres de gangs autochtones peuvent accorder une importance considérable à leurs propres processus décisionnels et capacités en ce qui concerne l'abandon du gang et même si la décision peut être liée à divers facteurs toutefois, aucun événement particulier n'a pu être identifié comme un élément déclancheur. Par conséquent, les mauvais traitements au sein du gang et le fait de se lasser de la vie de gang et de vouloir éviter l'incarcération, ainsi que l'influence positive des parents, des partenaires ou des enfants, l'établissement de liens sociaux, surtout avec sa propre culture autochtone, le fait d'éviter la consommation d'alcool et de drogues et une période de contemplation loin de la criminalité  peuvent être associés au fait de quitter un gang mais ces facteurs ne garantissent la décision de partir. En outre, un emploi stable est souvent un facteur, tout comme la capacité de subvenir à ses propres besoins est considérée comme un facteur clé du fait de réussir à quitter un gang (Goodwill et Ishiyama, 2015; Grekul et LaBoucane-Benson, 2008).

Pour les jeunes autochtones provenant de milieux marginalisés dont l'existence est caractérisée par l'isolement social et le désavantage, la présence de stéréotypes peut nuire au processus d'abandon. L'abandon partiel suppose de s'éloigner de son ancienne identité en tant que membre de gang pour commencer à se forger une nouvelle identité. Pour les jeunes autochtones, cela comprend un autre changement, soit celui d'arrêter de se voir comme répondant à un stéréotype négatif. Partant d'une position d'exclusion par rapport aux opportunités sociales, le jeune doit en venir à se considérer comme quelqu'un qui mérite d'être inclus. Nouer des relations avec des personnes prosociales et leur faire confiance sont des défis majeurs (Deane, Bracken et Morrissette, 2007).

Directives en matière de prévention et d'intervention

Bon nombre des facteurs de risque de l'adhésion aux gangs chez les jeunes autochtones sont semblables à ceux que l'on trouve chez les jeunes en général qui font partie d'un gang, ce qui laisse entendre que les stratégies de prévention et d'intervention déjà existantes en matière de gangs peuvent fonctionner auprès de ces jeunes. Cependant, les conditions qui engendrent les risques pour les jeunes autochtones proviennent probablement de processus sociaux, politiques et historiques différents, ce qui fait que les facteurs de risque cernés ont une fonction semblable, mais un contexte différent (Whitbeck, Sittner Hartshorn et Walls, 2014). Cela a des répercussions importantes sur la manière dont nous concevons et mettons en œuvre les programmes de prévention et d'intervention en matière de gangs destinés aux jeunes autochtones, surtout ceux habitant dans des régions rurales ou éloignées (Hautala, Sittner et Whitbeck, 2016).

L'existence d'inégalités structurelles et de traumatismes collectifs nécessite une compréhension continue et représente un aspect important des travaux menés auprès de jeunes autochtones membres de gangs (Goodwill, 2016). Les pratiques de prévention et d'intervention en matière de gangs doivent inclure la capacité d'évaluer les effets intergénérationnels des gangs et des établissements dans lesquels sont habituellement surreprésentés les Autochtones, ainsi que les objectifs des collectivités autochtones qui s'efforcent de renverser ces tendances (Grekul et LaBoucane-Benson, 2008). En outre, la tâche consiste à limiter l'exclusion des familles autochtones des services opportuns, pertinents et accessibles pour aborder continuellement et efficacement ce qui est déjà survenu et prévenir la transmission de traumatismes entre les générations (Goodwill et Ishiyama, 2015). Les problèmes de gang doivent être examinés dans le contexte des expériences familiales et traités en vertu d'un cadre thérapeutique multisystémique. Les professionnels spécialisés dans le traitement des traumatismes et des dépendances et les travaux auprès de familles en difficulté doivent assumer des rôles importants en tant que ressources de guérison coordonnées et soutenues au sein des collectivités touchées par les gangs (Hautala, Sittner et Whitbeck, 2016; Preston, Carr-Stewart et Bruno, 2012).

Il existe un nombre limité de programmes de prévention et d'intervention destinés aux jeunes autochtones, mais plusieurs programmes prometteurs sont fondés sur l'adéquation et la pertinence sur le plan culturel, et ces programmes semblent aider de façon relativement efficace les jeunes à risque et les jeunes membres de gangs (Sinclair et Grekul, 2012).Note de bas de page 9Tous les efforts doivent être adaptés sur le plan culturel pour qu'ils correspondent au contexte de développement dans lequel les jeunes autochtones vivent pour intégrer leur vision unique du monde et tirer profit des forces culturelles et communautaires locales (Whitbeck, Sittner Hartshorn et Walls, 2014). Cela restreint également la possibilité d'accepter ce que Klein et Maxson (2006) appellent les « idées reçues » et de présumer que les leçons que nous tirons des programmes efficaces en matière de gangs dans un endroit peuvent être appliquées à d'autres endroits.

