Une nouvelle vision pour la police au Canada : modernisation de la GRC
Publiée : le 10 mars 2025
La sécurité de la population canadienne compte parmi les responsabilités principales du gouvernement fédéral. Depuis le début de son histoire ou presque, la Gendarmerie royale du Canada (GRC) est à l’avant-garde des efforts déployés par le Canada pour protéger ses collectivités. Ses tuniques rouges et chapeaux Stetson à large bord sont des symboles du Canada reconnus dans le monde entier. Organisation policière hautement compétente et professionnelle, la GRC incarne les valeurs canadiennes que sont le service, l’intégrité et le respect de la primauté du droit. Elle est le corps policier national sur lequel on compte d’un océan à l’autre pour protéger les frontières du Canada, défendre la sécurité nationale, gérer des domaines hautement spécialisés comme l’ADN et la criminalistique et protéger les dignitaires tout en assurant des services de police de première ligne efficaces et efficients dans huit provinces et trois territoires, par l’entremise de 700 détachements et auprès de plus de 600 collectivités autochtonesNote de bas de page 1.
En exerçant le large éventail de responsabilités qui est le sien, la GRC maintient l’ordre public dans l’ensemble du Canada depuis des générations. Or, les menaces envers le Canada évoluent rapidement et exigent des interventions ciblées. Le règne du numérique et l’expansion des menaces en provenance de l’étranger remettent en question les modèles et les approches traditionnelles en matière d’application de la loi. Des activités criminelles et autres menaces complexes en pleine croissance qui dépassent de plus en plus nos frontières touchent les Canadiens et Canadiennes quotidiennement avec des répercussions dévastatrices sur la société, comme le rôle du crime organisé dans la propagation du fentanyl. Les infrastructures essentielles sont régulièrement et systématiquement la cible de cyberattaques complexes avec des vols de données, au détriment des services sur lesquels la population compte. Nous observons des avancées technologiques qui facilitent la perpétration et la dissimulation de tels crimes, qu’il s’agisse par exemple des communications chiffrées pour les transactions illégales ou encore des outils de pointe pour le vol de véhicules. En outre, le personnel de la GRC est poussé à en faire plus pour protéger nos frontières. La population s’attend à un corps policier moderne et hautement spécialisé, qui sache exactement ce qu’il fait et sur lequel elle puisse compter dans un monde qui change rapidement.
Après avoir réfléchi aux défis et à l’évolution nécessaires, le gouvernement met de l’avant une nouvelle vision pour une approche efficace en matière de services de police pour les Canadiens et Canadiennes.
L’impératif d’évoluer dans notre manière d’aborder les services de police
Les menaces ayant émergé au vingt-et-unième siècle, comme le terrorisme, l’ingérence étrangère, le crime organisé et l’extrémisme violent, se fondent les unes dans les autres pour produire des phénomènes comme l’utilisation criminelle des hypertrucages, dont la détection nécessite des compétences et stratégies nouvelles. Ces menaces sont persistantes (et souvent en progression), évoluent en fonction des tendances technologiques, géopolitiques et sociétales et se complexifient, impliquant de multiples auteurs de menace (étatiques et non étatiques) qui transcendent les frontières. L’écart grandissant entre les capacités technologiques des auteurs de menaces et les contre-mesures à la disposition des forces de l’ordre – tous ordres de gouvernement confondus – est au cœur du caractère mouvant du tableau de menace. Combler cet écart est essentiel pour contrer les menaces les plus graves envers le Canada.
Le message est clair : les structures et les modèles de ressourcement statiques communs aux forces publiques dans tout le pays ne sont pas adaptés à la nature complexe, changeante et transfrontalière des menaces d’aujourd’hui. Bien que grâce aux efforts déployés en ce sens les forces de l’ordre commencent à gagner en résilience et en flexibilité, les municipalités, les provinces et le gouvernement fédéral doivent continuer à remettre en question les méthodes traditionnelles. Il nous faut délaisser la mentalité d’un passé caractérisé par l’information en vases clos, les pénuries de ressources et les ententes de dernière minute. Tous les ordres de gouvernement doivent prendre une part de responsabilité si nous voulons, collectivement, affronter les nouvelles menaces auxquelles fait face le Canada.
