Mise en œuvre et évaluation à grande échelle de l’Initiative de formation stratégique en surveillance communautaire (IFSSC)

Remarque des auteurs

Les points de vue exprimés dans le présent document sont ceux des auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de Sécurité publique Canada. La correspondance liée à ce rapport doit être adressée à :

Division de la recherche
Sécurité publique Canada
340, avenue Laurier Ouest
Ottawa ON  K1A 0P8

Courriel : PS.CSCCBResearch-RechercheSSCRC.SP@ps-sp.gc.ca

Remerciements

Ce projet a officiellement débuté par la signature d’un protocole d’entente entre le ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile du Canada et le ministère de la Sécurité publique et du Solliciteur général de la Colombie-Britannique le 29 août 2011. La première formation sur l’IFSSC a eu lieu le mois suivant. Au cours de ces neuf années, de très nombreuses personnes ont contribué à la réalisation de ce projet. Dans le court espace dont nous disposons ici, nous aimerions remercier tout particulièrement certaines d’entre elles.

En tout premier lieu, nous tenons à exprimer notre gratitude aux agents de probation, aux formateurs, aux coordinateurs de l'IFSSC, à leurs responsables et au personnel administratif. Leurs efforts pour faire de leur mieux et faire un effort supplémentaire en suivant les protocoles de recherche, que ce soit en soumettant des enregistrements audio ou en remplissant des questionnaires de recherche, sont profondément appréciés. Deuxièmement, Bill Small a fait preuve d’un leadership exceptionnel, d’un engagement envers l’intégrité du RNR et d’une main ferme pour guider la division des services correctionnels communautaires tout au long de la mise en œuvre. M. Small a joué un rôle essentiel dans le succès de cette initiative. Troisièmement, il faut mentionner Carrie McCulley, gestionnaire des programmes pour les délinquants en Colombie-Britannique. Grâce à son sens de l’organisation, Carrie a supervisé le calendrier des formations et a organisé les ressources nécessaires pour les chercheurs, les coordinateurs de l’IFSSC et les formateurs. Nous lui adressons nos sincères remerciements. Enfin, Carmen Zabarauckas, qui était alors directrice de la planification de la recherche et des programmes pour les délinquants au ministère en Colombie-Britannique, a facilité le transfert sécurisé de milliers de dossiers provinciaux et d’enregistrements audio à Sécurité publique Canada. Elle a été un exemple de collaboration entre administrations en matière de recherche.

À Sécurité publique Canada, une petite armée d’étudiants et d’assistants à la recherche a rassemblé les données à mesure qu’elles arrivaient, codé les enregistrements audio et organisé diverses bases de données. Ils ont été d’une valeur inestimable, et nous tenons tout particulièrement à exprimer notre reconnaissance à notre collègue Leticia Gutierrez, qui a joué le rôle de " général " de cette armée. Lorsque nous avons commencé la formation sur l’IFSSC, nous avons eu la chance d’obtenir des échanges gouvernementaux avec la province de l’Ontario afin d’affecter deux de leurs agents de probation pour nous aider dans les formations. Nous avons énormément bénéficié de l’expertise de Colleen Hamilton (2012-2013) et de Liz Bourguignon, qui a restée tout au long des cinq années de séances de formation et de cours de remise à niveau. Nous avons eu la chance d’avoir deux cadres supérieurs qui se sont engagés à fond dans les politiques fondées sur des données probantes. Shawn Tupper était notre sous-ministre adjoint et Mary Campbell notre directrice générale à l’époque. Ils ont apporté un soutien indéfectible à l’IFSSC et ont assuré la disponibilité des ressources financières nécessaires à la réalisation du projet. Enfin, nous devons remercier Amel Loza-Fanous, l’actuelle directrice de la recherche sur les services correctionnels, d’avoir cru en l’IFSSC et au fait que la recherche sur la mise en œuvre en Colombie-Britannique devait atteindre une finalité avec ce rapport.

Déclaration de conflit d’intérêts : James Bonta, Guy Bourgon et Tanya Rugge sont les coauteurs de l’IFSSC. Le gouvernement du Canada possède les droits d’auteur lié à l’IFSSC et aucun des auteurs ne reçoit de redevances liées à ce programme. James Bonta reçoit des redevances liées aux ventes de l’Inventaire du niveau de service – révisé cité dans le présent document.

Financement : Aucune subvention particulière d’organismes de financement des secteurs public, commercial ou à but non lucratif n’a été reçue pour cette recherche.

Approbation éthique : La recherche a été menée en conformité avec les normes d’éthique de la province de Colombie-Britannique (C.-B.) et les Services correctionnels de la C.-B., et l’Énoncé de politique des trois conseils : Éthique de la recherche avec des êtres humains.

Consentement éclairé : Chaque participant à l’étude a fourni son consentement éclairé par écrit.

Résumé

À la suite de l’examen pessimiste de Martinson (1974) sur les programmes de réhabilitation des délinquants, certains chercheurs ont commencé à remettre en question sa conclusion selon laquelle le traitement offert aux délinquants était inefficace. Dans les années 1990, une base solide de données probantes et conceptuelles donnaient à penser que ce traitement pouvait fonctionner. De nos jours, la perspective la plus influente quant à la réhabilitation correctionnelle est probablement le modèle fondé sur les principes du risque, des besoins et de la réceptivité (RBR) formulé pour la première fois par Andrews, Bonta et Hoge (1990). En gros, le traitement est surtout efficace lorsqu’il est offert à des délinquants à risque élevé (principe du risque), qu’il cible les besoins criminogènes (principe des besoins) et offre des interventions qui correspondent aux capacités et motivations et au style d’apprentissage en utilisant en particulier des techniques cognitives-comportementales (principe de la réceptivité). Les données probantes relatives au modèle RBR sont rigoureuses et s’appliquent à un éventail de délinquants (p. ex. délinquants sexuels, femmes et jeunes).

La surveillance communautaire (c.-à-d. probation et libération conditionnelle) est la sanction correctionnelle la plus couramment utilisée en Amérique du Nord. Cependant, les données probantes traitant de son efficacité sont équivoques; une méta-analyse révèle une diminution très limitée de la récidive dans le cadre de la surveillance communautaire (Bonta et coll., 2008). Une étude sur les pratiques de probation au Manitoba a fourni de l’information pouvant expliquer ces constatations. Après avoir procédé à l’enregistrement audio de rencontres de surveillance entre un échantillon d’agents de probation (AP) et leurs clients, Bonta et ses collègues (2008) ont révélé que les AP souscrivaient très peu aux principes de RBR. Ces données probantes suggéraient que si les AP étaient formés pour suivre de près le modèle RBR, les résultats pourraient être meilleurs.

Par la suite, des chercheurs de Sécurité publique Canada (SP) ont élaboré un modèle de formation visant à renforcer l’utilisation du modèle RBR par les AP. La formation a été intitulée Initiative de formation stratégique en surveillance communautaire (IFSSC). Elle a fait l’objet d’une évaluation dans le cadre d’une expérience aléatoire menée avec l’appui de 52 AP volontaires en Colombie-Britannique, en Saskatchewan et à l’Île-du-Prince-Édouard (Bonta et coll., 2011). Les AP ont procédé à l’enregistrement audio d’un échantillon de leurs rencontres de surveillance et leurs clients ont fait l’objet d’un suivi de deux ans. Les résultats ont révélé que le comportement des AP formés était réorienté vers un suivi amélioré des principes RBR et que les taux de récidive durant une période de suivi de deux ans étaient considérablement inférieurs (25 %) à ceux des clients du groupe de probation pour qui le modèle RBR n’a pas été employé (40 %).

Encouragée par les résultats de l’évaluation de 2011, la division des services correctionnels communautaires en C.-B. a décidé de mettre en œuvre l’IFSSC dans l’ensemble du service de probation avec l’aide de SP. Les chercheurs de SP ont donné la formation à des AP de première ligne et des coachs provinciaux, de même qu’aux coordonnateurs de l’IFSSC. SP était aussi responsable de l’évaluation de la mise en œuvre de l’IFSSC à l’échelle provinciale. La formation a commencé en septembre 2011 et a pris fin en février 2015. Environ 350 AP ont été formés. Aux fins de l’évaluation, on a demandé aux AP de procéder à l’enregistrement audio de leurs rencontres de surveillance (afin de mesurer le changement comportemental) et les renseignements sur les clients en matière de récidive ont été recueillis.

Les analyses des enregistrements audio ont révélé des changements clairs au chapitre du comportement de l’AP après la formation. Les AP ont consacré une grande partie de leurs rencontres à aborder les besoins criminogènes, en particulier les attitudes et les processus cognitifs procriminels, et accordé moins de temps aux besoins non criminogènes et aux conditions de probation. L’IFSSC a pour but de produire ces types de changements comportementaux. En plus de se concentrer davantage sur les besoins criminogènes (principe des besoins), les AP ont entrepris davantage d’interventions cognitivo-comportementales (principe de la réceptivité). Dans l’ensemble l’IFSSC a été liée à une utilisation accrue du modèle RBR.

Les clients des agents qui ont participé à l’IFSSC ont été comparés à un échantillon aléatoire de délinquants en probation surveillés avant la participation à l’IFSSC (c.-à-d. que ce groupe de comparaison n’avait pas vraiment été exposé à l’IFSSC). Les clients des AP ayant participé à l’IFSSC révélaient un taux de récidive considérablement inférieur durant la période de deux ans que ceux qui ont fait l’objet d’une surveillance avant la mise en œuvre de l’IFSSC. Une fois la période de deux ans écoulée, 43,0 % des clients exposés à l’IFSSC avaient fait l’objet d’une nouvelle condamnation au criminel (dont 14,9 % ont été condamnés de nouveau pour un crime violent), alors que le taux des clients non exposés à l’IFSSC atteignait 61,4 % (dont 21,2 % avaient été condamnés de nouveau pour un crime violent). La prise en compte des attitudes et des processus cognitifs procriminels au cours des rencontres avec les clients et l’utilisation des interventions cognitives étaient particulièrement importantes pour la réduction de la récidive. Chaque augmentation de 10 % du temps passé à aborder les attitudes et les processus cognitifs procriminels au cours de chaque rencontre a donné lieu à une diminution d’environ 5 % de toute nouvelle condamnation au criminel. De plus, les clients qui ont été exposés aux techniques cognitives étaient environ 28 % moins susceptibles d’être condamnés à la suite d’un nouveau crime que les clients qui n’avaient pas du tout été exposés aux techniques cognitives.

En résumé, il est raisonnable d’estimer que la mise en œuvre de l’IFSSC en C.-B. est une réussite. Sur le plan du comportement, les AP suivaient davantage les principes de RBR après la formation, et une diminution du nombre de récidivistes a été constatée. Ce projet a montré qu’avec les ressources et le dévouement appropriés à l’égard de l’intégrité du traitement, un organisme de services correctionnels dans la collectivité peut tirer profit d’une approche fondée sur les données probantes au chapitre de la surveillance de probation. Nous espérons que les résultats de cette étude encourageront d’autres organismes à examiner la meilleure façon de faire pour mettre en œuvre une stratégie de surveillance fondée sur le modèle RBR.

Introduction

La surveillance communautaire fait partie des sanctions courantes imposées par le système de justice au Canada. En tout temps, on compte plus de 100 000 adultes assujettis à une surveillance communautaire, ce qui représente près de 75 % du total de la population correctionnelle (Malakieh, 2019). Puisque la plupart des délinquants font l’objet d’une surveillance communautaire, cette surveillance est essentielle à l’efficacité du système correctionnel. Les agents de probation et de libération conditionnelle se réunissent régulièrement avec leurs clients afin de gérer le risque qu’ils présentent dans la collectivité et de les aiguiller vers les services de soutien appropriés. Logiquement, l’on s’attendrait à ce que la surveillance communautaire favorise la sécurité du public en abaissant le taux de probabilité que les délinquants récidivent, et certains examens suggèrent, avec une certaine réserve, que la surveillance peut réduire la récidive dans certaines conditions (Smith et coll., 2018). Cependant, en 2008, un examen quantitatif a révélé que la surveillance communautaire avait donné lieu à une diminution moyenne de 2 % seulement au chapitre de la récidive, et qu’aucune diminution de la récidive avec violence n’avait été constatée (Bonta et coll., 2008). Dans le but de mieux comprendre ces constatations inattendues, Bonta et ses collègues ont analysé les enregistrements audio des rencontres de surveillance entre 62 agents de probation (AP) et leurs clients au Manitoba. Ils ont découvert que globalement, les rencontres ne respectaient pas les principes de réhabilitation efficace d’un délinquant qui sont connus pour réduire la récidive.

Le cadre de risque-besoins-réceptivité (RBR), d’abord formulé par Andrews, Bonta et Hoge en 1990, est devenu l’un des modèles de réhabilitation correctionnelle les plus influents (Cullen, 2013; Polaschek, 2012; Wormith et Zidenberg, 2018). Le principe du risque nécessite de faire correspondre le niveau de service (p. ex. traitement, surveillance) au niveau de risque que le délinquant présente. Ceci dit, des services intensifs doivent être orientés vers les délinquants qui présentent un risque élevé, et les moins intensifs aux délinquants à faible risque. Selon le principe des besoins, les interventions devraient cibler les besoins criminogènes (c.-à-d. les facteurs de risque dynamiques liés à la récidive), comme les attitudes procriminelles et la toxicomanie, plutôt que les besoins non criminogènes comme l’estime de soi et les indicateurs de détresse personnelle. Le principe de la réceptivité vise à augmenter au maximum l’apprentissage en procédant à des interventions qui correspondent aux capacités et motivations et au style d’apprentissage du délinquant, la plupart du temps en utilisant des techniques cognitivo-comportementales.

Bien que des études sur la surveillance communautaire n’aient démontré que peu d’incidence sur la récidive, voire aucune, des données probantes montrent clairement que les programmes de traitement en milieu correctionnel qui suivent les principes RBR peuvent donner lieu à des diminutions importantes de la récidive (Bonta et Andrews, 2017). Par exemple, les programmes correctionnels qui ont tenu compte des principes du risque, des besoins et de la réceptivité ont montré une diminution moyenne de 26 % de la récidive, par comparaison aux programmes correctionnels durant lesquels ces principes ne sont pas pris en compte. Les données probantes révèlent également que les programmes correctionnels centrés sur le modèle RBR sont encore plus efficaces pour réduire la récidive lorsqu’ils sont exécutés dans la collectivité, alors que les programmes correctionnels en milieu communautaire révèlent une diminution moyenne de 35 % du taux de récidive lorsqu’ils tiennent compte des principes du risque, des besoins et de la réceptivité (Bonta et Andrews, 2017). Par conséquent, il semble que le cadre de RBR constitue un moyen prometteur sur le plan de la surveillance communautaire pour réduire encore davantage la récidive.

Initiative de formation stratégique en surveillance communautaire (IFSSC)

Afin de tirer profit du succès des programmes de traitement en milieu correctionnel fondés sur les principes RBR, un groupe de recherche de Sécurité publique Canada a élaboré l’Initiative de formation stratégique en surveillance communautaire (IFSSC). Cette initiative a été mise sur pied pour former les AP aux principes RBR. Conformément au principe du risque, l’IFSSC est destinée aux AP qui surveillent des clients à risque moyen et à risque élevé. La formation en tant que telle comprend un programme de formation de trois jours qui aborde les principes du risque, des besoins et de la réceptivité en mettant l’accent sur le traitement des attitudes et processus cognitifs procriminels (voir l’annexe A pour connaître les différents modules de la formation). Les attitudes et les processus cognitifs représentent un facteur de risque important sur le plan du comportement criminel à venir et il est estimé qu’ils sous-tendent tous les autres besoins criminogènes comme la toxicomanie et les relations familiales et matrimoniales (Bonta et Andrews, 2017). Dans le cadre de l’IFSSC, les agents apprennent à aborder les attitudes et processus cognitifs procriminels au moyen de techniques d’intervention cognitive et comportementale. Cela comprend, par exemple, l’enseignement concret des compétences prosociales au moyen de techniques de modélisation, de l’utilisation d’un renforcement efficace et de la restructuration cognitive. Au cours de la formation, les agents s’exercent à mettre ces compétences en pratique et reçoivent de la rétroaction des formateurs. Après la formation initiale, les nouvelles compétences acquises sont tenues à jour au moyen d’un soutien clinique continu (Bourgon et coll., 2010). Les activités de soutien clinique comprennent une rétroaction personnelle, des cours de mise à niveau et des rencontres mensuelles au cours desquelles on discute de compétences en particulier (p. ex. utilisation efficace du renforcement).

Pour évaluer l’efficacité de l’IFSSC, une étude pilote a été menée avec des AP qui surveillaient des délinquants adultes en Colombie-Britannique, en Saskatchewan et à l’Île-du-Prince-Édouard (Bonta et coll., 2011). Au départ, 80 AP se sont portés volontaires, mais le nombre définitif a diminué en raison de l’attrition (p. ex. changement d’emploi ou promotion). Les AP ont été assignés aléatoirement à la l’IFSSC (n = 33, après attrition) ou à la probation telle quelle (n = 19, après attrition). Après l’intervention (c.-à-d. l’IFSSC), on a demandé à tous les AP participants de procéder à l’enregistrement audio des rencontres avec leurs clients à risque moyen et à risque élevé durant les six premiers mois de surveillance (une fois au début, et ensuite trois et six mois plus tard). Il est important de souligner que les AP pouvaient choisir leurs clients pour cette étude, ce qui pouvait causer un biais de sélection (p. ex. contrairement à l’orientation fournie, environ 5 % des clients présentaient un faible risque). Les assistants à la recherche ont codé les enregistrements en fonction du sujet de discussion (c.-à-d. besoins criminogènes, besoins non criminogènes et conditions de probation) et des techniques d’intervention (p. ex. interventions cognitives et comportementales).