Les nouvelles stratégies et approches ainsi que les partenariats de collaboration et de résolution de problèmes doivent être adaptés sur le plan culturel; cela va au-delà de la « sensibilisation culturelle » (connaissance d'un groupe) et de la « sensibilité culturelle » (une certaine expérience d'un groupe). Par exemple, la roue de médecine est un symbole important des enseignements autochtones; il s'agit d'une approche circulaire et holistique, par opposition à l'approche linéaire utilisée dans de nombreux milieux occidentaux (Totten, 2009, 2013). En outre, dans les cultures autochtones, le concept de guérison est un thème central ayant une vaste application. Il renvoie généralement à un processus continu, soit la pratique de « bien vivre » et le cheminement connexe ou la recherche de la « bonne vie » (Hart, 1999). Un mécanisme de guérison puissant utilisé dans toutes les collectivités autochtones est le rétablissement des traditions culturelles et spirituelles. La pratique des cérémonies du calumet, des sueries, de la danse du soleil et des cérémonies d'attribution du nom permet à une personne d'en apprendre sur son ascendance culturelle (Deane, Bracken et Morrissette, 2007).

Jeunes immigrantsNote de bas de page 10

Au cours des dernières années, le public s'est montré de plus en plus préoccupé par les « gangs de jeunes immigrants ». Comme le note Wortley et Tanner (2006), une hypothèse existe selon laquelle les gangs de jeunes sont plus actifs au Canada en raison de l'immigration récente en provenance de certains pays sujets à avoir des gangs, ce qui signifie que les activités problématiques des gangs de jeunes sont importées de l'étranger au Canada. Cependant, comme il y a un manque de renseignements statistiques sur la criminalité relativement au statut d'immigrant, de la race et de l'origine ethnique, il n'est pas possible d'établir l'importance et les tendances des changements de l'adhésion aux gangs criminels chez les jeunes provenant de familles d'immigrants (Ngo, 2010). Jusqu'à maintenant, un nombre limité d'études canadiennes ont examiné la question question des jeunes immigrants et des gangs.Note de bas de page 11 Il faut poursuivre la discussion sur les liens entre l'immigration, la criminalité et l'adhésion aux gangs au Canada afin d'orienter l'élaboration de politiques, de programmes et de services adaptés à cette population.Note de bas de page 12

Certains nouveaux arrivants peuvent être confrontés à un certain nombre d'obstacles à l'intégration à la société canadienne. Les jeunes immigrants de première génération peuvent faire face à des problèmes linguistiques, acculturatifs, psychologiques et économiques. Par exemple, ils peuvent rencontrer des obstacles liés à l'égalité des chances et faire face à un vaste éventail d'obstacles et de difficultés quant à l'accès aux services et au soutien dans les domaines des services sociaux, de l'éducation, de la santé et de la justice. Les jeunes Canadiens de deuxième génération nés de  familles d'immigrants ont tendance, collectivement, à avoir une bonne situation économique, mais ceux provenant d'une minorité visible peuvent être confrontés à de grandes inégalités relativement au niveau de leur scolarité et leur participation au marché du travail. Les jeunes Canadiens de deuxième génération peuvent également faire face à des problèmes socioculturels en ce qui a trait aux attentes culturelles concurrentes, à l'identité culturelle et aux interactions interculturelles (Ngo, 2010; Sersli, Salazar et Lozano, 2010).

Les gangs se forment habituellement dans des collectivités où il y a une accumulation de différents types de désavantages (p. ex. désavantage sur le plan économique, manque d'opportunités, éclatement de la famille, discrimination raciale). L'émergence et la durabilité des gangs et de leurs membres sont fonction de la mesure dans laquelle ces désavantages sont courants dans la collectivité (Pyrooz, Fox et Decker, 2010). Ces groupes sont confrontés à ce que Vigil (2002) appelle la « marginalité multiple », où l'effondrement des facteurs sociaux et économiques mène à une « socialisation de la rue ». La marginalité multiple agit et réagit au sein des populations pour pousser les jeunes vers la rue, et l'adaptation des immigrants ou des migrants est un élément central de ce processus. Tandis que les jeunes vivent la socialisation de la rue, ils peuvent former une sous-culture de la rue, soit adhérer à un gang.

Habituellement, ces gangs sont organisés dans le but précis de mener des activités criminelles pour obtenir un gain financier. Ils ont une structure hiérarchique, avec des dirigeants et une chaîne de commandement, et ils sont ouverts à choisir de nouveaux membres, mais de façon sélective. La plupart des gangs ont des rituels d'initiation fondés sur la violence, et ils assujettissent leurs nouveaux membres à des vérifications et à des tests personnels pour confirmer leur solidité et leur loyauté. La plupart des jeunes immigrants font partie d'un gang fondé sur l'origine ethnique ou d'un gang multiculturel. Ceux qui font partie des gangs multiculturels ont indiqué que, même si leur gang criminel peut accueillir des personnes d'origines ethniques diverses, seules celles provenant de certains groupes ethniques peuvent assumer un rôle de leadership (Ngo, 2010). Il importe toutefois de mentionner que, quand nous présumons que tous les gangs ethniques sont pareils, nous perdons de vue le caractère unique des groupes qui, bien qu'ils soient tous axés sur la criminalité, ont été créés dans des conditions et des contextes différents, sont souvent organisés différemment et assument des fonctions et prennent des formes variées (Grekul et LaBoucane-Benson, 2008).