L’impératif du changement est brillamment illustré par les fruits de nos efforts récents pour rassembler tous les ordres de gouvernement autour d’une même table afin d’aborder la sécurité frontalière, et la crise du fentanyl en particulier. La crise des surdoses au Canada, nourrie par le fentanyl et l’augmentation des opioïdes synthétiques, a emporté au moins 50 000 Canadiens et Canadiennes depuis 2016Note de bas de page 2. Or depuis quelques années, cette menace n’est plus tant une question d’importation que de production intérieure alimentée par l’importation de précurseurs; au moins 44 laboratoires clandestins qui fabriquaient du fentanyl ont été démantelés par les forces de l’ordre canadiennes entre 2018 et 2024Note de bas de page 3. Cette menace est le fait avant tout du crime organisé basé au Canada même; en 2024, le Service canadien de renseignements criminels estimait à plus de 4000 le nombre d’organisations criminelles actives au paysNote de bas de page 4. Par contre, le crime organisé basé à l’étranger n’est pas en reste, profitant des failles dans les contrôles aux frontières ou destinés à prévenir le blanchiment d’argent au Canada et dans le monde entier.
La nature incroyablement complexe et transfrontalière des menaces signifie que nous ne pouvons plus nous permettre d’examiner les crimes graves isolément. Cette convergence des auteurs et des méthodes s’observe aussi pour les autres menaces, notamment l’ingérence étrangère, la cybercriminalité et l’extrémisme violent.
Le rôle de l’État fédéral dans les services de police
Depuis plus de 150 ans, la GRC est une pierre angulaire de l’histoire nationale, occupée à protéger les intérêts du Canada, maintenir l’ordre public et desservir les collectivités rurales et éloignées. Son rôle a beaucoup évolué au fil du temps. Le mandat de ce qui s’appelait la Police à cheval du Nord-Ouest à sa création en 1873 s’est étendu à des objectifs plus généraux de maintien de l’ordre public dans l’Ouest, et finalement au Yukon et dans les régions arctiques. En 1904, le roi Édouard VII lui a ajouté le qualificatif de « royale » en reconnaissance pour 30 années de service. En 1920, la Royale gendarmerie à cheval du Nord-Ouest a fusionné avec la Police fédérale, qui était responsable de l’Est du Canada, donnant naissance à une force policière fédérale unifiéeNote de bas de page 5. Aujourd’hui, les détachements de la GRC sont un fier symbole du Canada dans les collectivités de partout au pays.
De par la Loi constitutionnelle de 1867, la police est une responsabilité partagée. Le gouvernement fédéral a le pouvoir législatif sur le droit pénal, à l’exception de l’administration de la justice, qui est une affaire provinciale. Le Code criminel est une loi fédérale clé qui définit les infractions de droit pénal au sens large, de même qu’un éventail d’outils et de procédures pour les poursuites judiciaires et l’application de la loi. Les Provinces administrent la justice avec leurs propres lois sur les services de police municipaux et, dans le cas de l’Ontario et du Québec, en se dotant de services de police provinciaux. Le rôle de la GRC dans cet environnement est unique, car dans l’exercice de ses fonctions, elle sert tous les ordres de gouvernement.
La version actuelle de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada (1985), qui régit l’organisation et ses activités, a été modifiée à plusieurs reprises pour tenir compte de l’évolution des besoins. La Loi établit que la GRC est la « force de police pour le Canada », ce qui permet à l’organisation d’être active au pays et à l’étranger, et elle fixe les fonctions de la GRC, y compris les fonctions de force de police traditionnelle et les autres fonctions qui peuvent être attribuées par voie de règlement. Dans le cadre réglementaire de la GRC, on peut lire que la GRC s’est articulée autour de trois principales fonctions — police fédérale, services de police spécialisés et police contractuelle — et que ces fonctions sont étroitement liées entre elles.