Les agents formés dans le cadre de l’IFSSC ont consacré beaucoup plus de temps à discuter des besoins criminogènes avec leurs clients, surtout les attitudes procriminelles, et moins de temps à discuter des besoins non criminogènes et des conditions de probation. De plus, les agents formés dans le cadre de l’IFSSC ont affiché des compétences de niveau supérieur en matière d’intervention que les agents de probation qui n’ont pas suivi la formation, y compris l’utilisation des techniques de structuration de la rencontre, d’établissement d’un lien et d’intervention cognitive. Cependant, l’utilisation des techniques d’intervention comportementale étaient les mêmes pour les deux groupes. Les clients des agents formés dans le cadre de l’IFSSC ont connu des taux de récidive considérablement inférieurs durant la période de deux ans que ceux des agents qui n’ont pas suivi la formation (25 % par rapport à 40 %). De plus, peu importe la condition expérimentale, après deux ans, les taux de récidive des clients exposés surtout aux techniques d’intervention cognitive durant leurs rencontres de surveillance étaient considérablement inférieurs à ceux qui n’y ont pas été exposés (19 % par rapport à 37 %).

Récemment, Bonta et ses collègues (2019) ont tenté de répliquer ces constatations initiales en Alberta. Des AP ont été assignés aléatoirement à l’IFSSC (n = 12, après attrition) ou à la probation telle quelle (n = 15, après attrition). Dans cette étude, des clients à risque moyen et à risque élevé ont été affectés aléatoirement aux AP afin de réduire tout biais de sélection éventuel (source de biais dans l’étude de 2011). On a demandé aux AP de procéder à l’enregistrement audio d’une rencontre avec chaque client avant la formation, et ensuite de trois rencontres (c.-à-d. la première, ensuite trois et six mois plus tard) après avoir suivi la formation. Comparativement aux AP du groupe de probation telle quelle, les AP formés dans le cadre de l’IFSSC se concentraient davantage sur les attitudes procriminelles durant leurs rencontres et consacraient moins de temps à discuter des conditions de probation. À l’inverse, les AP du groupe de probation telle quelle ont consacré davantage de temps à discuter d’autres besoins criminogènes, notamment les problèmes familiaux et matrimoniaux et la toxicomanie, que l’ont fait les AP formés dans le cadre de l’IFSSC. De plus, les AP formés ont révélé des niveaux supérieurs de compétences en matière d’établissement d’un lien et d’intervention cognitive, comparativement aux AP non formés, mais on n’a pas constaté de différences importantes sur le plan des compétences en matière de structure de la rencontre et d’intervention comportementale.

Dans l’ensemble, aucun écart n’a été constaté quant à la récidive sur une période de deux ans entre les clients surveillés par les AP formés dans le cadre de l’IFSSC et ceux surveillés par des AP qui n’ont pas suivi la formation (52 % pour l’IFSSC et 49 % pour la probation telle quelle). La faible augmentation du temps consacré aux discussions sur les attitudes procriminelles observée durant les rencontres avec les AP formés dans le cadre de l’IFSSC explique peut-être cette situation, alors que d’autres besoins criminogènes (p. ex. problèmes familiaux et matrimoniaux) ont été abordés plus en profondeur durant les rencontres avec les AP qui n’ont pas suivi la formation. Cependant, peu importe la condition expérimentale, l’utilisation des techniques d’intervention cognitive était liée à une diminution de la récidive. De plus, après la vérification de l’âge et du risque, le taux de récidive sur une période de deux ans des clients exposés aux interventions cognitives durant leurs rencontres de surveillance (43 %) était considérablement inférieur à ceux qui n’y ont pas été exposés (54 %). Cette constatation correspond à celle d’autres recherches sur la surveillance communautaire dans le cadre de laquelle des techniques d’intervention cognitive ont été utilisées (Bourgon et Gutierrez, 2012; Labrecque et coll., 2013; Robinson et coll., 2012; Taxman 2008). Globalement, une méta-analyse donne à penser que les interventions cognitivo-comportementales sont efficaces avec les délinquants (Landenberger et Lipsey, 2005; Wilson et coll., 2005).

L’Étude

La division des services correctionnels communautaires en C.-B., l’un des emplacements faisant partie de l’évaluation du projet de démonstration de l’IFSSC de 2011, a tenu compte des constatations et décidé de mettre en œuvre l’IFSSC dans l’ensemble de son administration. Par conséquent, alors que les évaluations antérieures de l’IFSSC étaient fondées sur des projets de démonstration, la présente étude examine la mise en œuvre et l’évaluation à grande échelle de l’Initiative au sein d’une administration au grand complet. La mise en œuvre de l’IFSSC dans l’ensemble du système en C.-B. a commencé en septembre 2011. Les services correctionnels communautaires de la C.-B. ont deux niveaux d’agents de probation : AP-14 et AP-24. En général, les AP-14 fournissent des services de surveillance aux clients qui présentent un faible risque et souvent, ils aident les AP-24 à accomplir différentes tâches (p. ex. établir le service de travail communautaire et examiner des mesures de rechange). L’AP-24 surveille les délinquants à risque moyen et à risque élevé qui sont en probation et s’occupe de la tenue des interventions de traitement. Dans la présente étude, tous les AP participants étaient au niveau AP-24 et surveillaient des délinquants à risque moyen ou élevé en probation. Par souci de simplicité, nous utilisons l’abréviation « AP » pour nommer l’AP-24 dans le reste du présent rapport.

La formation initiale de trois jours a été donnée environ toutes les six semaines à des groupes de 18 à 24 AP. Outre les AP qui suivaient la formation, leur gestionnaire respectif y a participé pour assurer son soutien, mais n’a reçu ni attention particulière ni rétroaction de la part des formateurs. L’organisme de services correctionnels communautaires provincial a également mis sur pied une structure de soutien de la mise en œuvre en affectant cinq AP à un nouveau rôle à temps plein à titre de coordonnateurs de l’IFSSC, et 47 coachs à temps partiel. Les formateurs ont donné une formation intense aux coordonnateurs (p. ex. séances de formation des formateurs) et ont facilité la tenue des formations, fourni de la rétroaction individuelle sur les enregistrements audio et assuré la supervision clinique des coachs. Les coachs des AP ont été relevés de certaines de leurs fonctions pour gérer les réunions mensuelles et fournir la rétroaction individuelle aux employés de leur bureau respectif. La province a embauché d’autres AP afin que les coachs puissent exercer leurs nouvelles fonctions.

La présente étude a permis d’examiner la mesure dans laquelle la formation offerte dans le cadre de l’IFSSC a eu des incidences sur le comportement des agents, y compris les discussions sur les besoins criminogènes (p. ex. attitudes et processus cognitifs procriminels) et la mise en application des techniques d’intervention (p. ex. techniques cognitivo-comportementales). Étant donné que tous les AP devaient suivre la formation de l’IFSSC, nous avons évalué le comportement des AP avant et après la formation (c.-à-d. conception d’évaluation d’un seul groupe avant et après la formation; Campbell et Stanley, 1966). Nous avons également examiné l’incidence de la formation de l’IFSSC et du comportement des AP sur la récidive des clients (p. ex. conception quasi expérimentale; Campbell et Stanley, 1966).

En nous fondant sur les travaux antérieurs, nous avons présumé que le comportement de l’AP serait encore plus cohérent avec le modèle RBR après sa formation de l’IFSSC. En particulier, l’on s’attendait à ce que les AP formés dans le cadre de l’IFSSC consacrent davantage de temps à discuter des besoins criminogènes avec leurs clients et à faire la démonstration de l’acquisition de compétences améliorées en matière d’intervention. Nous avions également présumé que l’exposition à l’IFSSC accompagnée d’une meilleure souscription aux principes RBR allait réduire le taux de récidive des clients. Selon les évaluations antérieures de l’IFSSC en particulier, nous avons présumé que l’exposition aux techniques d’intervention cognitive allait être associée à une diminution du taux de récidive des clients.

La méthode

On a demandé aux AP de procéder à l’enregistrement audio des rencontres de surveillance avant de participer à la formation (enregistrements audio avant la formation) et après y avoir participé (enregistrements audio après la formation; des détails supplémentaires figurent à la section Procédures d’évaluation du comportement de l’AP). Les enregistrements constituaient la base de l’évaluation du changement comportemental parmi les AP. En février 2015, tous les AP de la division des services correctionnels communautaires de la C.-B. avaient suivi la formation initiale de trois jours de l’IFSSC. Sur le plan du soutien clinique continu, les AP devaient assister aux réunions mensuelles et suivre un cours de mise à niveau chaque année. De plus, on les encourageait fortement à demander une rétroaction individualisée à leur coach de l’IFSSC quant aux enregistrements audio des rencontres avec les clients. Ensuite, les procédures d’évaluation (1) du comportement de l’AP et (2) du taux de récidive des clients étaient décrites et l’on procédait aux analyses prévues.

Procédures d’évaluation du comportement de l’AP

Échantillon d’AP

Le bassin potentiel d’AP en C.-B. comptait 358 personnes. Au total, 357 (99,7 %) AP ont participé à l’étude, dans une certaine mesure. Les données démographiques n’étaient accessibles que pour un sous‑ensemble d’AP qui ont répondu à un questionnaire d’autodéclaration durant la formation. Les données démographiques et d’autres caractéristiques des AP figurent au tableau 1. Les AP étaient en moyenne âgés de 41 ans (écart-type [ET] = 9,27, tranche d’âge = de 23 à 63 ans, n = 283), des femmes (64 %), de race blanche (79 %). Presque tous les AP étaient titulaires d’un diplôme d’études collégiales ou universitaires et avaient 10 années d’expérience professionnelle, en moyenne (ET = 7,08, fourchette d’années = de 1 à 35, n = 287). Quarante-sept (47) AP étaient des coachs de l’IFSSC.

Tableau 1 : Données démographiques et caractéristiques des AP
  % n /N
Sexe
Homme 36,1 104 /288
Femme 63,9 184 /288
Origine ethnoculturelle
Blanc 79,1 227 /287
Noir 0,3 1 /287
Asiatique 4,2 12 /287
Autochtone 2,8 8 /287
Métis 1,4 4 /287
Indien d’Asie 8,7 25 /287
Hispanique 0,3 1 /287
Autrea 3,1 9 /287
Études
Études secondaires 0,4 1 /285
Diplôme collégial/de premier cycle 91,6 261 /285
Maîtrise 8,1 23 /285
Statut de coach de l’IFSSC
Non 86,8 310 /357
Oui 13,2 47 /357
Emplacement du bureau
Intérieur/Fraser 20,1 67 /333
Vancouver 21,9 73 /333
Île/côte 20,1 67 /333
Nord/intérieur 15,3 51 /333
Fraser/Métro 21,6 72 /333
Administration centraleb 0,9 3 /333

Remarques : Les « n » varient puisque l’information n’était pas aisément accessible ou l’AP a décidé de ne pas l’indiquer.

a « Autre » incluait une personne chacun dans les catégories autospécifiées suivantes : caucasien / Autochtone, caucasien / Asiatique, Indien d’Asie / Caucasien, Moyen-Orient, Sikh, Sud-asiatique, Sud-Est asiatique, « mixte » et non spécifié.

b Les trois AP qui se sont identifiés comme membres du personnel de l’administration centrale étaient probablement sur le terrain et ont ensuite été réaffectés à l’administration centrale.

Enregistrements audio

Enregistrements audio avant la formation

Avant d’assister à la formation de l’IFSSC, on a demandé à chaque AP de procéder à l’enregistrement audio de deux délinquants en probation au début de leur surveillance (d’un à trois mois après le début) et de deux délinquants en probation plus tard au cours de la surveillance (de trois à six mois après le début), pour un total de quatre enregistrements. Jusqu’à la fin de mai 2013, la sélection de ces clients relevait de l’AP, c’est-à-dire que les clients n’étaient pas assignés aléatoirement. En juin 2013, la stratégie d’échantillonnage a été révisée et par la suite, les clients ont été affectés aléatoirement aux AP par l’agent de service. Étant donné que la sentence des clients avait été prononcée et qu’ils s’étaient vu assigner un bureau de probation (un processus aléatoire de la cour), un agent de service identifiait toute nouvelle admission qui correspondait aux critères d’admissibilité. Par la suite, l’agent de service assignait le client à un AP qui n’avait pas suivi la formation de l’IFSSC. L’agent de service indiquait aussi une solution de rechange ou un client de remplacement dans le cadre de l’IFSSC pour chaque agent. On faisait appel au client de rechange seulement lorsque le client initial n’était pas en mesure (p. ex. s’esquivait avant le premier enregistrement) ou refusait de participer. Malheureusement, le taux de refus et les caractéristiques des clients qui ont refusé n’ont pas été recueillis. Le processus de sélection a continué jusqu’à ce que l’AP ait enregistré une première rencontre avec ses quatre clients (deux au début de leur période de surveillance et deux plus tard au cours de leur période de surveillance).

Enregistrements audio après la formation

Étant donné que la sentence des clients avait été prononcée et qu’ils s’étaient vu assigner un bureau de probation (un processus aléatoire de la cour), un agent de service identifiait toute nouvelle admission qui correspondait aux critères d’admissibilité. Par la suite, l’agent de service assignait le client à un AP qui avait suivi la formation de l’IFSSC. Chaque AP se voyait assigner un client par mois dans le cadre de l’IFSSC. L’agent de service indiquait aussi une solution de rechange ou un client de remplacement par mois dans le cadre de l’IFSSC pour chaque AP. On faisait appel au client de rechange seulement lorsque le client initial n’était pas en mesure (p. ex. s’esquivait avant le premier enregistrement dans le cadre de l’évaluation initiale) ou refusait de participer. Malheureusement, le taux de refus et les caractéristiques des clients qui ont refusé n’ont pas été recueillis. Le processus de sélection a continué chaque mois jusqu’à ce que l’AP ait enregistré au moins une première rencontre avec six clients (deux présentant un risque moyen et quatre présentant un risque élevé).

L’AP a procédé au premier enregistrement audio après la formation avec le client (c.-à-d. l’enregistrement 1) dans un délai de 90 jours suivant la date de l’ordonnance de surveillance dont fait l’objet le client. Le deuxième enregistrement a été effectué trois mois après le premier, et le troisième trois mois après le deuxième. Le gestionnaire du bureau était responsable d’informer les AP du moment auquel ils devaient procéder à l’enregistrement d’une rencontre avec un client, ainsi que de prendre en note les motifs pour lesquels un enregistrement n’avait pas lieu (p. ex. client transféré à un autre bureau).

Sélection des enregistrements audio aux fins d’analyse

Une fois la formation achevée, plus de 2 800 enregistrements audio ont été présentés par les AP (913 bandes audio enregistrées avant la formation et 1 756 bandes enregistrées après la formation). Les ressources disponibles n’étaient pas suffisantes pour procéder au codage de tous les enregistrements. Par conséquent, pour s’assurer que l’échantillon de comportements d’AP soit représentatif, au moins un enregistrement de chaque client a été sélectionné aléatoirement. Au total, 1 236 enregistrements de 1 112 clients ont été codés et analysés (283 enregistrements initiaux et 953 enregistrements après la formation). Ce processus de sélection a donné lieu à une moyenne de deux enregistrements audio par AP (moyenne = 2,60, tranche = de 1 à 9).

Méthode de codage

Les enregistrements audio sélectionnés aléatoirement ont été codés en fonction du contenu des discussions et des compétences affichées par les AP. La méthode de codage était identique à celle utilisée par Bonta et ses collègues (2011 et 2019). Des équipes de deux codeurs ont écouté chaque segment de cinq minutes de l’enregistrement et ont codé ces segments en fonction de la présence ou de l’absence de discussions ou de compétences à contenu particulier (description ci-dessous). Pour qu’une discussion ou compétence à contenu particulier soit cotée présente, il devait y avoir au moins deux énoncés de soutien distincts (pas seulement « oui » ou « non » aux questions posées) dans le segment de cinq minutes. Les codeurs ont aussi écouté l’enregistrement intégral afin d’évaluer la qualité globale de la rencontre. Chaque codeur a coté les enregistrements de façon indépendante pour ensuite établir un consensus afin de fixer le score final qui a été utilisé aux fins d’analyse. Les désaccords relatifs à la cotation ont fait l’objet de discussions avec un chercheur principal pour la prise d’une décision finale.

Cinquante-huit (58) enregistrements audio ont été sélectionnés aléatoirement aux fins de l’analyse de la fiabilité interévaluateurs. Le coefficient de corrélation intraclasse (CCI), un modèle d’effet aléatoire unidirectionnel, a été calculé pour les éléments continus (c.-à-d. ordinaux) et la statistique Kappa de Cohen a servi au calcul des éléments catégoriques (p. ex. oui/non). Cicchetti (1994; p. 286) a déclaré que lorsque le CCI se situe entre 0,60 et 0,74, « le niveau d’importance clinique est bon ». Par conséquent, une valeur de CCI de 0,60 a été établie comme critère minimal d’inclusion des éléments ordinaux dans les analyses approfondies. La statistique Kappa a été établie à une valeur d’au moins 0,81 (» presque parfait »; Landis et Koch, 1977, p. 165) comme critère minimal pour les éléments catégoriques.

Le CCI moyen qui concerne le contenu des discussions atteignait 0,77 et tous les aspects atteignaient le critère minimal du CCI, sauf le modèle de personnalité antisociale (CCI = 0,43). Par conséquent, nous avons exclu cet aspect de contenu des analyses. Le CCI moyen qui concerne les éléments liés aux compétences d’intervention était de 0,59 et nous avons exclu les éléments qui ne correspondaient pas critère minimal du CCI, y compris trois éléments des compétences de collaboration (sur un total de cinq éléments), trois éléments des compétences de structuration (huit éléments au total) et deux éléments des compétences comportementales (sept éléments au total). Quatorze (14) éléments des compétences d’intervention affichaient un CCI supérieur à 0,60. Toutes les statistiques Kappa atteignaient ou excédaient 0,84.