Facteurs de risque propres à la population

Les conclusions de plusieurs études qualitatives canadiennesNote de bas de page 13montrent que les facteurs de risque individuels, scolaires, familiaux et communautaires de l'adhésion aux gangs qui semblent avoir une incidence négative sur les jeunes immigrants sont interreliés, laissant certains jeunes aux prises avec ce qui peut sembler des problèmes insurmontables. À l'échelle individuelle, les familles de jeunes immigrants sont souvent vulnérables sur divers plans avant d'immigrer au Canada, ou les jeunes sont touchés par les antécédents de leurs parents avant l'immigration. Cette vulnérabilité découle souvent de la pauvreté, de l'extrême violence et de la brutalité dans leur pays d'origine. Une fois au Canada, la vulnérabilité des jeunes peut être exacerbée par des problèmes de santé mentale et des dommages psychologiques découlant de cas de discrimination et de victimisation (Ngo, 2010). À l'échelle scolaire, le manque de participation a été considéré comme un facteur de risque de l'adhésion aux gangs (Chettleburgh, 2007), et il peut y avoir de multiples problèmes sous-jacents. Les jeunes immigrants peuvent avoir de la difficulté dans leurs études, notamment en raison d'un manque de maîtrise de l'anglais, des troubles d'apprentissage et des expériences scolaires interrompues. Au nombre d'autres difficultés exacerbant ces obstacles, mentionnons l'absence de soutien à la maison en ce qui a trait aux études, la crainte des figures d'autorité et le placement au mauvais niveau scolaire (Kanu, 2008). À l'échelle familiale, les différents taux d'acculturation et de conflits entre la culture à la maison et la culture dominante contribuent à un détachement grandissant par rapport aux parents et peuvent mener à un stress familial supplémentaire et à des conflits familiaux soutenus en raison d'attentes culturelles divergentes (Kanu, 2008; Rossiter et Rossiter, 2009). En outre, il est commun que la supervision parentale soit minime et que les parents ne servent pas de modèles en raison de l'absence physique ou émotionnelle de l'un ou l'autre des parents ou des deux (p. ex. parce qu'ils sont préoccupés par leur survie économique) (Wortley et Tanner, 2006). D'autres facteurs de risque sont la toxicomanie ou les problèmes de santé mentale au sein de la famille, les influences négatives des frères et sœurs plus âgés et la criminalité familiale (Ngo, 2010). Enfin, à l'échelle communautaire, vivre dans des quartiers pauvres où le taux de criminalité est élevé et où la violence et le trafic de drogues font partis  du quotidien constitue un risque particulier pour les jeunes immigrants. Un manque d'intégration fait en sorte que les jeunes immigrants qui vivent dans ces quartiers peuvent ne pas avoir accès aux mêmes ressources et programmes que les jeunes d'autres quartiers (Sersli, Salazar et Lozano, 2010).

Bon nombre des facteurs de risque de l'adhésion aux gangs révèlent la marginalisation soutenue à laquelle sont souvent confrontés les jeunes nouveaux arrivants et leur famille (Rossiter et Rossiter, 2009). Le statut d'immigration n'est pas une cause directe de l'adhésion aux gangs, mais la fréquentation de gangs peut fournir un soutien social et un sentiment d'acceptation, de statut social et de respect que les jeunes n'ont pas à la maison, à l'école ou dans leur collectivité. Les jeunes qui se sentent particulièrement stigmatisés, isolés ou exclus de la société en général peuvent en venir à croire qu'ils sont systématiquement exclus d'opportunités légitimes. L'aliénation sociale et les perceptions d'injustice sociale peuvent être des facteurs importants expliquant pourquoi certains jeunes rejettent les activités sociales traditionnelles et décident de se joindre à des gangs. De plus, ces jeunes peuvent considérer que l'adhésion aux gangs est une expression de résistance par rapport à leurs perceptions d'inégalité sociale et d'oppression (Wortley et Tanner, 2006).

Cheminement vers l'adhésion à un gang et l'abandon d'un gang

L'effondrement des identités et l'absence de sentiment d'appartenance chez les jeunes immigrants peuvent survenir quand leurs expériences négatives à la maison, à l'école et dans la collectivité surpassent leurs expériences positives correspondantes. Cela a lieu lorsque des jeunes sont confrontés à un vaste éventail d'expériences négatives graves sur une longue période, ce qui peut être aggravé par des vulnérabilités qui existaient déjà avant la migration ainsi que par des conditions socioéconomiques à la maison et dans la collectivité. L'effondrement des identités peut laisser place à un concept de soi négatif et à des idées paralysantes quant aux identités ethniques et canadiennes. Sur le plan individuel, il est possible que les jeunes internalisent les identités suivantes : la victime, la personne défavorisée, la personne rejetée, l'incapable, le suiveur, la personne frustrée ou le délinquant. Comme citoyens, il se pourrait qu'ils éprouvent de la difficulté avec leur identité canadienne et qu'ils se considèrent comme des immigrants ou des minorités ethniques peu importe leur durée de résidence au Canada. Ils pourraient se sentir contraints de s'éloigner de leurs pratiques culturelles ou de les abandonner et pourraient être confrontés à un racisme internalisé. Il pourrait même y avoir un écart entre le besoin d'appartenance des jeunes et les difficiles réalités de leur exclusion et de leur isolement sur le plan social. Les jeunes peuvent exprimer le besoin d'appartenir à des réseaux sociaux qui les appuient, mais ne pas sentir qu'ils ont des liens étroits avec les autres à la maison, à l'école ou dans la collectivité (Ngo, 2010).