La fonction de police fédérale de la GRC traite des menaces criminelles les plus graves et les plus complexes à la sûreté et à la sécurité des Canadiens et des intérêts canadiens au moyen d’activités de prévention, de détection et d’enquête. Elle applique également plus de 250 lois fédérales, en plus de mener des activités policières internationales et d’assurer l’intégrité des frontières du Canada et la sécurité d’événements importants pilotés par le gouvernement, de représentants désignés et de dignitaires. Ses responsabilités comprennent la lutte contre les menaces à la sécurité nationale, la cybercriminalité et le crime organisé, la prestation de services de protection des personnes de marque et des témoins ainsi que la prestation de services policiers liés à la sécurité des frontières canadiennes. La GRC est présente dans l’ensemble des provinces et des territoires du Canada de même qu’à l’extérieur du pays. La GRC est le principal organisme d’application de la loi pour les enquêtes criminelles liées à la sécurité nationale, y compris en matière d’espionnage, d’ingérence étrangère, de terrorisme et de subversion.
Pour appuyer le travail policier au sein de la GRC et pour tous les organismes canadiens d’application de la loi, la GRC offre des services spécialisés et techniques, notamment une formation avancée sur l’application de la loi; des dépôts nationaux de données criminelles; des outils et des services de réglementation, d’enquête et de délivrance de permis en matière d’armes à feu; des services de criminalistique et d’identification; des programmes relatifs aux armes à feu et des services de lutte contre l’exploitation des enfants. La GRC fournit aussi un éventail de services techniques pour appuyer les opérations et les enquêtes de la GRC, telles que la collecte d’éléments de preuves numériques et le renseignement sur la cybercriminalité, l’offre d’outils de technologie de l’information pour services de police et la mise en œuvre de normes de sécurité personnelles et organisationnelles.
Les services de police contractuels de la GRC sont fournis dans le cadre d’ententes sur les services de police (ESP), qui sont négociées entre le gouvernement fédéral et les provinces, les territoires et les municipalités (les ententes actuelles arrivent à échéance le 31 mars 2032). Les ESP énoncent les fonctions et les responsabilités de la GRC sur les plans financier, opérationnel et administratif dans les dispositions liées aux services de police provinciaux et municipaux. Les provinces et les municipalités établissent le niveau des ressources, le budget ainsi que les priorités en matière de services de police de concert avec la GRC, et la GRC doit respecter les priorités en matière de services de police et le budget établi. Les ESP sont fondées sur le partage des coûts avec les provinces et les territoires, qui paient 70 % des coûts de la GRC, le gouvernement fédéral absorbant le reste des coûts. Des ESP ont été conclues avec l’ensemble des provinces et des territoires, sauf l’Ontario et le Québec. Les ententes conclues avec les municipalités reposent sur diverses formules de partage des coûts, qui tiennent compte de la population et du moment où une municipalité a signé sa première entente sur les services de police avec la GRC.
Défis propres aux services de police
Les services de police dans les collectivités et les services de police liés aux crimes graves et transnationaux exigent une répartition des responsabilités pour s’assurer que les organismes d’application de la loi se concentrent sur les bons aspects et disposent des compétences voulues. Près des deux tiers des ressources de la GRC (2,7 milliards de dollars par année et 18 500 membres du personnel)Note de bas de page 6 sont utilisées pour s’acquitter de responsabilités découlant d’ESP. Les ESP sont des obligations contractuelles sur vingt ans, et des ESP ont été conclues entre le gouvernement fédéral et l’ensemble des provinces et des territoires, sauf le Québec et l’Ontario, et avec plus de 150 municipalités. Comme indiqué dans une étude menée en 2023 par le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement (CPSNR), un comité dont sont membres des représentants de toutes les partiesNote de bas de page 7, les subventions octroyées et les coûts non attribués du contrat, au-delà de ce qui figure dans les ESP, sont considérables et en hausse (on les estime maintenant à 800 M$ par année)Note de bas de page 8. Les ESP exigent aussi que la GRC tienne compte des lignes directrices fournies par les ministres provinciaux et territoriaux relativement à leurs priorités, ce qui peut brouiller les responsabilités et l’établissement des priorités.