Discussion sur les aspects du contenu

Premièrement, les enregistrements audio ont été codés afin de cerner la présence ou l’absence de discussions sur les conditions de probation, les besoins non criminogènes, ainsi que les attitudes et processus cognitifs. L’IFSSC met l’accent sur l’importance d’aborder les attitudes et processus cognitifs procriminels avec tous les clients, car il est jugé que ce besoin criminogène sous-tend tous les autres besoins criminogènes. Par ailleurs, on enseigne aux AP à consacrer moins de temps à discuter des conditions de probation et des besoins non criminogènes (p. ex. le logement et la santé mentale), à moins que le client nécessite qu’une attention immédiate soit prêtée à ces aspects. Ensuite, si un besoin criminogène était identifié comme problématique pour un client, les enregistrements audio de ce client étaient aussi codés sur le plan de la présence ou l’absence de discussions sur ce besoin criminogène. Les besoins criminogènes qui ont été évalués sont les suivants : le modèle de personnalité antisociale, les attitudes procriminelles et les fréquentations procriminelles, de même que la situation familiale et matrimoniale, l’emploi et les études et la toxicomanie. Puisque l’instrument provincial d’évaluation du risque et des besoins ne mesurait pas la participation des clients à des loisirs et des activités récréatives prosociales, le besoin criminogène lié aux loisirs et activités récréatives n’a pas été codé. De plus, comme nous l’avons souligné précédemment, le modèle de personnalité antisociale ne correspondait pas à notre critère minimal de CCI et n’a pas été inclus dans les analyses approfondies.

Compétences en matière d’interventions correctionnelles

Tous les éléments liés aux compétences d’intervention ont été cotés comme absent ou présent. Si la compétence était constatée, sa qualité était évaluée sur une échelle de 7 points selon laquelle (1) était de faible qualité et (7) était de qualité supérieure. Par conséquent, le score pour chaque élément lié aux compétences d’intervention était de 0 (absent) à 7 (qualité supérieure). La première compétence d’intervention établie était la compétence de collaboration. Dans l’évaluation initiale de l’IFSSC (Bonta et coll., 2011), cette compétence était nommée « compétence d’établissement d’un lien », mais trois des cinq éléments de la « compétence d’établissement d’un lien » n’atteignaient pas notre critère minimal de CCI dans la présente étude (Bonta et coll., 2011 n’ont pas utilisé le critère minimal de CCI pour l’inclusion de ces éléments). Les deux éléments restants étaient « la clarification du rôle » et « l’entente sur les objectifs » qui correspondent davantage à la compétence de collaboration qu’à la compétence d’établissement d’un lien. La clarification du rôle nécessite d’expliquer le rôle de l’AP comme un aidant et un agent de la cour, et de discuter des attentes du client durant la période de probation. L’entente sur les objectifs nécessite de tenir une discussion axée sur la collaboration à propos de ce que l’AP et le client aimeraient accomplir durant la période de surveillance. Les scores des deux éléments ont été additionnés pour créer un score de compétence de collaboration et, par conséquent, les scores pouvaient aller de 0 à 14.

La deuxième compétence d’intervention traite de la structure de la rencontre. Un score visant la structuration de la rencontre a été créé à partir des cinq éléments suivants 1) l’accueil en début de rencontre, 2) l’examen de la rencontre précédente, 3) l’examen des travaux demandés à la rencontre précédente, 4) le résumé de la rencontre actuelle et 5) la remise du travail à faire avant la prochaine rencontre. Les cinq éléments correspondent aux étapes qui doivent être suivies durant presque toutes les rencontres de surveillance, selon l’IFSSC, à l’exception d’une rencontre durant laquelle le client se présente en crise aiguë. Les éléments ont été additionnés pour créer un score total et les scores pouvaient aller de 0 à 35.

Ensuite, nous examinerons les compétences d’interventions cognitive et comportementale. L’un des buts principaux de l’IFSSC est de faciliter l’apprentissage et la mise en application par les AP de techniques cognitivo-comportementales. Comme dans le cas de la recherche menée précédemment (Bonta et coll., 2019), des scores distincts ont été créés pour le domaine cognitif et le domaine comportemental. Les interventions cognitives sont celles qui ciblent le raisonnement et utilisent des techniques de restructuration cognitive pour remplacer le raisonnement procriminel par un raisonnement prosocial. Nous avons créé un score total pour la compétence d’intervention cognitive en additionnant les scores liés à quatre éléments. Le premier élément concerne l’efficacité de l’AP à enseigner au client la relation entre ses pensées et son comportement. Les autres éléments mesuraient différentes approches pour cibler et modifier les attitudes procriminelles, y compris l’identification des modèles de raisonnement procriminel et la génération de pensées et de comportements prosociaux pour remplacer les modèles de pensée procriminelle. Les scores ont été additionnés pour créer un score total pour les compétences cognitives; les scores pouvaient aller de 0 à 28.

Les interventions comportementales nécessitent l’utilisation d’un renforcement efficace, ainsi que des travaux ou des exercices comportementaux qui visent le perfectionnement de compétences concrètes. Cinq éléments ont permis d’évaluer les techniques d’intervention comportementale, y compris l’utilisation d’un renforcement efficace (c.-à-d. donner une récompense ou éliminer un coût dans le but de renforcer le comportement prosocial), la désapprobation efficace (c.-à-d. expliquer au client la raison qui fait qu’une personne n’approuve pas un comportement en particulier, de même que les conséquences de ce comportement), des stratégies d’exercice (c.-à-d. exercer un nouveau comportement), des travaux pour renforcer l’enseignement fourni, comme écrire les pensées problématiques lorsqu’elles surviennent, et fournir un résumé au client à la fin de chaque rencontre. Les scores ont été additionnés et les scores totaux allaient de 0 à 35.

Nous avons aussi créé un score composite pour les techniques cognitivo-comportementales en additionnant les scores totaux des compétences cognitives et des compétences comportementales (les scores pouvaient aller de zéro à 63). De plus, nous avons créé un score composite qui comprenait toutes les compétences d’intervention, y compris les compétences comportementales, de collaboration et de structuration, et nous l’avons nommé « total des compétences correctionnelles efficaces » (les scores pouvaient aller de 0 à 98). Étant donné que nous avons combiné plusieurs éléments en scores au chapitre des différentes compétences d’intervention, nous avons évalué l’uniformité interne de ces scores composites au moyen du symbole (ω) de McDonald. Les valeurs oméga ≥ 0,60 sont communément vues comme acceptables aux fins de recherche, mais les valeurs ≥ 0,70 sont préférables et les valeurs ≥ 0,80 sont exemplaires (Ponterotto et Ruckdeschel, 2007). Les valeurs oméga se situaient dans le groupe des valeurs acceptables quant à la compétence de structuration (ω = 0,66; 5 éléments), la compétence cognitive (ω = 0,74; 4 éléments), la compétence comportementale (ω = 0,63; 5 éléments), les compétences cognitivo-comportementales combinées (ω = 0,68; 9 éléments) et le total des compétences correctionnelles efficaces (ω = 0,61; 14 éléments). Étant donné qu’il n’y avait que deux éléments de compétence de collaboration, nous avons calculé la corrélation interélément de ces deux éléments et découvert une faible association (r = 0,10) qui indique une uniformité interne médiocre.

Participation aux activités de soutien clinique

Les agents de probation devaient participer aux activités de soutien clinique continues après avoir suivi la formation initiale dans le cadre de l’IFSSC. La participation à ces activités est une partie importante du modèle d’IFSSC, car elles permettent aux AP de tenir à jour et de renforcer leurs compétences (Bonta et coll., 2011; Bourgon et coll., 2010). Le niveau de participation aux activités de soutien clinique devait être évalué en fonction de la fréquence à laquelle les AP participaient aux activités suivantes : réunions mensuelles, cours de mise à niveau et demandes de rétroaction personnelle sur leurs enregistrements audio. Cependant, on a constaté quelques problèmes sur le plan de la qualité des données et par la suite, ces problèmes ont fait l’objet d’une discussion.

Procédures d’évaluation de la récidive d’un client

Enregistrements audio des clients

Au total, 1 112 clients ont été enregistrés dans le cadre de la présente étude.  Parmi ces clients, 283 ont commencé la surveillance avec un AP avant que celui-ci suive la formation de l’IFSSC (groupe de référence-enregistré [E]) et 829 étaient surveillés par un AP qui avait suivi la formation (groupe de clients IFSSC-E). Les caractéristiques démographiques du groupe de référence-E et les clients IFSSC-E étaient très semblables (voir tableau 2a). Par exemple, plus de 80 % étaient de sexe masculin et les deux tiers étaient de race blanche, et environ la moitié des clients n’avaient pas achevé leurs études secondaires. Des différences importantes sur le plan statistique entre les groupes ont été constatées pour ce qui est de l’âge et du risque (tirées de la sous-section de l’Inventaire du niveau de service – révisé [INS-R] que nous décrivons plus loin dans le présent document; voir tableau 2b). Les clients IFSSC-E, plus précisément, étaient âgés d’environ un an et demi de plus que les clients du groupe de référence-E. Aussi, les clients IFSSC-E ont obtenu des scores supérieurs quant au risque de récidive, comparativement aux clients du groupe de référence‑E.

De plus, compte tenu du court délai durant lequel tous les AP avaient suivi la formation de l’IFSSC, 65,7 % des clients du groupe de référence-E peuvent avoir été exposés à l’IFSSC, dans une certaine mesure, car leur ordonnance de probation s’est prolongée au-delà de la date de formation de leur AP dans le cadre de l’IFSSC et ils n’ont pas été condamnés de nouveau avant que l’AP ait suivi la formation (voir l’annexe B pour plus de renseignements sur le chevauchement entre la période de probation du groupe de référence et l’exposition à un AP formé dans le cadre de l’IFSSC). En outre, alors que les clients IFSSC-E ont été affectés aléatoirement aux AP, 40 % des clients du groupe de référence-E ont été sélectionnés par les AP avant la mise en œuvre de l’assignation aléatoire. Ces limites sont abordées plus en profondeur dans la section qui suit et la section Discussion.

Clients non enregistrés

Dans le but d’aborder les problèmes soulevés quant à l’utilisation du groupe de référence-E en tant que groupe témoin, nous avons sélectionné aléatoirement un échantillon de clients non enregistrés avant la mise en œuvre de l’IFSSC (group de référence-NE; n = 467). Il s’agit donc des clients ayant commencé la surveillance avec un AP avant que celui-ci suive la formation de l’IFSSC et dont les rencontres n’ont pas été enregistrées. Contrairement aux clients du groupe de référence-E, aucun biais de sélection n’a été constaté, car les clients du groupe de référence-NE ont tous été sélectionnés aléatoirement à partir de documents antérieurs. De plus, l’exposition du groupe de référence-NE à l’IFSSC était moins probable (40,3 %) que celle du groupe de référence-E (65,7 %). Selon nous, il est probable que ces différences font en sorte que les clients du groupe de référence-NE sont davantage représentatifs que la population de délinquants en probation avant la mise en œuvre de l’IFSSC que les clients du groupe de référence‑E. Les critères de sélection des clients du groupe de référence-NE étaient les suivants : a) la date d’entrée en vigueur de l’ordonnance de surveillance communautaire du client doit être entre 730 et 60 jours avant que l’AP suive la formation de l’IFSSC, b) l’AP doit avoir agi à titre de surveillant du client au moins une fois durant cette période, c) l’ordonnance de surveillance du client devait durer au moins une année à partir de la date de début de la surveillance, d) le client doit avoir obtenu une cote jugé moyenne ou supérieure à l’évaluation au début de sa surveillance, et e) le client ne pouvait être inclus dans le groupe de clients du groupe de référence-E. Les clients du groupe de référence-NE étaient comparables aux clients IFSSC-E sur le plan des données démographiques personnelles et liées aux antécédents criminels (tableau 2a), sauf pour ce qui est de l’âge et des scores de risque (tableau 2b).

Récidive

La récidive a été définie comme une nouvelle condamnation à partir de la date du premier enregistrement audio pour les groupes enregistrés, et la date de début de la surveillance communautaire pour le groupe de référence-NE jusqu’à la fin de la période de suivi (c.-à-d. la date de fin du casier judiciaire nationale et/ou provincial)Note de bas de page 1. Étant donné que la date de début de la période de suivi était différente entre les groupes, nous avons contrôlé la période sans infraction dans la collectivité avant la sélection pour l’étude (c.-à-d. le début de la période de suivi) au moment de procéder à l’estimation des taux de récidive. Les incidents de récidive ont été séparés pour former des catégories de nouvelle condamnation à la suite d’une infraction administrative (p. ex. manquement aux conditions de probation), non violente (p. ex. vol) ou violente (p. ex. voies de fait). En l’occurrence, si la détermination d’une peine comportait plusieurs catégories, la catégorie la plus grave (c.-à-d. violente > non violente > administrative) était sélectionnée. La récidive générale comprend des condamnations pour des infractions violentes, non violentes et contre l’administration de la justice. La récidive avec violence comprend uniquement les condamnations pour infraction violente.

Notre source d’information principale sur la récidive était les documents nationaux sur les antécédents criminels conservés par la Gendarmerie royale du Canada (GRC). L’avantage des documents de la GRC est qu’ils recueillent les condamnations partout au Canada, au lieu de se limiter à une province en particulier. De plus, les résultats sur la récidive peuvent être comparés à des évaluations antérieures de l’IFSSC achevée au Canada qui ont utilisé le même indicateur de récidive. Cependant, les documents de la GRC n’étaient pas accessibles pour l’ensemble des participants; dans 74 cas, les documents sur les antécédents criminels étaient manquants. Nous avons donc fouillé la base de données provinciale et cela a permis de coder 72 des 74 cas. Par conséquent, dans l’ensemble, les renseignements de suivi manquaient pour seulement deux délinquants en probation.

Tableau 2a : Données démographiques et caractéristiques des clients IFSSC-E et des clients des groupes de référence -E et -NE
  IFSSC-E Groupe référence-E Groupe référence-NE V de Cramer
% n /N % n /N % n /N IFSSC-E c. groupe référence-E IFSSC-E c. groupe référence-NR
Sexe
Masculin 84,4 693 /821 810,3 213 /262 870,7 407 /464    
Féminin 15,6 128 /821 180,7 49 /262 120,3 57 /464    
Sexe – Différence de groupe                   0,04 0,05
Origine ethnoculturelle
Caucasien 62,3 512 /822 650,9 182 /276 590,2 273 /461    
Autochtone 28,6 235 /822 230,9 66 /276 290,5 136 /461    
Autrea 9,1 75 /822 100,1 28 /276 110,3 52 /461    
Origine ethnoculturelle – Différence de groupe                   0,05 0,04
État matrimonial
Célibataire 66,3 536 /809 710,7 195 /272 680,7 311 /453    
Marié ou conjoint de fait 22,9 185 /809 170,3 47 /272 180,5 84 /453    
Séparé/divorcé/veuf 10,9 88 /809 110,0 30 /272 120,8 58 /453    
État matrimonial – Différence de groupe                   0,06 0,05
Études
Pas de diplôme d’études secondaires 53,4 425 /796 490,6 132 /266 580,5 261 /446    
Diplôme d’études secondaires 34,4 274 /796 360,5 97 /266 300,7 137 /446    
Études collégiales/universitaires 12,2 97 /796 130,9 37 /266 100,8 48 /446    
Études – Différence de groupe                   0,03 0,05
Type d’infraction à l’origine de la peine
Violente 47,6 410 /827 450,2 128 /283 500,9 222 /436    
Non violente 38,5 318 /827 410,0 116 /283 400,8 178 /436    
Contre l’administration de la justice 12,0 99 /827 130,8 39 /283 80,3 36 /436    
Type d’infraction – Différence de groupe                   0,04 0,06
Tout antécédent de crime d’ordre sexuel
Oui 6,5 54 /829 50,7 16 /283 50,8 24 /464    
Non 93,5 775 /829 940,3 267 /283 940,2 437 /464    
Tout antécédent de cirme d’ordre sexuel – Différence de groupe                   0,02 0,01

Remarque :IFSSC-E = clients IFSSC enregistrés. Groupe de référence-E = clients du groupe de référence enregistrés. Groupe de référence-NE = clients du groupe de référence non enregistrés. La valeur V de Cramer mesure la force de l’association entre des variables catégoriques 0 ≤ v ≤ 1); v < 0,10 indique que la force de l’association des analyses du chi-carré est négligeable. Aucune des valeurs V de Cramer n’était importante sur le plan statistique .

a Les autres groupes ethnoculturels représentés au sein des clients IFSSC, du groupe de référence-E et du groupe de référence-NE respectivement comprenaient des Indiens de l’Asie (n = 28, 12, et 22), des Asiatiques (n = 15, 7 et 10), des Noirs (n = 13, 4 et 12), des Hispaniques (n = 8, 1 et 5) et autres (n = 11, 4 et 3); ces groupes ont été fusionnés afin de permettre l’établissement de comparaisons statistiques entre les groupes de clients.

Tableau 2b : Données démographiques et caractéristiques des clients IFSSC-E et des clients des groupes de référence -E et -NE (continu)
  IFSSC-E (n = 829) Groupe référence‑E (n = 283) Groupe référence‑NE (n = 467) IFSSC-E c. groupe référence-E d de Cohen [IC de 95 %] IFSSC-E c. groupe référence-NE d de Cohen [IC de 95 %]
M ET M ET M ET
Âge (ans) 36,59 10,55 35,05 11,52 35,34 10,21 0,14 [0,01 0,28] 0,12 [0,01 0,23]
INS-R (sous-section « Antécédents criminels ») 5,56 2,27 4,62 2,62 5,06 2,53 0,40 [0,26 0,53] 0,21 [0,10 0,32]
Période de suivi (années) 3,83 1,04 4,21 0,83 2,97 1,03 0,39 [0,25 0,53] 0,82 [0,71 0,94]

Remarque : M = moyenne. ET = écart type. IC = intervalle de confiance. INS-R = Inventaire du niveau de service – révisé. Les valeurs en caractères gras indiquent l’ampleur de l’effet avec l’IC qui ne comprend pas zéro, faisant état du niveau statistique significatif (p < 0,05).

