Transformations en cours aux Services correctionnels

Contexte

Au cours des dernières années, le gouvernement du Canada a pris des mesures importantes pour transformer le système correctionnel fédéral en poursuivant des améliorations en matière de soins de santé mentale pour tous les détenus, en répondant au besoin des délinquants autochtones qui sont surreprésentés dans le système de justice criminelle et en introduisant des réformes législatives afin d’éliminer la pratique de l’isolement préventif. Ces enjeux ont attiré l’attention nationale après le décès de détenus hautement médiatisés et les contestations de la constitutionnalité de l’utilisation de l’isolement préventif par le gouvernement du Canada dans les provinces de l’Ontario et de Colombie-Britannique et des lois qui le régissent. Il y a également des recours collectifs pour contester l’utilisation de l’isolement préventif ainsi que des plaintes devant le Tribunal canadien des droits de la personne.

Le 21 juin 2019, une Loi modifiant la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition et une autre loi a reçu la sanction royale. Cette loi apporte des modifications importantes : améliorer la gouvernance des soins de santé; mieux appuyer les victimes dans le système de justice criminelle; tenir compte des besoins particuliers des délinquants autochtones; introduire la technologie de scanneur personnel; éliminer l’isolement préventif et disciplinaire; introduire un nouveau modèle correctionnel pour promouvoir la réhabilitation dans un environnement sécuritaire. Grâce aux unités d’intervention structurée (UIS) dans le cadre de ce modèle, les détenus qui ne peuvent être soutenus de façon sécuritaire parmi la population générale auront recours à des interventions ciblées, ainsi qu’à des programmes et à des soins de santé mentale en vue de faciliter leur réinsertion dans la population générale le plus rapidement possible. Outre la surveillance interne par les Services correctionnels du Canada des placements des UIS, une surveillance externe sera fournie par des décideurs externes indépendants (DEI).

État des choses

Les modifications introduites dans la Loi sont entrées en vigueur immédiatement après la sanction royale, [Caviardé]

Afin de soutenir la mise en œuvre des UIS, un comité consultatif a été formé pour surveiller ses progrès et s’assurer d’une transparence accrue. Le comité fournira une rétroaction continue au commissaire du SCC, et avertira le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile concernant tout problème ou toute préoccupation liée à la mise en œuvre du nouveau système.

Considérations juridiques liées à l’isolement préventif

Il y a eu deux contestations de la constitutionnalité de l’utilisation de l’isolement préventif par le gouvernement du Canada et les lois qui le régissent. Le 18 décembre 2017, la Cour supérieure de justice de l’Ontario a décidé, dans Association canadienne des libertés civiles c. Sa Majesté la reine, que l’absence d’un examen par un décideur indépendant (interne) jusqu’au cinquième jour de l’isolement applique une procédure inéquitable et enfreint l’article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés (la Charte). La Cour avait suspendu sa déclaration d’invalidité de la loi jusqu’en décembre 2018. Le Canada a demandé une prorogation, mais n’a pas interjeté appel de cette conclusion.

Le 26 avril 2019, la Cour d’appel de l’Ontario a accordé la prorogation jusqu’au 17 juin 2019, si le SCC mettait en œuvre l’examen indépendant avant le cinquième jour de l’isolement, mais dans son ordonnance, elle a déclaré que, peu importe, le 18 juin 2019, la législation régissant l’isolement préventif ne serait plus en vigueur. Le 13 juin 2019, le Canada a sollicité la permission d’interjeter appel de l’ordonnance de la Cour d’appel de l’Ontario auprès de la Cour suprême du Canada (CSC). Le Canada a également demandé un sursis à l’exécution et une prorogation jusqu’au 30 novembre 2019. Le 14 juin 2019, la CSC a accordé un sursis provisoire à l’exécution et une prorogation provisoire jusqu’à ce qu’elle tranche sur la requête concernant une prorogation et un sursis à l’exécution.

L’Association canadienne des libertés civiles a interjeté appel de la décision du tribunal d’instance inférieure, à l’exception de la conclusion concernant l’examen avant le cinquième jour d’isolement et le 28 mars 2019, la Cour d’appel de l’Ontario a déterminé que l’isolement préventif d’une durée de plus de 15 jours consécutifs était contraire à l’article 12 de la Charte. La Cour a accordé une suspension de 15 jours de sa déclaration d’invalidité. Le Canada a demandé la permission d’interjeter appel de cette décision auprès de la CSC et a demandé un sursis à l’exécution. Le 11 avril 2019, la CSC a accordé au Canada une suspension provisoire du sursis provisoire à l’exécution jusqu’à ce que la CSC rende une décision sur le sursis provisoire à l’exécution.

Le 17 janvier 2018, la Cour suprême de la Colombie-Britannique, dans British Columbia Civil Liberties Association and John Howard Society of Canada c. Canada, a décidé que l’isolement préventif était contraire à la Constitution en vertu des articles 7 et 15 de la Charte au motif du placement prolongé et indéfini en isolement préventif, du placement de détenus atteints de maladies mentales ou handicapés mentaux en isolement préventif, du manque d’un décideur indépendant (externe) de la privation des droits des détenus à la représentation par un avocat et de la possibilité d’une application discriminatoire pour les détenus autochtones. Le Canada a interjeté appel de cette décision et a demandé une prorogation de la suspension de la déclaration d’invalidité. Le 26 juin 2019, la Cour d’appel de la Colombie-Britannique a accueilli la demande du Canada d’une prorogation de la suspension de la déclaration d’invalidité jusqu’au 30 novembre 2019.

Le 24 juin 2019, la Cour d’appel de la Colombie-Britannique a publié sa décision, accueillant en partie l’appel du Canada. La Cour a maintenu la déclaration du tribunal d’instance inférieure selon laquelle la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (LSCMLC) est contraire à l’article 7 de la Charte, étant donné qu’elle autorise un isolement préventif prolongé et indéfini et n’exige pas un examen externe après cinq jours ouvrables. La Cour a publié une déclaration selon laquelle le SCC ne s’est pas acquitté de ses obligations légales de s’assurer que les détenus en isolement préventif ont une possibilité raisonnable de retenir et d’instruire un avocat. La Cour a déclaré que les détenus ont un droit constitutionnel d’être représentés par un avocat lors d’audiences d’examen de l’isolement. La Cour n’était pas d’accord avec la conclusion selon laquelle les dispositions contestées violent l’article 15 de la Charte, que ce soit pour les détenus autochtones ou ceux atteints de maladies mentales ou handicapés mentaux. La Cour a publié une déclaration en vertu de laquelle, dans son administration, le SCC ne s’est pas acquitté de ses obligations légales de tenir compte de façon significative des besoins des détenus atteints de maladies mentales ou handicapés mentaux en matière de soins de santé avant de les placer ou de confirmer leur placement en isolement préventif.

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