Certaines provinces ont exprimé le souhait d’avoir une influence locale accrue sur les services de police offerts par la GRC afin de mieux répondre aux besoins de leurs collectivités uniques et diverses.Note de bas de page 9 Les coûts en hausse, l’attrition élevée et un nombre croissant de postes vacants entraînent des pénuries de personnel structurelles et des difficultés pour toutes les parties, mais le gouvernement fédéral demeure responsable de ces services. Dans un environnement où les ressources sont limitées, cette structure a un effet direct sur les capacités de la GRC dans d’autres domaines, y compris sa capacité d’accorder une attention soutenue aux crimes de ressort fédéral les plus graves. Une division des responsabilités est nécessaire pour que les services de police communautaires et les services de police liés aux crimes graves et au crime organisé bénéficient tous deux d’un soutien spécialisé et d’une attention soutenue.
De récents signalements de tiers sur les services de police au Canada font mention des préoccupations ci-dessus; et, plus précisément, de l’ampleur du mandat de la GRC et de sa capacité d’arriver à un équilibre entre ses obligations en matière de police contractuelle et de police fédérale. Le programme de la Police fédérale de la GRC a obtenu des succès dignes de mention au cours des dernières années, y compris le démantèlement d’importants réseaux de trafic de drogue et de traite de personnes, la neutralisation de cybermenaces ainsi que des arrestations importantes en matière de terrorisme et de respect des frontières. Toutefois, des préoccupations ont été soulevées au sujet de la capacité du Canada de s’adapter au nouveau contexte de menace dans une multitude d’enquêtes, de rapports internes et d’études indépendantes; principalement le rapport du CPSNR susmentionné et le rapport du Conseil consultatif de gestion de la GRC de 2023.Note de bas de page 10 Ces préoccupations persistent malgré les efforts récemment déployés à l’interne pour améliorer la gouvernance, la reddition de comptes et la gestion des priorités.
Les besoins des services de police contractuels sont omniprésents dans l’approche de recrutement et de formation de la GRC. Presque toutes les activités de recrutement sont liées à la nécessité de disposer de policiers de première ligne, qui sont essentiels pour les services de police locaux, mais cela n’est pas sans conséquences pour la capacité de la Police fédérale. Le CPSNR souligne que, sur 823 heures de formation offertes à l’école de la GRC (connue sous le nom de Division Dépôt), seulement six heures (c.-à-d. moins d’un pour cent) concernent le mandat de la Police fédérale de la GRC.Note de bas de page 11 La formation spécialisée dans des domaines techniques, comme la cybercriminalité, les langues étrangères et la juricomptabilité, n’est pas offerte pendant les premières années de formation ou au recrutement des futurs agents de la GRC. De plus, il n’existe pas de parcours professionnel clair pour la Police fédérale, ce qui présente des difficultés supplémentaires en comparaison avec le secteur privé et les autres partenaires fédéraux en matière de sécurité nationale. Il faut se pencher sur ces enjeux.
Comme mentionné, la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada ne définit pas la fonction de police fédérale; ce rôle doit être déduit à la lumière d’un examen des autres pouvoirs juridiques et des programmes internes de la GRC. La Loi ne fixe pas non plus de priorités relativement aux 250 lois fédérales que la GRC a le mandat de faire appliquer. Les structures organisationnelles et opérationnelles au sein de la GRC renforcent la prévalence des services de police contractuels, compromettant ainsi le respect de priorités fédérales. La Commission des pertes massives a souligné la nécessité de fixer « des priorités claires pour la GRC, en conservant les tâches relevant d’un service de police fédéral et en identifiant les responsabilités qu’il serait préférable de réaffecter à d’autres organismes »Note de bas de page 12.