Plan d’analyse

Notre question de recherche principale était de déterminer si la formation donnée dans le cadre de l’IFSSC était associée à des changements de comportement des AP, y compris les différences sur le plan du contenu des discussions avec les clients et de la qualité des compétences d’intervention. Pour aborder cette question, les bandes audio des AP enregistrées avant et après la formation ont été comparées dans le but de déterminer l’évolution individuelle durant les périodes de discussion sur les besoins criminogènes et non criminogènes, ainsi que la qualité des compétences d’intervention. Par conséquent, seuls les AP qui ont présenté des bandes audio enregistrées avant et après la formation ont été inclus dans ces analyses.

La proportion de segments de cinq minutes durant lesquels un domaine de contenu était abordé a été calculée en divisant le nombre de segments de cinq minutes qui traitent du sujet par le nombre total de segments de cinq minutes durant une rencontre. La proportion de chaque rencontre durant laquelle un sujet a été abordé a ensuite été regroupée au niveau de l’AP de manière séparée pour les enregistrements audio précédant la formation et ceux suivant la formation. Par exemple, si un AP a présenté plus d’un enregistrement après la formation, nous avons établi la moyenne des proportions pour chaque domaine de contenu de l’ensemble des enregistrements après la formation pour tous les clients enregistrés et cela a donné une proportion moyenne unique pour chaque domaine de contenu. Dans le même ordre d’idées, les compétences d’intervention ont été regroupées au chapitre de l’AP de manière séparée pour les enregistrements précédant la formation et ceux suivant la formation.

En ce qui concerne l’ensemble des comparaisons, la valeur d de Cohen a été calculée comme mesure de l’ampleur de l’effet :

Équation pour le d de Cohen

Équation pour le d de Cohen
Description de l'image

Le d de Cohen est égal à M1 moins M2, divisé par la racine carrée de la fraction suivante : le produit de SD1 au carré et de n1 moins 1, plus le produit de SD2 au carré et de n2 moins 1, divisé par la somme de n1 et n2 moins 2.

Alors que M1 représente la moyenne des bandes audio enregistrées après la formation, M2 représente la moyenne des bandes enregistrées avant la formation, n1 et n2 sont les tailles d’échantillon des bandes enregistrées après et avant la formation, et ET1 et ET2 sont les écarts types (ET) des bandes enregistrées après et avant la formation respectivement. Les valeurs d positives indiquent une augmentation de contenu dans la discussion ou une amélioration des compétences d’intervention. Cohen (1992) proposait des valeurs heuristiques pour interpréter d, alors que 0,2 correspondait à un effet moindre et 0,5 à un effet moyen, et 0,8 à un effet ample. L’intervalle de confiance (IC) de 95 % a aussi été calculé pour d. Les IC qui comprennent zéro indiquent qu’il n’y a aucune différence statistiquement importante.

La deuxième question de recherche principale examinait si la surveillance menée par un AP formé était associé à une diminution de récidive des clients. Nous avons abordé cette question de deux façons. Premièrement, nous avons comparé les taux de récidive des clients IFSSC-E (c.-à-d. les clients enregistrés exposés à un AP qui a suivi la formation de l’IFSSC) aux taux de récidives des clients du groupe de référence-NE (les clients non enregistrés sélectionnés aléatoirement dans la charge de cas des AP avant que ceux-ci suivent la formation de l’IFSSC. Comme nous l’avons mentionné déjà, les clients du groupe de référence-NE sont plus susceptibles de représenter la charge de cas des AP avant que ceux-ci suivent la formation de l’IFSSC que les clients du groupe de référence-E, et ils étaient moins susceptibles d’avoir été exposés à un AP formé dans le cadre de l’IFSSC durant la période visée par l’étude. Deuxièmement, en ce qui concerne tous les clients qui ont fait l’objet d’un enregistrement audio (IFSSC-E et référence-E), nous avons examiné la relation entre le comportement actuel de l’AP saisi durant les rencontres enregistrées (c.-à-d. contenu des discussions et compétences d’intervention) et la récidive des clients. Cela nous a permis d’étudier si certains comportements des AP étaient davantage associés à la récidive des clients que d’autres.

Une période fixe de suivi de deux ans ainsi que différentes périodes de suivi ont été déterminées pour évaluer les résultats en matière de récidive. En ce qui concerne le suivi fixe de deux ans, les groupes ont été comparés aux taux de récidive observés, ainsi qu’à une analyse de régression logistique afin d’examiner l’association entre la formation de l’IFSSC et la récidive, tout en contrôlant toute covariable (décrites plus loin dans le présent document). Les rapports de cotes (expB1) font état du changement du risque relatif lié à une variation d’une unité dans les variables prédictives. Un rapport de cotes inférieur à 1 indique que les clients IFSSC-R connaissent des taux de récidive inférieurs, et vice versa. Aucune association n’est indiquée lorsque l’IC de 95 % du rapport de cotes contient 1. La valeur BO (une valeur d’interception) représente le taux de récidive prévu pour le groupe de référence-NE ou de référence-E dans les unités logistiques qui pourraient être converti en probabilité (1/[1+exp(-B0)]). Le taux de récidive prévu à tout niveau précis d’une variable prédictive a aussi été calculé (p. ex. 1/[1+exp(-(B0+B1))]).

L’analyse de survie à l’aide de la régression de Cox a permis d’examiner l’effet de la formation de l’IFSSC sur les taux de récidive à différents moments (Allison, 1984). Les rapports de risques [RR] indiquent la mesure dans laquelle le taux de récidive augmente ou diminue en fonction des variables prédictives, après le contrôle des périodes de suivi qui varient. Un RR inférieur à 1 indique que les clients IFSSC-E (ou les clients ayant été les plus exposés à un contenu et des compétences en particulier) ont connu un taux de récidive inférieur à celui des clients du groupe de référence-NE (ou les clients ayant été le moins exposés à un contenu et des compétences en particulier). Au moment de calculer la période écoulée avant la récidive pour les analyses de survie, la date de détermination de la peine liée à la nouvelle infraction a été utilisée pour déterminer la période écoulée avant la récidive.

Les covariables que l’on sait associées à la récidive ont été appliquées dans les analyses de régression et de survie. En premier lieu, la sous-section « Antécédents criminels » de l’Inventaire du niveau de service-révisé (INS-R; Andrews et Bonta, 1995) a été utilisé pour le contrôle des différences significatives sur le plan du risque entre les groupes. La sous-section « Antécédents criminels » est composée de 10 éléments passés cotés 0 pour absent et 1 pour présent et a été fondée sur l’examen du dossier. Le score lié aux antécédents criminels prévoyait assez bien la récidive dans notre échantillon (SSC = 0,66; IC de 95 % = 0,63, 0,69). Deuxièmement, nous avons contrôlé la période sans infraction dans la collectivité avant la sélection en vue de l’étude. Il s’agit là d’un résultat important, puisqu’à mesure que la période sans infraction dans la collectivité augmente, le risque de récidive diminue (peu importe le niveau de risque initial que présente le client; Flores et coll., 2017; Hanson et coll., 2018). Le troisième contrôle concernait l’âge du client au début de la période de probation (Hanson, 2002; Hirschi et Gottfredson, 1983; Sampson et Laub, 2003).

En plus de nos questions de recherche principales, nous avons demandé si la participation à des activités de soutien clinique améliorait la qualité des discussions entre les AP et leurs clients. Le modèle IFSSC et la psychologie de l’apprentissage humain présument que le comportement s’améliore avec la formation et la pratique continues. Par conséquent, l’on s’attendait à ce que les AP qui participaient à un nombre accru d’activités de soutien clinique présentent des comportements renforcés au chapitre de l’IFSSC et de meilleurs résultats avec leurs clients que ceux dont le taux de participation était moindre. Dans le même ordre d’idées, l’on s’attendrait à obtenir de meilleurs résultats au fur et à mesure de l’intégration de l’IFSSC au sein de l’organisation (p. ex. récidive réduite). Les recherches sur la mise en œuvre suggèrent qu’il pourrait s’écouler quelques années avant que les résultats du projet de démonstration soient réitérés dans le cadre de mises en œuvre à grande échelle (Bierman et coll., 2002; Fixsen et coll., 2001, 2005).

Résultats

Incidences de la formation sur le comportement des AP

Parmi les 357 AP qui ont participé à la présente étude, 201 ont présenté des échantillons de bandes audio enregistrées avant et après la formation (35 AP ont présenté seulement des enregistrements de clients du groupe de référence et 121 AP ont présenté seulement des bandes enregistrées après la formation). Dans le cas de ce sous-ensemble, en moyenne, la durée des bandes enregistrées après la formation (M = 24,55; ET = 8,60) étaient considérablement plus longue que les bandes enregistrées avant la formation (M = 18,60; ET = 9,52; d = 0,66; IC de 95 % [0,46, 0,86]). La proportion moyenne de segments de cinq minutes durant lesquels un sujet était abordé avant la formation et après la formation figure au tableau 3. En moyenne, les AP ont discuté des besoins non criminogènes et des conditions de probation beaucoup moins fréquemment après avoir suivi la formation de l’IFSSC. Étant donné que les attitudes et processus cognitifs étaient le point central de la formation de l’IFSSC, nous avons examiné la mesure dans laquelle tous les AP ont abordé les attitudes et processus cognitifs à chaque rencontre, peu importe s’ils avaient déterminé ces domaines comme un besoin criminogène pour le client. Un grand écart a été constaté au chapitre des attitudes avant la formation et après la formation, les AP ayant discuté des attitudes et processus cognitifs avec leurs clients durant une période beaucoup plus longue à chaque rencontre après avoir suivi la formation de l’IFSSC.

Tableau 3 : Évolution interindividuelle des AP quant aux domaines de discussion avant la formation et après la formation (Proportion moyenne de segments de cinq minutes au cours desquels un sujet a été abordé)
Sujet de discussion n Avant la formation M (ET) Après la formation M (ET) Valeur d de Cohen [IC de 95 %]
Conditions de probation 201 0,38 (0,32) 0,30 (0,22) - 0,29 [-0,49, -0,09]
Non criminogènes 201 0,51 (0,29) 0,36 (0,21) - 0,59 [-0,79, -0,39]
Probation et non criminogènes 201 0,60 (0,26) 0,51 (0,21) - 0,38 [-0,58, -0,18]
Un besoin en particulier et tous les besoins criminogènes 201 0,39 (0,25) 0,47 (0,21) 0,35 [0,15, 0,54]
Attitudes et processus cognitifs – toutes les rencontres 201 0,02 (0,10) 0,18 (0,18) 1,10 [0,89, 1,31]

Besoin criminogène cerné pour le clienta

Attitudes et processus cognitifs 51 0,02 (0,10) 0,18 (0,20) 1,01 [0,60, 1,42]
Fréquentations 123 0,18 (0,22) 0,17 (0,18) - 0,05 [-0,30, 0,20]
Situation familiale et matrimoniale 84 0,27 (0,25) 0,21 (0,20) - 0,27 [-0,57, 0,04]
Emploi et études 74 0,28 (0,27) 0,21 (0,19) - 0,30 [-0,62, 0,02]
Toxicomanie 148 0,35 (0,31) 0,22 (0,21) - 0,49 [-0,72, -0,26]

Remarque : M = moyenne. ET = écart type. IC = intervalle de confiance. Les valeurs en caractères gras indiquent l’ampleur de l’effet avec l’IC qui ne comprend pas zéro, faisant état du niveau statistique significatif (p < 0,05).

a Les AP devaient avoir cerné le besoin criminogène chez au moins un client du groupe de référence et un client après la formation pour être inclus dans ces analyses (voir l’annexe pour connaître la fréquence à laquelle les AP ont cerné des besoins criminogènes avant la formation et après la formation respectivement).

En ce qui concerne les autres besoins criminogènes, nous n’avons examiné que les rencontres avec les clients dont le besoin criminogène a été cerné comme un domaine qui pose problème. Cela a réduit la taille de l’échantillon pour chaque besoin criminogène, car seuls les AP qui ont identifié ce besoin chez au moins un client avant la formation et après la formation ont été inclus dans ces analyses. On a constaté un grand écart sur le plan de la discussion sur les attitudes avant et après la formation lorsque les attitudes étaient identifiées comme un besoin criminogène et les attitudes et processus cognitifs ont été abordés durant une période plus longue dans le cadre de chaque rencontre après la formation. Des ampleurs d’effet de faible à moyenne ont été observées sur le plan de la situation familiale et matrimoniale, de l’emploi et des études et de la toxicomanie, de sorte que ces besoins criminogènes ont été abordés moins fréquemment après la formation; cependant, l’intervalle de confiance de 95 % pour les domaines que sont la situation familiale et matrimoniale et l’emploi et les études indiquait zéro, ce qui révèle un écart négligeable. Les discussions sur les fréquentations procriminelles n’ont révélé aucune différence, que la formation ait été suivie ou non.

Comme dans le cas des domaines de discussion, nous avons examiné l’évolution interindividuelle des AP au chapitre des compétences d’intervention entre la période avant à la formation et la période après la formation. Les scores moyens avant la formation et après la formation pour chaque compétence figurent au tableau 4. Des ampleurs d’effet de moyen à grand ont été constatées dans l’ensemble des compétences d’intervention. En particulier, la qualité des compétences de collaboration et de structuration de rencontres et des techniques d’intervention cognitive et comportementale s’est considérablement améliorée après la formation. Notamment, la cote de qualité moyenne concernant les compétences correctionnelles efficaces a presque doublé après la formation, par rapport à avant.

Tableau 4 : Évolution interindividuelle des AP quant aux compétences d’intervention après la formation par rapport à avant
Compétence n Avant la formation M (ET) Après la formation M (ET) d de Cohen [IC de 95 %]
Collaboration 201 0,72 (1,43) 2,27 (1,99) 0,89 [0,69, 1,10]
Structuration 200 6,77 (3,22) 9,55 (4,09) 0,76 [0,55, 0,96]
Cognitive 201 0,03 (0,16) 1,71 (2,36) 1,00 [0,80, 1,21]
Comportementale 200 3,54 (2,41) 6,62 (3,31) 1,06 [0,85, 1,27]
Cognitivo-comportementalea 200 3,57 (2,42) 8,35 (4,82) 1,25 [1,04, 1,47]
Total des compétences correctionnelles efficacesb 200 11,03 (5,46) 20,15 (8,65) 1,26 [1,05, 1,48]

Remarque : M = moyenne. ET = écart type. IC = intervalle de confiance. Les valeurs en caractères gras indiquent l’ampleur de l’effet avec l’IC qui ne comprend pas zéro, faisant état du niveau statistique significatif (p < 0,05).

a Somme des compétences cognitive et comportementale.

b Somme des compétences de collaboration, de structuration et cognitivo-comportementale.

Incidences de l’IFSSC sur la récidive des clients

Nous avons d’abord comparé les taux de récidive des clients du groupe de référence-NE et les clients IFSSC-E. La durée moyenne de la période de suivi était de 3,5 ans (ET = 1,1; de 0,1 à 5,8). Les documents sur les antécédents criminels qui traitaient des clients du groupe de référence-NE ont été demandés plus tôt à la GRC et, ainsi, leur date de fin arrivait plus tôt. Par conséquent, la période de suivi moyenne pour les clients du groupe de référence-NE était plus courte (M = 2,97 ans, ET = 1,03) que pour les clients IFSSC-E (M = 3,83, ET = 1,04; [968,42] = 14,29, p < 0,001, d = 0,88; tableau 2b). Globalement, environ la moitié (52,7 %) des clients des deux groupes ont été condamnés de nouveau après avoir commis une infraction à un moment quelconque de la période de suivi. Catégorisés en fonction de l’infraction la plus grave, 24 % des nouvelles condamnations concernaient des infractions violentes, 40 % des infractions non violentes et 36 % des infractions administratives (p. ex. manquement aux conditions). Le taux fixe de récidive générale durant deux ans était considérablement inférieur pour les clients IFSSC-E (43,0 %), comparativement à celui des clients du groupe de référence-NE (61,4 %), tout comme le taux de récidive avec violence (14,9 % par rapport à 21,2 %). Dans le même ordre d’idées, des tendances ont été observées après le contrôle de l’âge, du risque et de la période sans infraction dans la collectivité (voir le tableau 5).

Tableau 5 : Taux de récidive observé et corrigé avec une période fixe de suivi de deux ans
  Taux de récidive observés Taux de récidive corrigésa RC [IC de 95 %]
% de référence-NE (n/N) % d’IFSSC-E (n/N) % de référence-NE % d’IFSSC-E
Récidive générale 61,4 (243/396) 43,0 (343/798) 60,4 42,7 0,49 [0,37, 0,65]
Récidive avec violence 21,2 (84/396) 14,9 (119/798) 18,9 13,5 0,67 [0,47, 0,95]

Remarque : RC = rapport de cotes; IC = intervalle de confiance. Les chiffres en caractères gras indiquent le niveau statistique significatif (p < 0,05).

a On a procédé à l’estimation des taux de récidive des groupes de référence-NE et IFSSC-E au moyen de l’analyse de régression logistique après le contrôle de l’âge (36 ans), des antécédents criminels (INS-R; score moyen de 5) et de la période sans infraction (0 mois). L’analyse de régression logistique a été menée en fonction de 396 clients référence-NE et 795 clients IFSSC-E avec les données accessibles pour toutes les variables du modèle.