L'effondrement des identités et l'absence de sentiment d'appartenance peuvent créer un vide au chapitre de l'identité et des liens sociaux, ce qui peut entraîner les jeunes immigrants à chercher à faire partie d'autres réseaux sociaux ou à être ouverts à cette idée. Ils peuvent devenir amis avec d'autres personnes sans liens sociaux, qui peuvent les présenter à d'autres groupes, comme une clique sociale établie, ou ils peuvent former leur propre clique sociale, avec d'autres jeunes. Par l'entremise de ces groupes à risque élevé, les jeunes immigrants peuvent recevoir une validation et un soutien sociaux et adopter des comportements délinquants. Au fil du temps, ces cliques sociales peuvent évoluer et devenir des gangs criminels mieux établis. Dans quelques cas, des membres de la famille peuvent présenter aux jeunes des gangs établis. Grâce à des interactions et des activités de groupe, les jeunes peuvent profiter de liens humains, d'une identité de groupe, d'une protection, d'un statut social, de sensations fortes et de récompenses financières (Ngo, 2010).

Pour les jeunes immigrants, la décision de quitter un gang peut être prise à la suite d'un tournant traumatisant, comme le décès de simples spectateurs ou d'amis proches et la trahison de pairs, ou en raison d'une maturité cognitive et d'un éveil religieux. Grâce à l'autodétermination et un appui solide des membres de la famille, les jeunes immigrants peuvent s'éloigner graduellement des autres membres du gang et rompre les liens avec eux pour commencer une nouvelle vie. Afin de réintégrer leur famille et leur collectivité, ils pourraient se fier au soutien familial et social. Ils peuvent tenter de poursuivre leurs études ou d'obtenir/de conserver un emploi légitime. Ils peuvent nouer à nouveau des liens avec la collectivité en participant à des activités et des services communautaires. Au sein de leur communauté ethnique, ils pourraient découvrir leur spiritualité grâce à un encadrement religieux et communautaire (Ngo, 2010).

Directives en matière de prévention et d'intervention

Afin de soutenir les jeunes à risque élevé et les jeunes membres de gangs qui proviennent de familles d'immigrants, il faut établir une vision commune de collaboration entre les intervenants de multiples secteurs afin de  favoriser le développement d'identités positives et un sentiment sain d'appartenance à la maison, à l'école et à la collectivité. Ngo (2010) recommande certains principes pour orienter l'élaboration de programmes et de services destinés à cette population :

  • Intégration d'une identité axée sur l'habilitation — les initiatives doivent présenter des stratégies claires pour promouvoir une identité canadienne, une identité ethnique et un concept de soi positif.
  • Promotion de l'équité — les intervenants doivent tenir compte de l'équité dans l'affectation des ressources et l'accessibilité des services, du soutien et des occasions, qui permettent d'atteindre des résultats équitables en matière de bien-être et de réussite pour les jeunes de familles d'immigrants.
  • Participation, coordination et collaboration de multiples intervenants — de multiples personnes et organisations travaillant ensemble peuvent faire en sorte d'accroître les ressources et l'expertise professionnelle et d'assurer la fourniture d'un soutien spécialisé pour répondre aux besoins propres aux jeunes et veiller à leur développement.
  • Approches multiples concernant les services pour les jeunes — en réaction aux expériences de vie et aux besoins complexes des jeunes à risque élevé et des jeunes membres de gangs qui proviennent de familles d'immigrants, les intervenants doivent prêter attention aux multiples aspects des besoins et aux initiatives correspondantes nécessaires pour aborder ce problème complexe. 
  • Rapidité et adaptation - les initiatives doivent être rapides et répondre aux besoins des jeunes à risque et des jeunes membres de gangs qui font face à des pressions sociales, des exigences et des influences concurrentes.

En ce qui a trait à la prévention, les stratégies pour le soutien familial doivent aborder les problèmes liés à la réinstallation, aux capacités scolaires et à l'alphabétisation, à l'interaction familiale, au bien-être et à l'influence des parents et des frères et sœurs, à la sensibilisation et à l'encadrement des familles et au soutien socioéconomique. Les stratégies scolaires doivent aborder les programmes à l'école, les occasions et les programmes sociaux, le renforcement du caractère et le développement de l'identité, l'encadrement, les transitions scolaires, la sensibilisation à l'égard des étudiants aliénés sur le plan social et leur soutien psychosocial, la sensibilisation et le soutien préventifs et les pratiques scolaires efficaces. Par ailleurs, les stratégies communautaires doivent favoriser les programmes propres à la culture des jeunes immigrants, l'accès, pour les jeunes provenant de familles d'immigrants, aux services offerts aux jeunes en général, l'encadrement, la sensibilisation et le soutien communautaires, l'essor des collectivités et des quartiers, l'action sociale pour atténuer les iniquités dans les quartiers, la compétence culturelle et la capacité des organisations de travailler avec des jeunes affichant des comportements problématiques (Ngo, 2010; Sersli, Salazar et Lozano, 2010; Wortley et Tanner, 2006).

Pour que les jeunes membres d'un gang puissent quitter le gang et réintégrer la collectivité, des stratégies relatives au soutien familial doivent assurer la sécurité familiale, la participation des membres de la famille et le soutien en vue de renforcer les familles. Les stratégies scolaires doivent assurer la sécurité à l'école, un soutien psychosocial, scolaire et financier et des opportunités d'études pour les jeunes qui retournent à l'école. Les stratégies communautaires doivent porter sur la sensibilisation, le soutien pour quitter le gang, la fourniture d'un soutien après l'abandon du gang, la participation et les liens communautaires et les opportunités de leadership pour les jeunes qui ont déjà fait partie d'un gang afin qu'ils puissent contribuer positivement à la collectivité (Ngo, 2010; Sersli, Salazar et Lozano, 2010; Wortley et Tanner, 2006).