Il est temps de moderniser les services de police au Canada afin de nous assurer que nous avons la capacité de lutter contre les formes les plus graves de criminalité et que nous les ciblons adéquatement. C’est une tâche de grande envergure, mais nous sommes certains que le haut degré de professionnalisme présent au sein de la GRC et de la fonction publique permettra de la mener à bien.
Une nouvelle vision des services de police au Canada
Pour assurer la sécurité des Canadiens et protéger notre sécurité nationale, il faut transformer la façon dont les services de police sont fournis au Canada. Les policiers chevronnés doivent collaborer avec des experts techniques et des experts en la matière pour relever efficacement les défis de l’avenir, notamment en matière de crime organisé transnational, de crime financier, d’intégrité des frontières, de cybercriminalité et de sécurité nationale.
La vision du gouvernement devrait être de faire de la GRC une organisation de police fédérale de calibre mondial, axée sur le renseignement, reposant sur le travail d’enquêteurs hautement qualifiés et d’équipes multidisciplinaires, et mettant l’accent sur les crimes les plus graves qui touchent les Canadiens.
Les priorités associées à la réalisation de cette vision devraient être les suivantes :
En premier lieu, la GRC devrait se concentrer sur son principal mandat, qui consiste à s’attaquer aux crimes les plus graves qui touchent le Canada. Cela comprendra une orientation claire sur la structure et le mandat de la force de police fédérale du Canada, ainsi que la réglementation, les pouvoirs, les mécanismes redditionnels et les ressources nécessaires pour permettre à la GRC d’être agile, capable d’adaptation et prête pour l’avenir afin de protéger le Canada, les Canadiens et les intérêts canadiens contre les menaces criminelles nationales et internationales les plus importantes. La GRC devrait mettre l’accent sur une mission fédérale tenant compte du cœur de son mandat et des domaines dans lesquels elle est dans la meilleure position pour mener des enquêtes. Cela comprend les activités criminelles qui dépassent une compétence provinciale ou territoriale précise au Canada ou qui proviennent de l’extérieur du Canada, qui dépassent les capacités d’une autre autorité au Canada, qui sont liées à la sécurité nationale ou qui sont d’importance nationale. Une telle approche tient compte des domaines sur lesquels le gouvernement fédéral doit centrer ses efforts en matière de services de police tout en respectant l’importante répartition constitutionnelle des responsabilités.
Deuxièmement, il y aurait lieu d’établir, à la GRC, une nouvelle approche de gestion des talents qui ferait du recrutement de compétences spécialisées une priorité et qui préparerait les personnes à devenir des « enquêteurs fédéraux » chargés d’enquêter, à l’échelle fédérale, sur la criminalité technohabilitée complexe et souvent transfrontalière. Cette approche serait appuyée par de nouveaux pouvoirs de dotation afin de veiller à ce que la GRC soit suffisamment compétitive pour attirer les talents. Un système de recrutement fédéral spécialisé, dans l’optique d’une nouvelle école de formation de la Police fédérale, se concentrerait exclusivement sur les besoins de la fonction de police fédérale de la GRC. L’école serait dirigée et gérée par la GRC en étroite collaboration avec des partenaires clés, comme des experts du milieu universitaire, des praticiens internationaux de premier plan et des partenaires de développement avant-gardistes, afin d’assurer l’évolution continue du programme d’études et de la formation.