Toute limite imposée quant à l’utilisation des périodes fixes de suivi donne un résultat moins significatif en raison de la taille réduite de l’échantillon et de la perte de renseignements utiles recueillis durant de longs suivis. Dans le but d’aborder ces limites, nous avons examiné la relation entre le groupe (référence-NE par rapport à IFSSC-E) et la récidive au moyen des mesures de contrôle de régression de Cox en ce qui concerne les caractéristiques importantes des clients (voir le tableau 6). Comme l’on s’y attendait, des scores supérieurs dans la sous-section « Antécédents criminels » de l’INS-R laissaient prévoir des taux de récidive supérieurs parmi l’ensemble des clients. De plus, un âge plus jeune prédisait des taux de récidive supérieurs, selon les prévisions, alors qu’une période plus longue sans infraction dans la collectivité avant d’être sélectionné en vue de l’étude prédisait des taux de récidive inférieurs. Après le contrôle de ces variables et des périodes de suivi variables, les clients IFSSC-E connaissaient des taux de récidive générale considérablement inférieurs (χ2 [1] = 15,84, p < 0,001 de Wald; voir le tableau 6)Note de bas de page 2. À tout moment durant la période de suivi, les clients IFSSC-E étaient 31 % moins susceptibles de commettre une nouvelle infraction, comparativement aux clients du groupe de référence-NE (ce taux était constant au fil du temps, χ2 [1] = 0,33, p = 0,86 de Wald). Bien que la récidive avec violence avait tendance à être inférieure parmi les clients IFSSC-E par rapport aux clients du groupe de référence-NE, cet écart n’était pas d’un niveau statistique significatif (χ2 [1] = 2,34, p = 0,14 de Wald). Les affichages visuels des courbes de survie pour les incidents de récidive (a) générale et (b) avec violence pour les groupes référence-NE et IFSSC-E figurent à l’annexe E.

Tableau 6 : Variables prédictives de régression de Cox en matière de récidive entre les groupes référence-NE et IFSSC-E
Variables Récidive générale Récidive avec violence
RR IC de 95 % RR IC de 95 %
Référence-NE ou IFSSC-Ea 0,69 [0,58, 0,83] 0,81 [0,61, 1,11]
Sous-section « Antécédents criminels » (INS-R) 1,17 [1,13, 1,22] 1,13 [1,07, 1,19]
Âge (ans) 0,97 [0,97, 0,98] 0,96 [0,95, 0,98]
Période sans infractionb (mois) 0,96 [0,93, 0,99] 1,00 [0,96, 1,04]

Remarque : RR = rapport de risques. IC = intervalle de confiance. Les chiffres en caractères gras indiquent le niveau statistique significatif (p < 0,05).

a L’analyse de régression de Cox a été menée en fonction des 467 clients du groupe de référence-NE et 823 clients IFSSC-E avec les données accessibles pour toutes les variables du modèle.

b Nombre de mois entre la date d’entrée en vigueur de la surveillance et la date du premier enregistrement audio pour les clients IFSSC-E.

Nous avons ensuite examiné la relation entre l’IFSSC et la récidive à l’aide du groupe de comparaison secondaire composé des clients enregistrés qui ont commencé la surveillance avec un AP avant que celui-ci suive la formation de l’IFSSC (groupe de référence-E). Contrairement aux clients du groupe de référence-NE sélectionnés aléatoirement, les taux de récidive générale et de récidive avec violence des clients du groupe de référence-E étaient comparables (même légèrement inférieur) à ceux des clients IFSSC-E (voir l’annexe F pour connaître les taux fixes de récidive sur deux ans observé et corrigé). En particulier, après le contrôle de l’âge, des antécédents criminels et de la période sans infraction, on n’a constaté aucun écart significatif sur le plan des taux de récidive sur deux ans entre les clients du groupe de référence-E et les clients IFSSC-E au chapitre de la récidive générale (rapport de cotes = 1,26, IC de 95 % [0,92, 1,72]) ou avec violence (rapport de cotes = 1,17 IC de 95 % [0,76, 1,81]). Néanmoins, le fait qu’ils aient des enregistrements audio codés de leurs rencontre avec les AP nous a permis d’examiner l’association entre les comportements d’un AP en particulier et la récidive du client.

Pour ce faire, le comportement de l’AP a été regroupé en fonction du client, plutôt qu’en fonction de l’AP. Ceci dit, tous les enregistrements de clients ont été regroupés pour créer des scores moyens traitant de l’exposition à certains comportements de l’AP, y compris la proportion de chaque rencontre passée à discuter de chaque besoin criminogène et technique d’intervention. Le fait d’ajouter une période consacrée à la discussion de chaque besoin criminogène à un modèle de régression de Cox, y compris le groupe (référence-E par rapport à IFSSC-E), l’âge, les antécédents criminels et la période sans infraction a renforcé considérablement la prédiction de la récidive (∆χ2 [5, = 1,101] = 15,40 = 0,009; voir le tableau 7 pour connaître les estimations définitives du modèle [les estimations avant l’inclusion des périodes de discussion sur les besoins criminogènes figurent à l’annexe G]). En particulier, le fait de discuter des attitudes et processus cognitifs procriminels a renforcé considérablement la prédiction de la récidive, de sorte que chaque augmentation de 10 % de la période de discussion sur les attitudes et processus cognitifs procriminels à chaque rencontre a donné lieu à une diminution d’environ 5 % de la récidive. En comparaison, une période plus longue consacrée à la discussion sur la toxicomanie à chaque rencontre a été associée à des taux de récidive considérablement supérieurs, de sorte que chaque augmentation de 10 % de la période de discussion sur la toxicomanie a donné lieu à une augmentation d’environ 4 % de la récidive. Aucun des autres domaines de discussion en tant que tels n’a été associé à la récidive générale. De plus, aucun des domaines de discussion n’a été associé de façon significative à la récidive avec violence (voir l’annexe H).

Tableau 7 : Variables prédictives de régression de Cox en matière de récidive générale quant aux discussions sur les besoins criminogènes
Modèle RR IC de 95 % △χ2 df p
Étape 1     117,1 4 < .001
Covariables
Référence-E ou IFSSC-Ea 1,24 [0,996, 1,54]      
Sous-section « Antécédents criminels » (INS‑R) 1,21 [1,16, 1,26]      
Âge (ans) 0,98 [0,97, 0,99]      
Période sans infractionb (mois) 0,97 [0,95, 0,997]      
Étape 2      15,40 5 .009
Discussion sur les besoins criminogènesc
Attitudes et processus cognitifs 0,95 [0,91, 0,99]      
Fréquentations 1,04 [0,99, 1,08]      
Situation familiale et matrimoniale 1,01 [0,97, 1,05]      
Emploi et études 1,01 [0,97, 1,05]      
Toxicomanie 1,04 [1,01, 1,07]      

Remarque : RR= rapport de risques. IC = intervalle de confiance. Les chiffres en caractères gras indiquent le niveau statistique significatif (p < 0,05). χ2 indique le changement χ 2 de l’étape 1 à l’étape 2 (voir l’annexe G pour connaître les résultats du modèle avec les variables de l’étape 1 seulement).

a L’analyse de régression de Cox a été menée en fonction des 281 clients du groupe de référence-E et des 820 clients IFSSC-E avec les données accessibles pour toutes les variables du modèle.

b Nombre de mois entre la date d’entrée en vigueur de la surveillance et la date du premier enregistrement audio pour les clients IFSSC-E.

c Une unité de chaque variable est établie pour afficher 0,10 (c.-à-d. 10 %).

Comme dans le cas du contenu de la discussion, l’amélioration de la qualité des compétences d’intervention des AP combinée à un modèle hiérarchique de régression Cox qui comprend le groupe (référence-E par rapport à IFSSC-E), l’âge, les antécédents criminels et la période sans infraction renforce considérablement la prédiction de la récidive générale (△χ2 [df = 4) = 1,11 = 0,025). Cependant, après un examen de chacune des compétences d’intervention, seule la compétence d’intervention cognitive a véritablement contribué au modèle (voir le tableau 8, modèle 1 pour connaître l’apport des compétences d’intervention cognitive). L’ajout des autres compétences d’intervention (compétences comportementales, de collaboration et de structuration) à un modèle qui comprend déjà la compétence d’intervention cognitive n’a pas permis d’améliorer considérablement la prédiction de la récidive générale (voir le tableau 8, modèle 2 pour connaître tous les résultats du modèle avec l’ensemble des compétences d’intervention). De plus, leur variation commune avec la compétence d’intervention cognitive a fait en sorte que celle-ci n’était pas significative dans le modèle 2. Aucune des compétences d’intervention n’était associé de façon significative à la récidive avec violence (avoir l’annexe I).

Tableau 8 : Taux de récidive prédictive de régression de Cox lié aux compétences d’intervention
Modèle RR IC de 95 % △χ2 df p
Modèle 1 : Compétence cognitive
Étape 1     117,1 4 < .001
Covariables
Référence-E ou IFSSC-Ea 1,19 [0,96, 1,48]      
Sous-section « Antécédents criminels » (INS-R) 1,21 [1,16, 1,26]      
Âge (ans) 0,98 [0,97, 0,99]      
Période sans infractionb (mois) 0,97 [0,95, 0,996]      
Étape 2   5,27 1 .022
Compétences cognitives 0,90 [0,81, 0,99]      
Modèle 2 : Toutes les compétences d’intervention
Étape 1     121,7 5 < .001
Covariables et intervention cognitive
Référence-E ou IFSSC-Ea 1,11 [0,88, 1,40]      
Sous-section « Antécédents criminels » (INS-R) 1,21 [1,16, 1,27]      
Âge (ans) 0,98 [0,97, 0,99]      
Période sans infractionb (mois) 0,97 [0,95, 0,997]      
Compétences cognitives 0,90 [0,81, 1,01]      
Étape 2   5,84 3 .120
Autres compétences d’intervention
Compétence de collaboration 1,07 [0,98, 1,17]      
Compétence de structuration 1,13 [0,98, 1,30]      
Compétence comportementale 0,93 [0,80, 1,09]      

Remarque : RR = rapport de risques. IC = intervalle de confiance. Les chiffres en caractères gras indiquent le niveau statistique significatif (c.-à-d. p < 0,05). ∆χ2 indique le changement χ 2 de l’étape 1 à l’étape 2 (voir l’annexe G pour connaître les résultats du modèle avec les variables de l’étape 1 seulement). Les scores pour chaque compétence d’intervention ont été normalisés (c.-à-d. scores Z).

a L’analyse de régression de Cox a été menée en fonction des 280 clients de référence-E et des 822 clients IFSSC-E avec les données accessibles pour toutes les variables du modèle.

b Nbre de mois entre la date de début de la surveillance et la date du premier enregistrement audio pour les clients IFSSC-E.

En ce qui concerne les interventions cognitives, le modèle 1 (tableau 8) révèle qu’au fur et à mesure de l’amélioration de la qualité de l’intervention, les taux de récidive générale ont diminué. En les examinant différemment, même lorsqu’une faible exposition aux techniques cognitives a été constatée (peu importe sa qualité), les clients exposés à ces techniques cognitives étaient environ 28 % moins susceptibles d’être condamnés de nouveau pour avoir commis une infraction quelconque, comparativement aux clients qui n’avaient pas du tout été exposés aux techniques cognitives (rapport de risques = 0,72 [0,58, 0,88]; voir l’annexe J pour connaître la courbe de survie par exposition aux techniques cognitives). Ce rapport s’est révélé constant au fil du temps (χ2 = 3,30 p = 0,069 de Wald). De plus, le taux de récidive générale sur une période fixe de deux ans pour les clients exposés aux techniques cognitives était de 27,6 %, alors que ceux qui n’avaient pas été exposés aux techniques cognitives connaissaient un taux de récidive générale de 35,8 % (rapport de cotes = 0,68 [0,51, 0,92]). Les taux de récidive avec violence sur une période fixe de deux ans n’étaient pas vraiment différents en tant que fonction de l’exposition aux techniques cognitives (12,1 % des clients exposés aux techniques cognitives par rapport à 10,4 % des clients non exposés aux techniques cognitives; rapport de cote = 1,18 [0,79, 1,75]) et le rapport de risques n’indiquait aucune différence sur les courbes de survie dans le cadre du contrôle des périodes de suivi diverses (rapport de risques = 1,03 [0,76, 1,39]).

Participation aux activités de soutien clinique

Initialement, notre intention était d’examiner la mesure dans laquelle les AP participaient aux activités de soutien clinique et si cette participation donnait lieu à un comportement amélioré des AP à l’égard de leurs clients et, éventuellement, à des résultats en matière de récidive. Malheureusement, la participation à ces activités n’a pas été recueillie systématiquement au début de la mise en œuvre de l’Initiative; ce n’est qu’en juin 2013 que la province a commencé à recueillir les renseignements concernant les réunions mensuelles, la participation à la formation de mise à niveau et la rétroaction sur les enregistrements audio. Nous avons examiné les données de 2013 à 2018 et constaté certaines valeurs inhabituelles que nous ne parvenions pas à expliquer. Par exemple, 35 AP n’ont assisté à aucune réunion mensuelle. Dans un délai d’un mois après la formation, les AP auraient dû avoir assisté à une réunion et il est fortement improbable qu’un nombre aussi élevé d’AP ne l’aient pas fait parce qu’ils avaient quitté leur poste ou étaient malades ou en vacances.

Compte tenu de la précision ci-dessus, nous avons examiné plus en profondeur les données et n’avons constaté aucune différence sur le plan des sujets de discussion et des compétences entre les AP au faible taux de participation et ceux au taux élevé de participation. Selon la psychologie de l’apprentissage humain, cela était plutôt insensé; l’amélioration du comportement par l’exercice et la répétition est une loi du comportement humain (p. ex. Bandura, 1969; Skinner, 1953). Toutefois, il est tout de même possible de fournir une explication. L’on s’attendait à ce que tous les AP participent aux activités de soutien clinique, et il faut du temps aux nouveaux comportements pour s’ancrer. Il nous manque l’information sur les deux premières années des activités de soutien clinique dans le cadre desquels nous aurions constaté des difficultés quant à la mise en application de l’IFSSC, et qu’un plateau soit atteint au cours des années ultérieures. Cette hypothèse est conforme à l’analyse exploratoire qui montre que les clients surveillés par un AP ayant plus de 24 mois d’expérience de la mise en œuvre de l’IFSSC avaient tendance à connaître un taux de récidive inférieur sur une période de deux ans que les clients surveillés par un AP ayant moins de 24 mois d’expérience liée à l’IFSSC (RC = 0,57 [0,29, 1,15] sur le plan de la récidive générale et RC = 0,27 [0,06, 1,14] pour la récidive avec violence après le contrôle de l’âge, la sous-section « Antécédents criminels » de l’INS-R et la période sans infraction avant la sélection en vue de l’étude). Cependant, ces écarts n’atteignaient pas un niveau statistique significatif (voir l’annexe D pour les taux de récidive sur une période fixe de deux ans comme fonction de l’expérience de l’AP).

Discussion

La mise en œuvre de l’IFSSC dans les services correctionnels communautaires de la C.-B. visait deux résultats. Premièrement, l’on s’attendait à un changement de comportement de l’AP afin qu’il corresponde davantage aux pratiques du modèle RBR. Ensuite, si ce premier résultat se concrétisait, l’on s’attendait à ce que les taux de nouvelles condamnations des clients diminuent, compte tenu de l’exposition aux interventions fournies par les agents formés dans le cadre de l’IFSSC. De plus, la mise en œuvre de l’IFSSC dans l’ensemble de la province permettait de reproduire, sur le plan conceptuel, les évaluations antérieures de l’IFSSC, en plus de constater la mesure dans laquelle l’Initiative pouvait être adoptée à grande échelle.

Changement comportemental de l’AP

Comme prévu, nous avons constaté une grande amélioration dans le comportement des AP conformément au modèle de l’IFSSC après la formation. D’abord, après avoir suivi la formation de l’IFSSC, les AP ont consacré une période beaucoup plus longue aux besoins criminogènes durant les rencontres de surveillance et, du même coup, une période moins grande aux besoins non criminogènes et aux conditions de probation. À ce stade-ci, conformément à des données probantes rigoureuses, le fait de cibler les besoins non criminogènes sans prêter attention aux besoins criminogènes n’a presque aucune incidence sur la diminution de la récidive (Bonta, 2019; Bonta et Andrews, 2017; Gendreau et coll., 2006; Lipsey et Cullen, 2007). En outre, certaines recherches suggèrent que l’augmentation de la période passée à discuter des conditions de probation est associée à une récidive accrue (Bonta et coll., 2008). Par conséquent, dans le cadre de la formation de l’IFSSC, on incite l’AP à mieux équilibrer son rôle d’« aidant » en accordant le moins de temps possible aux discussions sur les conditions de probation et en se concentrant sur les besoins criminogènes des clients. Conformément à ces buts en matière de formation, les AP qui ont participé à la présente étude ont été en mesure de s’attarder beaucoup plus longtemps aux besoins criminogènes et beaucoup moins longtemps aux conditions de probation et aux besoins non criminogènes.

Il a été particulièrement intéressant de constater forte augmentation des discussions sur les attitudes et processus cognitifs. Dans le cadre de la formation de l’IFSSC, on enseigne aux AP qu’une attitude ou une pensée problématique pouvant faire croître le risque d’adopter un comportement criminel se cache derrière chaque besoin criminogène. Par exemple, adopter l’attitude et le processus cognitif selon lequel « Je mérite de me saouler la fin de semaine », ou « Seuls les imbéciles travaillent pour vivre » peut entraîner des comportements qui nuisent à l’obtention de résultats prosociaux. Par conséquent, l’importance d’aborder les attitudes et processus cognitifs procriminels est davantage mise en évidence que d’autres besoins criminogènes dans le cadre de la formation de l’IFSSC. Après avoir abordé ce sujet dans le cadre de la formation, la proportion moyenne de chaque rencontre de surveillance consacrée au traitement des attitudes et processus cognitifs procriminels a augmenté considérablement (c.-à-d. après par rapport à avant la formation). En particulier, peu importe si les attitudes et processus cognitifs procriminels du client étaient cernés avec précision comme faisant partie d’un besoin criminogène, les discussions sur les attitudes et processus cognitifs étaient pratiquement inexistantes avant la formation (2 % des segments de chaque rencontre, en moyenne), et ont atteint 8 % des segments de chaque rencontre après la formation. Cela correspond aux évaluations antérieures de l’IFSSC (Bonta et coll., 2011, 2019), bien que dans la présente étude, les AP ont consacré la proportion la plus grande de chaque rencontre de surveillance à discuter des attitudes et processus cognitifs procriminels (0,18), si l’on compare aux évaluations de 2011 (0,13) et de 2019 (0,05).