Jeunes femmes

Par le passé, les jeunes femmes sont demeurées relativement « invisibles » dans la littérature sur les gangs pour diverses raisons, notamment les suivantes : les recherches ciblent principalement les activités de gangs composés d'hommes; la délinquance, la violence et l'appartenance à un gang sont considérées comme des comportements d'hommes; et la police prête une attention limitée à l'appartenance des femmes aux gangs (Khan, Brice, Saunders et Plumtree, 2013; O'Neal, Decker, Moule et Pyrooz, 2016; Scott et Ruddell, 2011). En outre, compte tenu du nombre limité de recherches menées sur les gangs au Canada en général, l'attention accordée à l'égard des femmes et de leurs expériences dans les gangs est beaucoup moins fréquente.Note de bas de page 14Cependant, au cours des dernières années, des progrès ont été réalisés en ce qui concerne l'examen de cette sous-population.

Contrairement aux États-Unis, où un nombre accru de jeunes femmes se joignent à un gang ou forment un gang, le Canada compterait relativement peu de femmes membres de gangs, et on présume que la plupart d'entre elles demeurent en périphérie du gang (Dorais et Corriveau, 2009). On présume aussi que le taux d'adhésion à un gang chez les femmes est d'environ 10 fois moins élevé au Canada qu'aux États-Unis. En 2002, on estimait que 6 % des membres de gangs étaient des femmes, allant de 3 % en Ontario à 12 % en Colombie-Britannique (Chettleburgh, 2003). Cependant puisque les femmes ont tendance à se faire arrêter moins souvent par la police, il est possible que ces chiffres soient sous-estimés. Selon Chettleburgh (2003), le nombre réel serait plus près du tiers de tous les membres de gangs. En outre, Totten (2008) laisse entendre que le nombre de femmes membres de gangs est plus élevé maintenant, puisque des sources indiquent que l'adhésion des femmes aux gangs au Canada est à la hausse.

Les premières recherches ont décrit les jeunes femmes dans les gangs comme adoptant des rôles marginaux assez stéréotypés (p. ex. objets sexuels, petites amies, groupies, responsables de la garde des armes et de la drogue, alibis, leurres) plutôt que d'avoir des responsabilités égales à celles des hommes membres de gangs (Lauderdale et Burman, 2009). Parfois, d'autres descriptions parlent de « garçons manqués » (des femmes qui ont démontré leurs habiletés physiques et prouvé qu'elles pouvaient se tenir avec des hommes et se battre à leurs côtés) ou de « filles de gangs » (groupes de jeunes femmes bruyantes et grossières qui non seulement proféraient des jurons et étaient sexuellement actives, mais ne se souciaient pas non plus de la façon dont elles se vêtaient) (Archer et Grascia, 2006; Tobin, 2008). Toutefois, au cours des dernières années, les études ont permis de constater des changements dans les positions occupées par les jeunes femmes, et cela est reflété par la façon dont les femmes membres de gangs ont commencé récemment à assumer des rôles plus centraux et indépendants dans les gangs, y compris en ce qui concerne le trafic de drogues, le recrutement et l'application des règles du gang (p. ex. le recouvrement des dettes de drogue) (Nimmo, 2001). Certaines jeunes femmes sont considérées comme des personnes dures et vues comme un atout pour le gang.

Tout comme la recherche disponible indique qu'il n'y a pas de type défini de femmes membres de gangs, il existe de multiples types de gangs qui comptent des femmes parmi eux. Le « gang auxiliaire » est un système de soutien pour un gang principal composé d'hommes. Ce gang auxiliaire de femmes a sa propre structure de leadership et il s'agit d'une version féminine d'un gang d'hommes (p. ex. « rois » et « reines »). Ces groupes participent activement aux activités du gang pour leur propre gain et peuvent potentiellement être associés avec leurs homologues masculins. Le « gang mixte » est composé d'hommes et de femmes, il n'y a aucune distinction entre les genres au sein de l'organisation et le statut dans le gang est fondé sur le respect obtenu par chaque membre. Enfin, il y a le rare « gang indépendant », un gang entièrement composé de membres féminins qui n'est lié à aucun gang d'hommes ni gang mixte. Il s'agit du type de gang de femmes le moins courant, mais la recherche commence à montrer que certains gangs auxiliaires peuvent devenir des gangs indépendants (Tobin, 2008). De plus, il peut y avoir une certaine différence dans le traitement des femmes membres de gangs selon le type de gang auquel elles appartiennent. Nimmo (2001), par exemple, a observé que les gangs moins organisés offraient plus de pouvoirs et un meilleur statut aux femmes qui sont des associées ou des membres. Lauderdale et Burman (2009) ont observé que la position occupée par une femme au sein d'un gang peut changer et est habituellement déterminée par les chefs du gang.