Troisièmement, tous les niveaux de services de police au Canada doivent disposer des ressources adéquates pour faire face à l’environnement de menace du 21e siècle. À cette fin, il est nécessaire d’investir davantage dans la capacité de la fonction de police fédérale de la GRC. Les autres ordres de gouvernement doivent envisager des augmentations semblables. Pour veiller à ce que les enquêtes sur les crimes graves à l’échelle nationale soient au cœur des priorités, le gouvernement devrait isoler et délimiter les budgets des services de police contractuels et fédéraux. Cela permettrait d’assurer la transparence financière entre les secteurs d’activité de même qu’entre les administrations qui reçoivent des services de police contractuels, de réduire les « fuites » de ressources internes pour appuyer les contrats et de veiller à ce que les prochaines ententes sur les services de police tiennent compte de l’ensemble des coûts des services de police. Pour ce faire, de nouvelles exigences en matière de budgets et de rapports seront établies, y compris une nouvelle approche en ce qui concerne les crédits parlementaires.
Enfin, le rôle du Canada dans le soutien aux provinces pour la prestation des services de police doit évoluer. Le gouvernement fédéral devrait s’engager à travailler en étroite collaboration avec les provinces afin de soutenir l’abandon graduel des services de police contractuels, tout en maintenant une grande interopérabilité avec la police fédérale. L’expiration des ententes actuelles sur les services de police, prévue en 2032, représente la première occasion de mettre en œuvre cette nouvelle phase des services de police au Canada. Le travail visant à définir les besoins provinciaux et les solutions devrait commencer dès maintenant. Les provinces possèdent l’expertise et les connaissances nécessaires au sujet de leurs territoires et des besoins de leurs collectivités en matière de sécurité, et elles devraient être en voie d’exercer pleinement leurs responsabilités à l’égard des services de police. Elles sont les mieux placées pour définir leurs propres modèles de services de police, y compris les interactions avec les services sociaux et les programmes qu’elles offrent, dans le but d’améliorer les résultats et la prestation de services aux collectivités. Ce sont des processus complexes et difficiles. En fin de compte, les ressources fédérales devraient se concentrer sur la réalisation du mandat fédéral, à savoir renforcer considérablement la capacité de la GRC à relever les défis fédéraux.
Le Canada devrait également collaborer avec les dirigeants territoriaux et les partenaires autochtones pour définir un nouveau modèle de services de police afin d’appuyer un accès équitable à des services de police adéquats et efficaces qui tiennent compte de leur situation et de leurs besoins uniques. Il est essentiel de reconnaître que les antécédents de la GRC en matière de soutien aux collectivités n’ont pas toujours été positifs, en particulier en ce qui concerne les collectivités autochtones. En 2024, la vérificatrice générale a formulé des recommandations visant à assurer un financement équitable, des partenariats efficaces avec les collectivités autochtones, une meilleure prestation de services et d’autres mesures pour améliorer les services de police au sein des collectivités inuites et des Premières Nations. Le Canada demeure déterminé à investir dans les services de police des Premières Nations, en veillant à ce que ces efforts soient adaptés aux besoins et aux priorités uniques des collectivités et à ce qu’ils reflètent ces besoins.
Nous pouvons déjà voir les résultats des relations plus étroites entre les administrations, de l’échange d’information, des opérations conjointes et des investissements stratégiques en ce qui concerne, par exemple, les efforts continus déployés pour sécuriser la frontière et lutter contre la crise du fentanyl. Combler l’écart entre les menaces auxquelles le Canada est confronté et la capacité des criminels exigera non seulement un leadership et des investissements du gouvernement fédéral, mais aussi une véritable prise de responsabilités collective par tous les ordres de gouvernement et leurs organismes d’application de la loi.
Les changements présentés ci-dessus découlent d’années d’examens indépendants de la GRC et visent à établir un modèle de services de police fédéraux plus solide qui répond aux menaces uniques auxquelles le Canada est confronté aujourd’hui. Même si ces changements prendront du temps, ils représentent une vision audacieuse qui n’a pas été exprimée depuis le rapport de la Commission McDonald de 1981, qui a mené à la création de l’organisme civil de renseignement du CanadaNote de bas de page 13.
En adoptant la vision des services de police canadiens, nous ouvrons la voie à un avenir plus brillant et plus sûr pour tous les Canadiens, et nous veillons à ce que nos services de police soient résilients, inclusifs et outillés pour relever les défis de demain.
- Date de modification :