Une période prolongée à discuter des attitudes procriminelles fait en sorte qu’il reste moins de temps pour discuter d’autres facteurs criminogènes. En effet, la période accordée à la toxicomanie était beaucoup moins longue à chaque rencontre après la formation et des diminutions non significatives ont été observées pour d’autres besoins criminogènes. À l’inverse, l’évaluation de 2011 (Bonta et coll., 2011) n’a révélé aucune différence au chapitre de la toxicomanie entre les conditions expérimentales et contrôlées et a signalé qu’une attention beaucoup moins importante avait été accordée à l’emploi et aux études dans la condition expérimentale (par rapport aux AP formés dans le cadre de l’IFSSC). Conformément à la présente étude, l’évaluation de 2019 (Bonta et coll., 2019) a révélé que les AP formés dans le cadre de l’IFSSC ont consacré une période considérablement moins longue aux discussions sur la toxicomanie à chaque rencontre que ceux du groupe témoin. Elle a aussi montré que les AP formés dans le cadre de l’IFSSC ont consacré beaucoup moins de temps à discuter des enjeux familiaux et matrimoniaux à chaque rencontre que ceux du groupe témoin (Bonta et coll., 2019). Par conséquent, d’une étude à une autre, on constate des incohérences selon lesquelles les besoins criminogènes sont mis en évidence après la formation. Cependant, cela peut être attribuable en partie aux différences sur le plan de la période consacrée à la discussion sur les attitudes et processus cognitifs procriminels. Logiquement, si l’AP discute plus longtemps des attitudes et processus cognitifs, il aura moins de temps pour discuter d’autres domaines problématiques. De plus, toute discussion sur les attitudes et processus cognitifs qui sous-tendent les autres besoins criminogènes dans la présente étude a été codée en tant que discussion sur les attitudes et processus cognitifs procriminels, peu importe son contenu. Il est donc possible que d’autres besoins criminogènes aient tout de même été abordés dans le contexte des attitudes et processus cognitifs sous-jacents. Malheureusement, la méthode de codage n’était pas sensible à cette nuance dans les conversations entre l’AP et son client.

Il est important de souligner que le temps consacré à chaque besoin criminogène était davantage équilibré après la formation, par rapport aux rencontres tenues avant la formation durant laquelle la discussion portait surtout sur la situation familiale et matrimoniale, l’emploi et les études et la toxicomanie. Il s’agit là d’un changement important, car il indique que les besoins criminogènes du client sont davantage abordés durant les rencontres de surveillance, surtout les attitudes et processus cognitifs procriminels.

Le deuxième objectif important de la formation de l’IFSSC était d’améliorer les compétences d’intervention des AP. Conformément à cet objectif, les AP ont affiché des améliorations notables sur le plan de nos quatre mesures particulières de compétences d’intervention (c.-à-d. la collaboration, la structuration, l’intervention cognitive et l’intervention comportementale) après avoir suivi la formation. Il s’agit d’ailleurs de la première évaluation de l’IFSSC qui signale une amélioration notable au chapitre de la compétence d’intervention comportementale. Des travaux préliminaires menés par Trotter (1996) ont établi clairement l’importance de la modélisation prosociale par les AP afin de réduire la récidive des clients, et la méta-analyse de Dowden et Andrews (2004) élabore sur l’importance des techniques d’intervention comportementale afin d’inclure le renforcement et la désapprobation efficaces. On ne connaît toujours pas avec certitude la raison pour laquelle un effet sur la compétence d’intervention comportementale a été constaté dans la présente étude, et non dans les évaluations antérieures (Bonta et coll., 2011, 2019). Cependant, nous présumons que cela peut avoir trait à la participation aux activités continues de soutien clinique dans la présente étude. Au sein des services correctionnels communautaires de la C.-B, les AP devaient assister aux réunions mensuelles et participer à d’autres activités continues de soutien clinique. La recherche indique que le soutien clinique est important pour l’acquisition de nouvelles compétences (Beidas et Kendall, 2010; Bourgon et coll., 2010). Il se peut donc que la participation aux activités continues de soutien clinique ait favorisé le perfectionnement de la compétence dans le cadre de la présente étude.

Récidive des clients

Puisque la formation de l’IFSSC a donné lieu à des améliorations notables sur le plan du comportement des AP qui souscrivent aux principes RBR, l’on s’attendait à ce que les clients ayant été exposés plus longtemps à des AP formés dans le cadre de l’IFSSC allaient connaître une diminution de la récidive comparativement aux clients ayant été très peu exposés à des AP qui ont suivi la formation de l’IFSSC. Comme prévu, les clients IFSSC-E (les clients qui ont été enregistrés par les AP formés dans le cadre de l’IFSSC), sur une période fixe de deux ans, ont affiché des taux de récidive générale (43,0 % par rapport à 61,4 %) et de récidive avec violence (14,9 % par rapport à 21,2 %) moins élevés que les clients du groupe de référence-NE (les clients du groupe de référence non enregistrés sélectionnés aléatoirement qui ont commencé la surveillance avec un AP avant que celui-ci suive la formation de l’IFSSC). Ces écarts sont demeurés après le contrôle de l’âge, du risque et de la période sans infraction dans la collectivité, avant la sélection en vue de l’étude (c.-à-d. la période entre la date d’entrée en vigueur de la période de probation et le premier enregistrement audio pour les clients IFSSC-E). Dans le même ordre d’idée, lorsque toute la période de suivi pour chaque client a été prise en considération, les analyses de survie ont révélé que les clients ayant été exposés plus longtemps à l’IFSSC connaissaient en général des taux de récidive inférieurs, après que l’on a tenu compte des diverses périodes de suivi, de l’âge, du risque et de la période sans infraction, avant la sélection en vue de l’étude. Les analyses de survie prédisant une récidive avec violence n’ont pas atteint un niveau statistique significatif, même si les constatations allaient dans la direction prévue.

Il s’agit de la première évaluation de l’IFSSC ayant examiné la récidive avec violence; les autres évaluations n’ayant examiné que la récidive générale qui comprend les condamnations pour une infraction violente, non violente et administrative. Généralement, la récidive avec violence est beaucoup moins probable que la récidive générale (Mossman, 1994). Par conséquent, le taux de base inférieur rend le comportement violent plus difficile à prédire et la détection de la récidive nécessite des échantillons de délinquants plus vastes et des périodes de suivi plus longues. D’autres évaluations de l’IFSSC menées antérieurement avaient des échantillons de délinquants en probation relativement petits et cela empêchait d’examiner la récidive avec violence. L’évaluation initiale (Bonta et coll., 2011) comptait 143 délinquants en probation (100 dans le groupe expérimental et 43 dans le groupe témoin), alors que l’évaluation de 2019 (Bonta et coll., 2019) comptait un nombre de délinquants en probation encore plus petit (123, dont 81 dans le groupe expérimental et 42 dans le groupe témoin). La présente étude comporte un échantillon beaucoup plus grand qui compte 1 194 délinquants en probation (798 clients IFSSC-E et 396 clients référence-NE), ce qui nous permet d’examiner la récidive avec violence séparément. Comme nous l’avons mentionné précédemment, le taux de récidive avec violence sur une période fixe de deux ans était considérablement inférieur pour les clients IFSSC-E comparativement aux clients référence-NE. Cependant, les analyses de survie qui comprenaient la période de suivi au complet pour chaque client (périodes de suivi allant de 0,01 à 5,83 ans) ont révélé que le groupe (IFSSC-E par rapport à référence-NE) n’a pas prédit de façon significative la récidive violente (bien que le rapport de risques ait pu suggérer que les clients IFSSC-E étaient, en moyenne, 11 % moins susceptibles d’être condamnés de nouveau pour une infraction violente). Puisqu’il faut plus de temps pour qu’une infraction violente soit commise par rapport à la récidive générale, il est possible que les taux de récidive avec violence sur une période fixe de deux ans ne tiennent pas compte avec exactitude des effets à long terme de l’IFSSC sur la récidive avec violence. De plus, contrairement à la récidive générale, la récidive avec violence n’a pas révélé une grande différence comme fonction de l’exposition à l’intervention cognitive, peu importe la durée du suivi. Cela suggère que pour les clients qui présentent un risque élevé de violence, des interventions intensives (p. ex. plus fréquentes et longues) peuvent être requises pour modifier leurs besoins criminogènes en conformité avec le principe du risque. 

Malheureusement, nous n’avons pas été en mesure de reproduire ces résultats avec le groupe témoin secondaire composé des clients du groupe de référence enregistrés (référence-E). Ceci dit, les taux de récidive générale ou avec violence des clients IFSSC-E et les clients référence-E n’étaient pas très différents durant la période fixe de suivi de deux ans. Par ailleurs, les analyses de survie comprenant la période de suivi au complet pour chaque client n’ont révélé aucune association significative entre les groupes (IFSSC-E par rapport à référence-E) et la récidive générale ou avec violence. Selon nous, cela pourrait être attribuable à l’élément de « choix » établi au début des enregistrements des clients du groupe de référence. En effet, durant les 15 premiers mois de la mise en œuvre, les AP choisissaient les clients qu’ils allaient enregistrer, alors qu’en juin 2013, on a commencé à affecter aléatoirement les clients aux AP. Il est vrai que ce biais aurait nui à notre hypothèse, car il est probable que les AP favorisaient les clients avec qui il est plus facile de travailler et présentant un risque de récidive moins élevé. Nous avons bel et bien découvert des données probantes qui le prouvent. Les scores des clients du groupe de référence-E présentaient un risque considérablement inférieur dans l’INS-R (voir le tableau 2b) et nécessitaient des niveaux de surveillance considérablement moins élevés (35 % par rapport à 53 % nécessitant un niveau de surveillance « élevé », χ2 = 39,64, p < 0,001) comparativement aux clients IFSSC-E. De plus, une proportion significativement plus grande de clients du groupe de référence-E (76,4 %) pouvant avoir été exposés à l’IFSSC dans une certaine mesure a été constatée, comparativement aux clients du groupe de référence-NE (60,6 %), car leur période de probation chevauchait la date de formation de leur AP. Cela a pu atténuer les effets de la formation de l’IFSSC. Par conséquent, nous avons accordé une importance accrue aux résultats au moyen du groupe de comparaison référence-NE. Cependant, même si nous croyons que le groupe de référence-NE est plus représentatif de la population de délinquants en probation avant l’IFSSC, nos constatations auraient été renforcées si nous avions constaté une diminution de la récidive chez les clients IFSSC-E par rapport aux clients du groupe de référence-E (groupe témoin secondaire).

Toutefois, lorsque nous avons examiné les comportements précis des AP, nous avons constaté que les mesures correspondant aux principes RBR ont permis de prédire de manière significative des réductions de récidive générale chez les clients IFSSC-E et référence-E. Conformément à la théorie selon laquelle les attitudes et processus cognitifs sous-tendent tous les autres besoins criminogènes (Bonta et Andrews, 2017), les attitudes et processus cognitifs procriminels constituaient le besoin criminogène associé à une récidive générale réduite le plus important. Cela est conforme à la recherche de Bonta et coll. (2011), dans le cadre de laquelle ils ont découvert que le fait de discuter davantage des attitudes procriminelles était associé à une récidive inférieure chez les clients surveillés par les AP formés dans le cadre de l’IFSSC. En revanche, Bonta et coll. (2019) n’ont pas réussi à reproduire cette constatation. Il est possible que ces résultats mitigés puissent être expliqués par la proportion très faible consacrée aux attitudes et processus cognitifs procriminels à chaque rencontre dans l’évaluation de 2019. Ceci dit, après la formation, une moyenne de seulement 5 % des segments de chaque rencontre portaient sur les attitudes et processus procriminels. Bien que ces résultats soient considérablement supérieurs à ceux du groupe témoin (1 %), ils sont tout de même très faibles. L’étude de 2011 a révélé qu’en moyenne, 13 % des segments portaient sur les attitudes procriminelles à chaque rencontre, alors qu’ils atteignent 18 % dans la présente étude. Ces constatations suggèrent qu’un certain dosage est requis pour que les discussions sur les attitudes et processus cognitifs procriminels aient des incidences sur la récidive des clients. Contre toute attente, une période plus longue consacrée à la discussion sur la toxicomanie à chaque séance a été associée à une augmentation de la récidive générale. On ne connaît pas vraiment la raison de cette augmentation, mais nous présumons que les discussions sur la toxicomanie peuvent être associées à une condition de probation courante (p. ex. fournir un échantillon d’urine aux fins d’analyse). Ce rôle de surveillance/renforcement peut rendre la relation de travail axée sur la collaboration difficile entre l’AP et son client. De plus, le fait de prêter une attention accrue à la toxicomanie fait en sorte que la discussion sur les attitudes et processus cognitifs n’est pas suffisamment longue, alors que cela semble particulièrement important pour réduire la récidive générale.

Rappelons que l’un des objectifs principaux de l’IFSSC est d’inciter les AP à cibler les attitudes et les pensées procriminelles en procédant à des interventions cognitives et comportementales (Bourgon et Gutierrez, 2012). Il a été déterminé que les techniques cognitivo-comportementales font partie des interventions les plus efficaces pour aider les délinquants à adopter un mode de vie prosocial (Andrews et Bonta, 2017; Landenberger et Lipsey, 2005; Wilson et coll., 2005). Conformément aux évaluations antérieures de l’IFSSC (Bonta et coll., 2011, 2019), l’amélioration de la compétence d’intervention cognitive a été associée à une récidive générale moindre, une fois les diverses périodes de suivi prises en compte. Comme dans le cas de Bonta et coll. (2011), une simple exposition aux techniques d’intervention cognitive a aussi permis de prédire une récidive moins élevée; les clients exposés aux techniques cognitives connaissaient un taux de récidive générale de 28 % sur une période de 2 ans, alors que ceux qui n’ont pas été exposés aux techniques cognitives connaissaient un taux de 36 %. Dans l’évaluation de 2011, les clients exposés aux techniques cognitives ont connu un taux de récidive de 19 %, alors que ceux qui ne l’ont pas été ont connu un taux de 37 %. Pour ce qui est de l’évaluation de 2019 (Bonta et coll., 2019), aucune différence entre les clients du groupe expérimental et ceux du groupe témoin sur une période fixe de deux ans n’a été constatée, mais les analyses de survie indiquaient que l’exposition aux interventions cognitives était associée de manière significative à une récidive moindre, une fois le contrôle des diverses périodes de suivi effectué.

Contrairement aux techniques d’intervention cognitive, la compétence d’intervention comportementale n’a pas été associée de manière significative à des réductions de la récidive générale, même avant de tenir compte de l’écart expliqué par la compétence d’intervention cognitive. Cette constatation correspond à l’évaluation de l’IFSSC menée par Bonta et ses collègues (2011) qui, elle aussi, n’a découvert aucune association entre la compétence d’intervention comportementale et la récidive. Ensemble, ces constatations semblent suggérer la possibilité que les techniques d’intervention cognitive soient plus efficaces lorsqu’il s’agit de travailler avec les délinquants en probation, mais nous ajouterions que les techniques d’intervention comportementale continuent de faire partie intégrante de l’IFSSC. Les interventions cognitives peuvent modifier le discours personnel et d’identité d’un client (Lloyd et coll., 2019), alors que les interventions comportementales comme le renforcement, la modélisation et la désapprobation façonnent et confirment les comportements qui soutiennent un discours personnel.

De projet de démonstration à une mise en œuvre à grande échelle

En tant que chercheurs, nous savons qu’en général, les projets de démonstration donnent lieu à des effets plus solides que les mises en œuvre à grande échelle (Bonta et Andrews, 2017). Les projets de démonstration comportent un nombre moins élevé de participants et cela permet aux chercheurs de surveiller l’évaluation de près (p. ex. Lipsey, 1999). De plus, les participants ont tendance à se porter volontaires et sont probablement plus conscients du niveau de coopération requis quant aux protocoles de traitement et de recherche. Moins de 100 AP ont participé au projet de démonstration initial de l’IFSSC (Bonta et coll., 2011) et du projet de démonstration qui a suivi (Bonta et coll., 2019), et tous s’étaient portés volontaires. La présente étude comportait une mise en œuvre de l’IFSSC dans tout le système en C.-B. et comptait 350 AP dont bon nombre ne se sont pas portés volontaires pour un tel projet et ont peut-être résisté au changement.

Nos constatations suggèrent que la mise en œuvre de l’IFSSC dans l’ensemble du système des services correctionnels communautaires de la C.-B. a donné lieu à des changements cohérents sur le plan du comportement de l’AP dans la plupart de nos mesures, ainsi qu’à des diminutions notables de récidive des clients. Quelques éléments pourraient expliquer de tels résultats cohérents et positifs. Premièrement, les évaluateurs ont participé étroitement à la tenue de l’IFSSC et à la conception de l’évaluation, et il s’agit là d’une caractéristique importante des effets positifs du traitement (Lipsey, 2009). Par exemple, dans le cadre d’un examen de méta-analyse des programmes de traitement en milieu correctionnel, Petrosino et Soydon (2005) ont constaté une ampleur d’effet moyenne de 0,16 (valeur d de Cohen) associée à des résultats positifs lorsque les évaluateurs avaient aussi participé à l’élaboration du programme, par rapport à 0,02 lorsque l’évaluateur n’y avait pas participé. L’on pourrait examiner le tout d’un œil cynique et déclarer que les évaluateurs compromettent les résultats. Cependant, il est tout aussi probable que l’engagement à l’égard du programme par les évaluateurs assure une grande fidélité.