Facteurs de risque propres à la population

Bien qu'il y ait une compréhension accrue des facteurs de risque associés à l'appartenance à un gang, les connaissances au sujet des facteurs de risque propres au genre sont encore limitées, étant donné que peu de recherches sur les gangs de jeunes ont comparé de façon approfondie les jeunes femmes et les jeunes hommes. Compte tenu de cette limite, certaines conclusions provisoires peuvent être tirées des recherches menées jusqu'à maintenant. De nombreux facteurs de risque semblent être partagés par les hommes et les femmes, notamment les suivants : problèmes de comportement précoces; croyances qui soutiennent les comportements déviants; manque de liens prosociaux; fréquentation de pairs délinquants et engagement envers eux; faible soutien social; faible supervision et contrôle social des parents; perceptions de troubles scolaires; mauvais résultats scolaires; pauvreté; et degré élevé d'activités de gangs ou de trafic de drogues dans la collectivité (voir Bell, 2009; Esbensen et coll., 2010; Peterson et Morgan, 2014).

Il y a aussi plusieurs facteurs de risque de l'adhésion aux gangs qui semblent avoir un impact différent sur les jeunes selon le genre. Les jeunes femmes sont plus susceptibles de venir d'un milieu défavorisé, d'avoir été marginalisées et d'avoir de multiples problèmes familiaux, y compris des antécédents de violence physique, sexuelle et psychologique à la maison et le fait d'avoir été témoin de violence physique et de toxicomanie à la maison et d'avoir un membre de la famille qui fait partie d'un gang ou qui a été incarcéré (Grekul et LaRoque, 2011; Nimmo, 2001). De plus, dans le contexte scolaire, l'engagement, l'attachement ou les attentes, en plus des possibilités d'éducation limitées, ont plus d'incidence sur l'adhésion à un gang chez les femmes que chez les hommes (Esbensen et coll., 2010; Peterson, 2012).

Cheminement vers l'adhésion à un gang et l'abandon d'un gang

Plusieurs raisons expliquent pourquoi les jeunes femmes joignent un gang, et ce ne sont pas toutes les personnes qui le font pour les mêmes raisons. À l'instar des motivations générales analysées ci-dessus, divers facteurs d'incitation et d'attirance peuvent influer sur la décision d'une personne de devenir membre d'un gang. Les jeunes femmes ont dit qu'elles s'étaient jointes à un gang pour être respectées et trouver leur identité pendant leur adolescence, qui était déjà une période difficile, et rejeter les rôles et stéréotypes établis par la société. Par leur appartenance à un gang, elles peuvent rejeter des valeurs comme la passivité et l'obéissance aux hommes (Peterson, 2012).

Bell (2009) et Miller (2001) ont souligné la relation entre l'exposition à la violence et la victimisation comme un facteur d'attirance vers les gangs. Certaines jeunes femmes sont poussées vers les gangs en raison d'antécédents de violence physique, sexuelle ou psychologique. Un désir de protection et de sentiment d'appartenance à un gang peut être une conséquence du fait de grandir dans une famille dysfonctionnelle et violente, du faible degré de présence ou d'attachement des parents et du fait que la famille est défavorisée et pauvre. Les jeunes femmes sont susceptibles de dire qu'elles sont devenues membres d'un gang pour avoir une autre structure familiale (Archer et Grascia, 2006; Nimmo, 2001; Totten, 2008).

Les relations avec les pairs sont aussi souvent liées à l'adhésion des femmes à un gang. Les jeunes femmes ont déclaré avoir commencé à faire partie d'un gang en raison de la pression des pairs, soit en étant intimidées ou « battues » jusqu'à ce qu'elles entrent dans le gang, soit en étant « préparées » sexuellement par des membres plus anciens (Archer et Grascia, 2006), souvent un petit ami ou un parent de sexe masculin (Tobin, 2008). Les jeunes femmes peuvent également se joindre à un gang parce qu'elles veulent avoir une vie sociale et éprouver du plaisir et de l'excitation (Eghigian et Kirby, 2006). Comme les hommes, certaines femmes cherchent l'excitation dans le crime et la toxicomanie (Archer et Grascia, 2006; Totten, 2008). Les femmes membres de gangs ont aussi dit que leur quartier manquait de ressources et d'activités et que le gang fournissait donc un important « milieu social », permettant de tromper l'ennui et la frustration (Joe et Chesney-Lind, 1995).

Indépendamment de la présence accrue des femmes dans les gangs et de la transformation de leurs rôles, il y a toujours de nombreuses données probantes suggérant  que l'exploitation, la vulnérabilité et la victimisation des femmes dans les gangs se poursuivent (Archer et Grascia, 2006). Ces jeunes femmes ont souvent des antécédents personnels de victimisation et font l'objet de multiples actes d'oppression, y compris ceux fondés sur le genre, la race, la classe sociale et la discrimination systémique, et, lorsqu'elles commencent à fréquenter un gang, leur situation empire  (Grekul et LaRocque, 2011). Plutôt que d'être un refuge, une source de protection et une famille de substitution, comme il le promet habituellement, le gang devient l'agresseur, le proxénète et le chef (Dorais et Corriveau, 2009), et les femmes membres du gang sont plus susceptibles que les autres femmes d'avoir des comportements sexuels à risque ou des comportements nuisibles, ce qui comprend les batailles de gangs, la consommation et la vente de drogues et le port d'armes (Khan et coll., 2013).