Deuxièmement, la mise en œuvre a été surveillée de près et lorsqu’il a été déterminé que la participation du personnel était inférieure aux attentes, une évaluation d’intégrité a été menée. En particulier, le nombre d’enregistrements audio avant la formation et après était inférieur au nombre prévu et les chercheurs et cadres supérieurs sont intervenus rapidement en menant des entrevues avec les intervenants de première ligne afin de connaître les difficultés des AP et prendre des mesures correctives pour améliorer l’adhésion à l’IFSSC et à son évaluation (Bonta et coll., 2013). Sans surveillance, le respect des protocoles est menacé et les résultats peuvent être décevants (Farringera et coll., 2019). Troisièmement, une quantité considérable de ressources ont été affectées à la mise en œuvre, y compris des fonds pour que les AP puissent assister aux formations et participer aux activités de soutien clinique. De plus, d’autres employés ont été embauchés à l’appui de l’IFSSC. Quatrièmement, la mise en œuvre a duré trois ans et demi (excluant la pause de six mois pour la formation) en C.-B. en vue de former environ 350 AP. Des données probantes révèlent qu’il faut des années pour réussir des mises en œuvre à grande échelle (Bierman et coll., 2002; Fixsen et coll., 2001, 2005) et il semble qu’une approche lente soit avantageuse dans notre cas.

Limites

Avant de présenter notre résumé sur les constatations principales et nos commentaires sur leur importance pour une surveillance communautaire efficace, nous souhaitons souligner les limites importantes de la présente étude. D’abord, étant donné que la mise en œuvre de l’IFSSC dans l’ensemble des services correctionnels communautaires de la C.-B nécessitait que tous les AP soient formés dans un délai limité nous n’avons pas été en mesure de mener une expérience aléatoire dans le but de tester l’efficacité de l’IFSSC comme cela a été fait dans les évaluations précédentes (Bonta et coll., 2011, 2019). Cela menace sérieusement la validité interne de l’étude. Au moment d’évaluer les changements de comportement des AP, nous avons eu recours à une conception avant évaluation et après évaluation qui est limitée par le manque d’un groupe témoin et qui pourrait subir les conséquences liées aux antécédents et l’évolution (Campbell et Stanley, 1966). La période relativement courte accordée aux AP pour procéder à leurs enregistrements audio (de 12 à 15 mois environ) réduit les effets d’antécédents et d’évolution sur la qualité du comportement des AP évalué avant et après la formation. Cependant, pour ces analyses, il aurait fallu qu’un groupe témoin soit composé d’un échantillon d’AP qui n’ont pas suivi la formation de l’IFSSC, et cela était impossible, puisque tous les AP devaient suivre la formation dans un délai limité.

Au moment d’examiner l’association entre l’IFSSC et la récidive des clients, nous avons utilisé une conception quasi expérimentale limitée par des différences de base entre les groupes de comparaison. Nous avons constaté plusieurs différences de base dans la présente étude, y compris l’âge, le risque et la période sans infraction avant la sélection en vue de l’étude. Nous avons tenté de réduire au minimum la menace quant à la validité interne en contrôlant ces covariables, mais il est impossible de contrôler l’ensemble des différences de base possibles. Par exemple, un peu moins de la moitié des bandes audio enregistrées avant la formation l’ont été avec des clients qui n’avaient pas été affectés aléatoirement aux AP. En conséquence, cela a vraisemblablement donné lieu à une liste « sélective » des clients du groupe de référence-E et cela correspond aux résultats selon lesquels ce groupe affichait un risque inférieur à celui des groupes référence-NE et IFSSC-E. Pour tenir compte de cette limite, nous avons sélectionné aléatoirement un échantillon de clients de référence non enregistrés (référence-NE) comme groupe témoin principal. Même si, vraisemblablement, les clients du groupe de référence-NE représentaient davantage la population de délinquants en probation avant la mise en œuvre de l’IFSSC, on observe tout de même certaines limites quant à la comparaison de ce groupe témoin avec les clients IFSSC-E. Par exemple, tous les clients IFSSC-E avaient accepté que leurs rencontres de surveillance soient enregistrées aux fins de la présente étude. Puisque nous ne savons pas si les clients référence-NE auraient consentis à l’enregistrement audio de leurs rencontres de surveillance, il est possible que les clients IFSSC-E et ceux du groupe de référence-NE présentent d’importantes différences que nous n’avons pas été en mesure de contrôler (p. ex. la motivation à changer, l’agréabilité).

Deuxièmement, étant donné le temps limité pour former tous les AP, une grande partie des clients des groupes de référence (65,7 % des clients du groupe de référence-E et 40,3 % du groupe de référence-NE) peuvent avoir été exposés à l’IFSSC dans une certaine mesure. Ceci dit, pour certains, leur période de probation chevauchait la date de formation de leur AP. Dans l’idéal, il aurait fallu que les clients de référence ne soient pas exposés du tout à des AP formés dans le cadre de l’IFSSC. Malheureusement, cela s’est révélé impossible pour le groupe de référence-E, étant donné la mise en œuvre de l’IFSSC dans l’ensemble du système en C.-B. Toutefois, en rétrospective, nous aurions pu sélectionner des clients du groupe de référence-NE ne faisant pas l’objet d’une ordonnance de probation chevauchant la date de formation de leur AP. Ceci dit, le fait de sélectionner des clients surveillés depuis récemment permettait de réduire les effets d’antécédents et d’évolution. Par ailleurs, cette méthode a fait croître la contamination entre les groupes de comparaison et cela peut avoir atténué la différence entre les clients IFSSC-E et les clients référence-NE. Par ailleurs, l’action d’enregistrer les rencontres de surveillance après que l’AP a suivi la formation de l’IFSSC peut avoir donné lieu à des caractéristiques de biais ou d’exigences, de sorte que les AP formés dans le cadre de l’IFSSC allaient adopter leur « meilleur comportement » parce qu’ils étaient enregistrés et savaient ce à quoi les chercheurs s’attendaient. Par conséquent, il est possible que nos résultats ne visent pas généralement les AP formés dans le cadre de l’IFSSC non enregistrés. Néanmoins, même si les enregistrements reflètent le « meilleur comportement » de l’AP, ces constatations font tout de même état de l’efficacité du programme (c.-à-d. l’efficacité d’un programme dans les circonstances idéales).

Troisièmement, le codage des discussions sur la personnalité antisociale n’atteignait pas le seuil établi en matière de fiabilité interévaluateurs. En conséquence, dans la présente étude, nous n’avons pas pu examiner en toute fiabilité la période consacrée à la discussion sur la personnalité antisociale par rapport à d’autres besoins criminogènes. La personnalité antisociale est l’une des variables prédictives les plus solides au chapitre de la récidive criminelle (Bonta et Andrews, 2017) et par conséquent, il est important que les AP abordent ce besoin criminogène durant les rencontres de surveillance communautaire. Les instructions de codage visant les discussions sur la personnalité antisociale devraient faire l’objet d’une révision pour la tenue de recherches à venir ayant pour objectif d’améliorer la fiabilité de cette variable. Cela permettrait que d’autres études examinent les incidences éventuelles du traitement de la personnalité antisociale dans le cadre de la surveillance communautaire sur la récidive des clients.

Quatrièmement, nous n’avons pas été en mesure d’évaluer adéquatement la valeur des activités de soutien clinique pour l’IFSSC (c.-à-d. les réunions mensuelles, les cours de mise à niveau et la rétroaction) en raison des données limitées (p. ex. données manquantes concernant les deux premières années de mise en œuvre, valeurs hors portée douteuses). Cela est bien malheureux, car d’autres ont constaté la valeur de l’engagement des employés à l’égard de telles activités afin de tenir à jour les compétences acquises et de perfectionner les nouveaux apprentissages (Bourgon et coll., 2010, 2020). Toutefois, une analyse des données suggère que les compétences ont été tenues à jour tout au long de la période visée par l’étude, sans déclin de la qualité du contenu des discussions et des compétences d’intervention entre les premiers enregistrements audio (neuf premiers mois après la formation) et les autres (de neuf à douze mois après la formation). Malgré l’absence d’un niveau statistique significatif, nous avons constaté un déclin des taux de récidive tant générale que violente en ce qui concerne les clients surveillés par un AP ayant plus de deux années d’expérience de la mise en œuvre de l’IFSSC. Les diminutions étaient conformes tant pour les taux de récidive observés que les taux de récidive corrigés. Cela pourrait suggérer que plus l’AP a de l’expérience au chapitre de l’IFSSC, plus ses interventions seront efficaces. Toutefois, cela n’est que spéculation.

Résumé et conclusions

Compte tenu des limites méthodologiques susmentionnées, la présente évaluation a fourni des données probantes concrètes quant à la valeur de l’IFSSC. Le comportement des AP a emprunté la direction prévue et ils ont davantage prêté attention aux principes des besoins et de la réceptivité. Par exemple, nous avons constaté des améliorations notables sur le plan du respect du centre d’intérêt des AP sur les attitudes et processus cognitifs problématiques et les compétences d’intervention cognitivo-comportementales. De plus, les délinquants en probation ayant été davantage exposés à l’IFSSC ont connu des taux de récidive générale considérablement inférieurs à ceux d’un échantillon aléatoire de délinquants en probation ayant été très peu exposés à l’IFSSC. Le traitement des attitudes et processus cognitifs procriminels au moyen de techniques d’intervention cognitive s’est avéré particulièrement important pour la diminution de la récidive générale. L’importance des changements d’attitude comme première étape du changement psychothérapeutique remonte à la fin des années 1960 : « Le but de toutes les formes de [psychothérapie] est d’aider le patient à corriger les attitudes qui lui causent des problèmes. » (Frank, 1963, p. 41). De plus, les examens de méta-analyses révèlent que les attitudes procriminelles annoncent un comportement criminel (Gendreau et coll., 1996) et qu’il s’agit d’une cible importante des programmes de réhabilitation des délinquants (Bonta et Andrews, 2017). Par conséquent, nos résultats correspondent à la littérature globale sur la réhabilitation et le changement comportemental des délinquants. En conclusion, selon la présente étude, il se peut que l’IFSSC soit un modèle efficace pour l’amélioration de l’efficacité de la surveillance communautaire.

Bibliographie

Allison, P. D. 1984. Event history analysis: Regression for longitudinal event data. Sage.

Andrews, D. A. et Bonta, J. (1995). The Level of Service Inventory – Revised. Multi-Health Systems.

Andrews, D. A., Bonta, J. et Hoge, R. D. 1990. Classification for effective rehabilitation: Rediscovering psychologyCriminal Justice and Behavior, vol. 17, no 1, p. 19-52.

Bandura, A. 1969. Principles of behavior modification. Holt, Rinehart, and Winston.

Beidas, R. S. et Kendall, P. C. 2010. Training therapists in evidence-based practice: A critical review of studies from a systems-contextual perspective. Clinical Psychology: Science and Practice, vol. 17, no 1, p. 1-30.

Bierman, K. L., Coie, J. D., Dodge, K. A., Greenberg, M. T., Lochman, J. E., McMahon, R. J. et Pinderhughes, E. 2002. The implementation of the Fast Track Program: An example of a large-scale prevention science efficacy trial. Journal of Abnormal Child Psychology, vol. 30, no 1, p. 1-17.

Bonta, J. 2019. Criminogenic needs. In R. D. Morgan (éd.), The SAGE encyclopedia of criminal psychology (p. 324-328). Sage.

Bonta, J. et Andrews, D. A. (2017). The psychology of criminal conduct (6th ed.). Routledge.

Bonta, J., Bourgon, G., Rugge, T., Gress, C. et Gutierrez, L. 2013. Taking the leap: From pilot project to wide-scale implementation of the Strategic Training Initiative in Community Supervision (STICS). Justice Research and Policy, vol. 15,no 1, p. 17-35.

Bonta, J., Bourgon, G., Rugge, T., Scott, T. L., Yessine, A. K., Gutierrez, L. et Li, J. 2011. An experimental demonstration of training probation officers in evidence-based community supervision. Criminal Justice and Behavior, vol. 38,no 11, p. 1127-1148.

Bonta, J., Rugge, T., Bourgon, G. et Wanamaker, K. 2019. A conceptual replication of the Strategic Training Initiative in Community Supervision (STICS)Journal of Experimental Criminology, vol. 15,no 3, p. 397-419.

Bonta, J., Rugge, T., Scott, T., Bourgon, G. et Yessine, A. 2008. Exploring the black box of community supervisionJournal of Offender Rehabilitation, vol. 47,no 3, p. 248-270.

Bourgon, G., Bonta, J., Rugge, T. et Gutierrez, L. 2010. Technology transfer: The importance of on-going clinical supervision in translating “What Works” to everyday community supervision. In F. McNeil, P. Raynor et C. Trotter (Eds.), Offender supervision: New directions in theory, research and practice, p. 88-106. Willan Publishing.

Bourgon, G., Chadwick, N. et Rugge, T. 2020. Beyond core correctional practice: Facilitating prosocial change through the Strategic Training Initiative in Community Supervision. In J. S. Wormith, Craig, L. A. et Hogue, T. (éd.), Handbook of what works in violence risk management: Theory, research and practice, p. 505-526. John Wiley and Sons.

Bourgon, G. et Gutierrez, L. 2012. The general responsivity principle in community supervision: The importance of probation officers using cognitive intervention techniques and its influence on recidivism. Journal of Crime and Justice, vol. 35, no 2, p. 149-166.

Campbell, D. T. et Stanley, J. C. 1966. Experimental and quasi-experimental designs for research. Rand McNally College Publishing.

Cicchetti, D. V. 1994. Guidelines, criteria, and rules of thumb for evaluating normed and standardized assessment instruments in psychology. Psychological Assessment, vol. 6,no 4, p. 284-290.

Cohen, J. 1992. A power primer. Psychological Bulletin, vol. 122,no 1, p. 155-159.

Cullen, F. T. 2013. Rehabilitation: Beyond nothing works. In M. Tonry (éd.), Crime and justice, Vol. 42, Crime and justice in America 1975-2025, p. 299-376. University of Chicago Press.

Dowden, C. et Andrews, D. A. 2004. The importance of staff practices in delivering effective correctional treatment: A meta-analysis of core correctional practices. International Journal of Offender Therapy and Comparative Criminology, vol. 48, no 2, p. 203-214.

Farringera, A. J., Durieza, S. A., Manchaka, S. M. et Sullivan, C. C. 2019. Adherence to “What Works”: Examining trends across 14 years of correctional program assessment. Corrections: Policy, Practice and Research. Advance online publication.

Fixsen, D. L., Blase, K. A., Timbers, G. D. et Wolf, M. M. 2001. In search of program implementation: 792 replications of the Teaching-Family Model. In G. A. Bernfeld, D. P. Farrington et A. W. Leschied (Eds.), Offender rehabilitation in practice: Implementing and evaluating effective programs, p. 149-166. Wiley.

Fixsen, D. L., Naoom, S. F., Blase, K. A., Friedman, R. M. et Wallace, F. 2005. Implementation research: A synthesis of the literature. University of South Florida, Louis de la Parte Florida Mental Health Institute, The National Implementation Research Network (FMHI Publication #231).

Flores, A. W., Holsinger, A. M., Lowenkamp, C. T. et Cohen, T. H. 2017. Time-free effects in predicting recidivism using both fixed and variable follow-up periods: Do different methods produce different results. Criminal Justice and Behavior, vol. 44,no 1, p. 121–137.

Frank, J. D. 1963. Persuasion and healing: A comparative study of psychotherapy. Schocken Books.

Gendreau, P., Little, T. et Goggin, C. 1996. A meta-analysis of the predictors of adult offender recidivism: What works! Criminology, vol. 34, no 4, p. 575-607.

Hanson, R. K. 2002. Recidivism and age: Follow-up data from 4,673 sexual offenders. Journal of Interpersonal Violence, vol. 17, no 10, p. 1046-1062.

Hanson, R. K., Harris, A. J. R., Letourneau, E., Helmus, L. M. et Thornton, D. 2018. Reductions in risk based on time offense-free in the community: Once a sexual offender, not always a sexual offender. Psychology, Public Policy, and Law, vol. 24,no 1, p. 48-63.

Hirschi, T. et Gottfredson, M. R. 1983. Age and the explanation of crime. American Journal of Sociology, vol. 89, no 3, p.552-584.

Labrecque, R. M., Smith, P., Schweitzer, M. et Thompson, C. 2013. Targeting antisocial attitudes in community supervision using the EPICS model: An examination of change scores on the Criminal Sentiment Scale. Federal Probation, vol. 77, no 3, p. 15-20.

Landenberger, N. et Lipsey, M. 2005. The positive effects of cognitive-behavioral programs for offenders: A meta-analysis of factors associated with effective treatmentJournal of Experimental Criminology, vol. 1, no 4, p. 451-476.

Landis, J. R. et Koch, G. G. 1977. The measurement of observer agreement for categorical data. Biometrics, vol. 33, no 1, p. 159-174.

Lipsey, M. W. 1999. Can rehabilitative programs reduce the recidivism of juvenile offenders? An inquiry into the effectiveness of practical programs. Virginia Journal of Social Policy and the Law, vol. 6, p. 611-641.

Lipsey, M. W. 2009. The primary factors that characterize effective interventions with juvenile offenders: A meta-analytic overview. Victims & Offenders, vol. 4, no 4, p. 124–147.

Lipsey, M. W. et Cullen, F. T. 2007. The effectiveness of correctional rehabilitation: A review of systematic reviews. Annual Review of Law and Social Science, vol. 3, no 1, p. 297-320.