La victimisation par les membres du gang n'est pas rare (Abbottsford Youth Commission, 2010). Les chercheurs font état d'une victimisation sexuelle et physique répandue par les petits amis et aussi par d'autres hommes membres du gang (Valdez, 2007). Les formes de victimisation à l'égard des femmes diffèrent également de celles touchant les hommes. Totten (2009, 2013) décrit la nature sexospécifique des processus entourant l'adhésion aux gangs incluant l'hypermasculinité et la féminité sexualisée. Une hiérarchie établie selon le sexe permet la réussite du gang, et l'exploitation sexuelle est utilisée comme un moyen de faire de l'argent, en fournissant un service très recherché tout en préservant le pouvoir et le contrôle des hommes (Petersen et Howell, 2013).

De plus, puisqu'elles sont constamment surveillées par les hommes, les femmes peuvent agir plus agressivement pour démontrer leur courage ou obtenir le respect des hommes. Le « capital » principal d'une jeune femme dans la rue est son degré de contrôle et sa réputation concernant sa maîtrise d'elle-même, et les femmes ayant un grand besoin de se faire accepter socialement par les hommes membres du gang feront « tout ce qu'il faut » pour maintenir des liens étroits avec ces hommes (Petersen et Howell, 2013). Cela peut expliquer le plus grand nombre d'activités délinquantes menées par les jeunes femmes dans les gangs mixtes, et certaines études ont fait état d'une égalité accrue entre les hommes et les femmes au chapitre des actes de violence (Wang, 2000).

Les expériences des jeunes femmes dans les gangs et les conséquences potentielles à long terme soulignent le fait que l'appartenance à un gang représente non seulement une occasion d'échapper à divers préjudices sociaux ou de tenter de les réduire, mais aussi un mécanisme pouvant causer des préjudices supplémentaires (Peterson, 2012). L'appartenance à un gang augmente les risques pour les femmes de vivre de la violence familiale, d'avoir des enfants à un jeune âge et de devoir s'en occuper, d'épouser un membre du gang et d'avoir des emplois instables (Thornberry, Krohn, Lizotte, Smith et Tobin, 2003). De plus, si les jeunes femmes continuent de faire partie d'un gang à l'âge adulte, elles sont plus à risque d'être incarcérées et de récidiver que les femmes qui ne sont pas dans un gang (Scott et Ruddell, 2011).

Même si la recherche sur l'abandon des gangs a progressé pendant la dernière décennie, on s'est peu concentré sur la question à savoir si le genre peut avoir une incidence sur le processus d'abandon, et dans quelle mesure (O'Neal et coll., 2016). Les études portant sur la question à savoir pourquoi et comment les femmes abandonnent les gangs ont généralement ciblé trois domaines : la maternité; les démêlés avec le système de justice pénale; et les expériences de victimisation. Chacun de ces domaines peut agir comme un « facteur de changement » (Giordano, Cernkovich et Rudolph, 2002), aidant au processus d'abandon du gang.

En général, les travaux empiriques examinant l'incidence de la maternité sont variables, laissant de côté les questions concernant son incidence sur l'abandon (O'Neal et coll., 2016). Cependant, plusieurs études canadiennes ont conclu que la grossesse influait sur la décision des jeunes femmes de quitter un gang et de ne plus jamais en faire partie, puisqu'elles ne voulaient pas que leur enfant soit touché ou influencé par le « mode de vie négatif » du gang et qu'elles souhaitaient améliorer leur vie pour pouvoir le protéger (Aulakh, 2008; Kelly, 2015; Nimmo, 2001).

Le fait d'avoir des démêlés avec le système de justice pénale, par l'entremise de l'incarcération et d'autres sanctions, peut également servir de tournant pour les jeunes femmes (Nimmo, 2001). La séparation physique en établissement peut être bénéfique pour les femmes membres de gangs parce qu'elles peuvent avoir l'occasion de penser à l'avenir et que le gang n'est plus la principale structure de soutien (au moins temporairement). En général, la recherche sur l'effet de l'incarcération sur l'abandon d'un gang a donné lieu à des résultats variables (Decker, Pyrooz et Moule, 2014; Pyrooz et Decker, 2011). Il se peut que l'incarcération mène à l'abandon du gang, mais les recherches sur le sujet sont limitées et l'étude des femmes membres de gangs incarcérées est encore moins fréquente.

Enfin, en raison de la victimisation des femmes dans les gangs par rapport aux hommes, elles peuvent vivre plus de « moments de crise » ou avoir plus d'occasions de profiter de « facteurs de changement » (Grekul et LaRocque, 2011). Les jeunes femmes peuvent se reconnaître comme des victimes d'une violence croissante et commencer à cerner les conséquences négatives associées aux préjudices découlant de la violence. Ces préoccupations peuvent constituer l'une des raisons pour lesquelles elles décident de mettre un terme à leur fréquentation du gang et de changer de mode de vie. L'événement clé est souvent le fait d'être une victime directe d'actes violents ou d'être témoin d'attaques violentes sur d'autres membres du gang (Aulakh, 2008; Kelly, 2015; Nimmo, 2001).

Directives en matière de prévention et d'intervention

Bien que de nombreux facteurs de risque et motifs incitant les jeunes femmes à se joindre à un gang soient les mêmes que ceux des jeunes hommes, il y a également des différences clés. C'est pour cette raison que les initiatives de prévention et d'intervention devraient comprendre des approches et des programmes non discriminatoires (qui permettent d'améliorer les résultats pour les femmes et pour les hommes) et d'autres propres à chaque genre. Des études récentes ont souligné certains éléments clés liés à des initiatives efficaces s'adressant aux jeunes femmes (Khan et coll., 2013; Peterson, 2012; Peterson et Morgan, 2014; Wolf et Gutierrez, 2012) :

  • Elles devraient être offertes dans un environnement sûr et stimulant (comprenant un espace non mixte) permettant le changement sur le plan thérapeutique.
  • Elles devraient inclure du contenu qui reflète à la fois les facteurs de risque et les réalités quotidiennes des jeunes femmes : une approche multidisciplinaire, complète, holistique et axée sur des solutions visant à aborder les multiples risques, forces et expériences des jeunes femmes (y compris la santé physique et sexuelle, les difficultés pratiques, les compétences de vie, le soutien parental, les expériences de victimisation, les aspirations, la santé mentale/les traumatismes, les opportunités d'études, la préparation à l'emploi, la dépendance).
  • Elles devraient favoriser l'estime de soi, un comportement sain d'affirmation de soi et l'autonomie pour renforcer la résilience à l'égard d'une victimisation future et offrir des occasions d'autonomie, de croissance et d'exploration de l'identité.
  • Elles devraient favoriser des relations respectueuses et positives en tant que mécanisme important pour encourager le changement; faciliter la fréquentation d'autres groupes de pairs; et avoir recours à des mentors, particulièrement des femmes ayant vécu des expériences semblables qui peuvent conseiller les jeunes femmes et à qui celles-ci peuvent s'identifier.
  • Elles devraient comprendre la collaboration avec les familles (surtout la relation mère-fille) et la participation d'autres adultes qui soutiennent la résilience à long terme des jeunes femmes en vue d'améliorer l'interaction et la communication, d'établir une structure et une responsabilisation et de favoriser des occasions.
  • Elles devraient continuer à lutter contre la culture des gangs qui propagent des idées selon lesquelles les gangs sont un refuge et personne ne peut quitter un gang sans en subir de graves conséquences, que ces conséquences visent la personne, sa famille ou ses amis.

Que faisons-nous pour prévenir l'adhésion aux gangs de jeunes?

Depuis 2007, la Stratégie nationale pour la prévention du crime (SNPC) de Sécurité publique Canada permet de déployer des efforts en vue d'élargir la base de connaissances canadiennes sur les programmes efficaces de prévention du crime qui visent à aborder les facteurs criminogènes connus chez des groupes précis de personnes, y compris des jeunes à risque de faire partie d'un gang ou qui sont déjà membres d'un gang. Le financement a été et continue d'être fourni à des organisations communautaires menant des projets de prévention et d'intervention auprès des gangs de jeunes dans les collectivités de partout au Canada par l'entremise du Fonds de lutte contre les activités des gangs de jeunes (FLAG). Ces projets visent à réduire le nombre de jeunes à risque de faire partie d'un gang ou qui sont déjà membres d'un gang dans les collectivités où il y a un problème connu ou nouveau de gangs.

Sécurité publique Canada continue de soutenir les stratégies efficaces de prévention et d'intervention auprès des gangs de jeunes qui sont reconnues pour fonctionner, selon des données empiriques et des leçons apprises découlant d'activités passées de mise en œuvre et d'évaluation. Certaines des conclusions clés et des recommandations pour aller de l'avant identifiées jusqu'à maintenant comprennent les suivantes (CNPC, 2012; Smith-Moncrieffe, 2013) :

Les connaissances obtenues par l'entremise du processus d'examen de la littérature  et les conclusions et recommandations clés soulignées ci-dessus ont été et continueront d'être intégrées à l'élaboration et à la mise en œuvre d'initiatives futures visant les gangs de jeunes. Le fait de renforcer la base de connaissances canadiennes sur les stratégies efficaces de prévention et d'intervention auprès des gangs de jeunes et de travailler pour assurer la communication des bonnes pratiques et des leçons apprises constitue une composante essentielle d'une approche qui permettra aux intervenants communautaires et aux partenaires provinciaux et territoriaux de choisir les programmes les plus appropriés pour leurs réalités locales et d'utiliser de façon optimale les ressources en matière de prévention du crime.

Conclusion

Les gangs de jeunes continuent de constituer un problème répandu dans la société canadienne actuelle. Les membres de gangs sont responsables d'un grand nombre de comportements criminels et les gangs sont caractérisés comme étant nuisibles pour les individus, les collectivités et la société et comme causant des problèmes pour leurs membres. L'ampleur des conséquences négatives associées à l'adhésion aux gangs de jeunes montre la nécessité de continuer d'examiner la question au moyen d'activités de recherche et d'évaluation qui permettent d'avoir, sur le plan théorique et empirique, une meilleure compréhension des facteurs et des processus qui entourent l'adhésion aux gangs. Le travail effectué jusqu'à maintenant montre l'importance d'élaborer une approche complète de prévention et d'intervention qui tient compte de la nature complexe de l'adhésion aux gangs de jeunes et des dimensions précises du problème pour des populations d'intérêt clé, c'est-à-dire une approche multidimensionnelle qui cible la personne, les pairs, l'école, la famille et la collectivité et suppose la collaboration entre un réseau d'organismes et d'organisations qui ont à cœur d'aborder la question de l'adhésion aux gangs de jeunes au Canada.

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