Lloyd, C., D., Perley-Robertson, B. et Serin, R. C. 2019: Age and strengths in a community corrections sample. International Journal of Forensic Mental Health. Advance online publication.

Malakieh, J. 2019. Statistiques sur les services correctionnels pour les adultes et les jeunes au Canada, 2017-2018 (Rapport no 85-002-X).

Martinson, R. 1974. What works? Questions and answers about prison reform. The Public Interest, vol. 35, p. 22-54.

Mossman, D. 1994. Assessing predictions of violence: Being accurate about accuracy. Journal of Consulting and Clinical Psychology, vol. 62, no 4, p.783-792.

Petrosino, A. et Soydan, H. 2005. The impact of program developers as evaluators on criminal recidivism: Results from meta-analyses of experimental and quasi-experimental research. Journal of Experimental Criminology, vol. 1, no 4, p.435–450.

Polaschek, D. 2012. An appraisal of the risk–need–responsivity (RNR) model of offender rehabilitation and its application in correctional treatmentLegal and Criminological Psychology, vol. 17,no 1, p. 1-17.

Ponterotto, J. G. et Ruckdeschel, D. E. 2007. An overview of coefficient alpha and a reliability matrix for estimating adequacy of internal consistency coefficients with psychological research measures. Perceptual and Motor Skills, vol. 105, no 3, p. 997-1014.

Robinson, C. J., Lowenkamp, C. T., Holsinger, A. M., VanBenschoten, S., Alexander, M. et Oleson, J. C. 2012. A random study of staff training aimed at reducing re-arrest (STARR): Using core correctional practice in probation interactions. Journal of Crime and Justice, vol. 35, no 2, p. 167-188.

Sampson, R. J. et Laub, J. H. 2003. Life-course desisters? Trajectories of crime among delinquent boys followed to age 70. Criminology, vol. 41, no 3, p. 555-592.

Skinner, B. F. 1953. Science and human behavior. Free Press.

Smith, A., Heyes, K., Fox, C., Harrison, J., Kiss, Z. et Bradbury, R. 2018. The effectiveness of probation supervision towards reducing reoffending: A rapid evidence assessment. Probation Journal, vol. 65, no 4, p. 407-428.

Taxman, F. S. 2008. No illusions: offender and organizational change in Maryland’s Proactive Community Supervision efforts. Criminology & Public Policy, vol. 7,no 2, p. 275-302.

Trotter, C. 1996. The impact of different supervision practices in community corrections: Cause for optimism. Australian & New Zealand Journal of Criminology, vol. 29, no 1, p. 1-19.

Wilson, D., Bouffard, L. et Mackenzie, D. 2005. A quantitative review of structured, group-oriented, cognitive-behavioral programs for offendersCriminal Justice and Behavior, vol. 32, no 2, p. 172-204.

Wormith, J. S. et Zidenberg, A. M. 2018. The historical roots, current status, and future applications of the Risk-Need-Responsivity model (RNR). In E. L. Jeglic & C. Calkins (éd.), New frontiers in offender treatment, p. 11-41. Springer Nature Switzerland AG.

Annexe A

Figure A1 : Formation initiale de trois jours et composantes de tenue à jour des compétences dans le cadre de l’IFSSC
Méthode Objectif Matière
Formation initiale de trois jours sur l’IFSSC
Jour 1
Module 1 : Aperçu et justification de l’IFSSC Décrire les travaux théoriques et les données à l’appui d’un grand nombre de compétences particulières enseignées dans les autres modules. Théorie de la PGASC
Module 2 : Stratégies de surveillance différentes et principe du risque Décrire les travaux théoriques et les données à l’appui d’un grand nombre de compétences particulières enseignées dans les autres modules. Principe du risque
Module 3 : Facteurs criminogènes Décrire les travaux théoriques et les données à l’appui d’un grand nombre de compétences particulières enseignées dans les autres modules. Principe des besoins
Module 4 : Attitudes procriminelles Décrire les travaux théoriques et les données à l’appui d’un grand nombre de compétences particulières enseignées dans les autres modules. Principe des besoins
Module 5 : Principe de la réceptivité : Établir des liens dans une relation thérapeutique Montrer l’importance des liens et enseigner les techniques d’établissement des relations. Principe de la réceptivité
Jour 2
Module 6 : Modèle cognitivo-comportemental Enseigner des concepts et des compétences concrets se rapportant aux divers besoins liés aux facteurs criminogènes et applicables à un vaste éventail de délinquants. Principe de la réceptivité
Module 7 : Interventions cognitivo-comportementales : restructuration cognitive Enseigner des concepts et des compétences concrets se rapportant aux divers besoins liés aux facteurs criminogènes et applicables à un vaste éventail de délinquants. Principe de la réceptivité
Module 8 : Modèles prosociaux et renforcement Enseigner des techniques de modélisation et l’utilisation efficace du renforcement ou de la punition Principe de la réceptivité
Jour 3
Module 9 : Autres interventions cognitivo-comportementales particulières Enseigner des compétences de base en résolution de problèmes et auto-gestion. Principe de la réceptivité
Module 10 : Surveillance stratégique Fournir une structure pour chaque séance et pour la totalité de la période de probation. Principe de la réceptivité
Maintien des compétences
Réunions mensuelles Soutien, perfectionnement et intégrité Maintien des compétences
Rétroaction clinique officielle sur les séances entre l’agent et le délinquant Soutien, perfectionnement et intégrité Maintien des compétences
Cours d’appoint (environ un an après la formation) Soutien, perfectionnement et intégrité Maintien des compétences

Remarque : Reproduction tirée de Bourgon, Bonta, Rugge, Scott et Yessine (2010)Note de bas de page 3.

Annexe B

Tableau B1 : Chevauchement entre la période de probation du groupe de référence et la formation de l’IFSSC suivie par l’AP
  Référence-E (n = 283) Référence-NE (n = 467) Ampleur de l’effet [CI de 95 %]
Clients comportant un chevauchement entre la période de probation et la formation de l’AP dans le cadre de l’IFSSC et qui n’ont pas été condamnés de nouveau avant la formation de l’AP 65,7 % 40,3 % RC = 2,85 [2,09, 3,87]
Chevauchement (jours) min. – max. 1 – 1 039 1 – 1 446 -
Chevauchement de M parmi les clients comportant tout chevauchement (ET) 225,48 (171,91) 244,38 (243,10) d = -0,09 [-0,29, 0,11]

Remarque : RC = rapport de cotes. Les valeurs en caractères gras indiquent l’importance statistique (p < 0,05).

Annexe C

Tableau C1 : Fréquence à laquelle les AP ont cerné des besoins criminogènes chez au moins un client avant la formation et après la formation
Besoins criminogènes Fréquence à laquelle les AP ont cerné le besoin RC [IC de 95 %]
Avant la formation (N = 236) n (%) Après la formation (N = 322) n (%)
Attitudes/processus cognitifs 88 (37,3) 231 (71,7) 4.25 [2,97, 6,07]
Fréquentations 163 (69,1) 297 (92,5) 5.24 [3,22, 8,55]
Situation familiale et matrimoniale 125 (53,0) 254 (78,9) 3.30 [2,28, 4,77]
Emploi et études 114 (48,3) 230 (71,4) 2.67 [1,88, 3,79]
Toxicomanie 180 (76,3) 306 (95,0) 5.81 [3,26, 10,4]

Remarque : RC = rapport de cotes. IC = intervalle de confiance. Les RC ci-dessus indiquent que les besoins criminogènes ont été cernés plus fréquemment après la formation qu’avant. Les valeurs en caractères gras indiquent l’ampleur de l’effet avec l’IC qui ne comprend pas zéro, faisant état de l’importance statistique (p < 0,05). En moyenne, les enregistrements audio avant la formation duraient 18,50 (ET = 9,42) minutes, alors qu’ils duraient plus longtemps après que l’AP a suivi la formation, soit 25,72 (ET = 9,02) minutes (d = 0,79, IC de 95 % [0,61, 0,96]).

Annexe D

Tableau D1 : Analyse exploratoire des taux de récidive sur une période fixe de deux ans comme fonction de l’expérience des AP dans le cadre de l’IFSSC
Expérience de l’IFSSC (mois) 0-6 6-12 12-18 18-24 24+
Récidive générale
Observé 44,1 % (124/281) 42,9 % (127/296) 45,0 % (58/129) 42,0 % (21/50) 31,0 % (13/42)
Corrigéa 38,6 % 35,0 % 35,9 % 31,2 % 24,5 %
Récidive avec violence
Observé 15,7 % (44/281) 14,5 % (43/296) 19,4 % (25/129) 10,0 % (5/50) 4,8 % (2/42)
Corrigéa 9,6 % 8,5 % 11,3 % 5,0 % 2,6 %

Remarque : Aucune des différences entre les taux de récidive générale et de récidive avec violence respectivement n’était de niveau statistiquement significatif.

a Les taux de récidive (au sein du groupe de clients IFSSC-E [n = 795]) ont été évalués au moyen d’une analyse de régression logistique après le contrôle de l’âge (36 ans), des antécédents criminels (INS-R; score moyen de 5) et de la période sans infraction (0 mois).

Annexe E

Figure E1 : Courbe de survie des groupes référence-NE et IFSSC-E pour la récidive générale et la récidive avec violence

(a) Récidive générale

(a) Récidive générale
Description de l'image

Cette courbe de survie illustre le taux cumulatif de survie pour la récidive générale, et ce, pour les groupes référence NE (n = 467) et IFSSC-E (n = 823), pendant la durée de survie (en jours). Elle indique que les clients du groupe référence NE ont récidivé plus rapidement que ceux du groupe IFSSC-E, puisque la courbe du premier a une trajectoire descendante plus prononcée. Dans l’ensemble, les clients du groupe IFSSC-E étaient 31 % plus susceptibles d’être condamnés de nouveau pour un autre délit, comparativement à ceux du groupe référence NE, pendant la période de suivi.

(b) Récidive avec violence

(b) Récidive avec violence
Description de l'image

Cette courbe de survie illustre le taux cumulatif de survie pour la récidive avec violence, et ce, pour les groupes référence NE (n = 467) et IFSSC-E (n = 823), pendant la durée de survie (en jours). Elle indique que les clients du groupe référence NE ont eu tendance à récidiver légèrement plus rapidement que ceux du groupe IFSSC-E, comme le montre la trajectoire descendante relativement plus prononcée de la courbe de survie du groupe référence NE. Toutefois, la différence entre les deux courbes de survie n’était pas statistiquement significative.

Remarque : Les courbes de survie qui traitent de la récidive générale et de la récidive avec violence pour chaque groupe ont été tracées après le contrôle de l’âge, des antécédents criminels et de la période sans infraction dans la collectivité, avant la sélection en vue de l’étude.

Annexe F

Tableau F1 : Taux de récidive fixes observés et ajustés sur 2 ans quant aux clients IFSSC-E et aux clients référence-E
  Taux de récidive observés Taux de récidive corrigésa RC [IC de 95 %]
Référence-E % (n/N) IFSSC-E % (n/N) Référence-E % IFSSC-E %
Récidive générale 33,1 (93/281) 43,0 (343/798) 35,7 41,1 1,26 [0,92, 1,72]
Récidive avec violence 12,1 (34/281) 14,9 (119/798) 10,5 12,1 1,17 [0,76, 1,81]

Remarque : RC = rapport de cotes; IC = intervalle de confiance. Les chiffres en caractères gras indiquent le niveau statistique significatif (c.-à-d. p < 0,05).

a Les taux de récidive pour les groupes référence-E et IFSSC-E ont été évalués au moyen de l’analyse de régression logistique, après le contrôle de l’âge (36 ans), des antécédents criminels (INS-R; score moyen de 5) et de la période sans infraction (0 mois). L’analyse de régression logistique a été menée en fonction des 279 clients du groupe de référence-E et 795 clients IFSSC-E avec les données accessibles pour toutes les variables du modèle.

Annexe G

Tableau G1 : Régression de Cox prédisant la récidive entre les groupes référence-E et IFSSC-E
Variables Récidive générale Récidive avec violence
Rapport de risques IC de 95 % Rapport de risques IC de 95 %
RÉFÉRENCE-E ou IFSSC-Ea 1,11 [0,90, 1,37] 1,08 [0,78, 1,49]
Sous-section de l’INS-R 1,21 [1,16, 1,27] 1,24 [1,16, 1,33]
Âge (ans) 0,98 [0,97, 0,99] 0,97 [0,96, 0,98]
Période sans infractionb (mois) 0,97 [0,95, 0,99] 1,00 [0,97, 1,03]

Remarque : IC = intervalle de confiance. Les chiffres en caractères gras indiquent le niveau statistique significatif (< 0,05).

a L’analyse de régression de Cox a été menée en fonction des 281 clients du groupe de référence-E et des 823 clients IFSSC-E avec les données accessibles pour toutes les variables du modèle.

b Nombre de mois entre la date d’entrée en vigueur de la surveillance et la date du premier enregistrement audio pour les clients IFSSC-E.

Annexe H

Tableau H1 : Régression de Cox prédisant la récidive violente à partir de la discussion sur les besoins criminogènes
Modèle Rapport de risques IC de 95 % △χ2 df p
Étape 1     64,2 4 < .001
Covariables
RÉFÉRENCE-E ou IFSSC-Ea 1,09 [0,78, 1,52]      
Sous-section de l’INS-R 1,24 [1,16, 1,33]      
Âge (ans) 0,97 [0,96, 0,98]      
Période sans infractionb (mois) 1,00 [0,97, 1,03]      
Étape 2     0,70 5 .983
Discussion sur les besoins criminogènesc
Attitudes procriminelles 1,00 [0,94, 1,07]      
Pairs procriminels 1,00 [0,93, 1,07]      
Situation familiale et matrimoniale 1,02 [0,96, 1,08]      
Emploi et études 1,00 [0,94, 1,07]      
Toxicomanie 1,02 [0,96, 1,07]      

Remarque : RR = rapport de risques. IC = intervalle de confiance. Les chiffres en caractères gras indiquent le niveau statistique significatif (< 0,05).

χ2 indique les changements χ 2 de l’étape 1 à l’étape 2 (voir l’annexe G pour connaître les résultats du modèle avec les variables de l’étape 1 seulement).

a L’analyse de régression de Cox a été menée en fonction des 281 clients du groupe de référence-E et des 820 clients IFSSC-E avec les données accessibles pour toutes les variables du modèle.

b Nombre de mois entre la date d’entrée en vigueur de la surveillance et la date du premier enregistrement audio.

c Une unité de chaque variable est établie pour afficher 0,10 (c.-à-d. 10 %).

Annexe I

Tableau I1 : Régression de Cox prédisant des taux de récidive avec violence à partir des compétences d’intervention
Modèle RR IC de 95 % △χ2 df p
Modèle 1 : Compétences cognitives
Étape 1     64,8 4 < .001
Covariables
RÉFÉRENCE-E ou IFSSC-Ea 1,02 [0,72, 1,42]      
Sous-section de l’INS-R 1,25 [1,17, 1,33]      
Âge (ans) 0,97 [0,96, 0,98]      
Période sans infractionb (mois) 1,00 [0,97, 1,03]      
Étape 2     1,44 1 .231
Compétence cognitive 1,08 [0,95, 1,23]      
Modèle 2 : Toutes les compétences d’intervention
Étape 1     66,0 5 < .001
Covariables et compétence d’intervention cognitive
RÉFÉRENCE-E ou IFSSC-Ea 1,02 [0,71, 1,46]      
Sous-section de l’INS-R 1,25 [1,17, 1,34]      
Âge (ans) 0,97 [0,95, 0,98]      
Période sans infractionb (mois) 1,00 [0,97, 1,03]      
Compétence cognitive 1,13 [0,97, 1,31]      
Étape 2     1,46 3 .692
Compétences d’intervention
Compétence de collaboration 1,04 [0,91, 1,20]      
Compétence de structuration 1,08 [0,87, 1,35]      
Compétence comportementale 0,87 [0,68, 1,11]      

Remarque : RR = rapport de risques. IC = intervalle de confiance. χ2 indique les changements χ 2 de l’étape 1 à l’étape 2. Les scores pour chaque compétence d’intervention ont été normalisés (c.-à-d. scores Z). Les chiffres en caractères gras indiquent le niveau statistique significatif (c.-à-d., p < 0,05).

a L’analyse de régression de Cox a été menée en fonction des 280 clients du groupe de référence-E et des 822 clients IFSSC-E avec les données accessibles pour toutes les variables du modèle.

b Nombre de mois entre la date d’entrée en vigueur de la surveillance pour les clients du groupe de référence-E et la date du premier enregistrement audio pour les clients IFSSC-E.

Annexe J

Figure J1 : Courbes de survie en fonction de l’exposition à la compétence d’intervention cognitive

Figure J1 : Courbes de survie en fonction de  l’exposition à la compétence d’intervention cognitive
Description de l'image

Cette courbe de survie illustre le taux cumulatif de survie pour la récidive générale, et ce, pour les clients avec ou sans exposition à des techniques d’intervention cognitives. Elle indique que les clients n’ayant pas été exposés à des techniques d’intervention cognitives ont récidivé plus rapidement que ceux y ayant été exposés, puisque la courbe de survie des clients sans exposition présente une trajectoire descendante plus prononcée. Dans l’ensemble, les clients ayant été exposés à des techniques d’intervention cognitives étaient 28 % moins susceptibles d’être condamnés de nouveau pour un autre délit comparativement aux clients n’ayant pas été exposés à de telles techniques.

Remarque : Les courbes de survie qui traitent de la récidive par l’exposition aux compétences d’intervention cognitive ont été évaluées après qu’on a tenu compte des groupes de clients (groupe de référence-E par rapport aux IFSSC-E), de l’âge, des antécédents criminels (INS-R), et de la période sans infraction.

Date de modification :