Prédiction de la récidive chez les délinquants autochtones

Prédiction de la récidive chez les délinquants autochtones Version PDF (13Ko)

Recherche en bref
Vol. 18, no 1
Janvier 2013

Question

Est‑ce que les huit principaux facteurs de risque permettent de prédire la récidive chez les délinquants autochtones?

Contexte

Pour évaluer le risque de récidive chez les délinquants, il faut déterminer la pertinence de certaines caractéristiques liées au comportement criminel futur. La recherche a permis d'établir huit facteurs de risque fondés sur des théories (les huit principaux facteurs), qui ont prouvé avoir une capacité prévisionnelle pour différents types de délinquants (p. ex. les jeunes, les délinquants sexuels et les délinquants ayant des troubles mentaux) et de résultats (p. ex. récidive générale, avec violence et sexuelle). Il s'agit des antécédents criminels, de la personnalité antisociale, des attitudes procriminelles, des fréquentations qui favorisent la criminalité, des relations matrimoniales ou conjugales, du profil scolaire ou professionnel, des activités récréatives ou des loisirs et de la toxicomanie.

La création d'outils actuariels d'évaluation du risque est largement axée sur les délinquants caucasiens de sexe masculin. Au Canada, les outils d'évaluation du risque élaborés pour les délinquants non‑autochtones de sexe masculin sont, pour la plupart, également utilisés pour les délinquants autochtones. Certaines critiques soutiennent que l'utilisation de ces outils pourrait créer un préjugé culturel susceptible d'avoir une incidence négative et inéquitable sur l'évaluation du risque chez les délinquants autochtones, qui sont surreprésentés au sein de la population carcérale.

Même si des études individuelles visant à évaluer la capacité des outils d'évaluation du risque (p. ex. les échelles de l'inventaire du niveau de service et l'évaluation du risque et des besoins dans la collectivité) en matière de prédiction de la récidive chez les délinquants autochtones ont donné des résultats prometteurs, il est nécessaire de comprendre les facteurs de risque majeurs et leur pertinence relativement aux délinquants autochtones sur un plan plus global et théorique.

Jusqu'à maintenant, ces études sont de nature plutôt narrative et qualitative. Le présent examen est quantitatif et axé sur des théories et il vise à déterminer si les huit principaux facteurs de risque permettent de prédire la récidive chez les délinquants autochtones et, dans l'affirmative, s'ils sont aussi valides quand ils sont appliqués aux délinquants non‑autochtones.

Méthode

On a effectué un examen complet de la documentation (y compris les recherches publiées et non publiées) portant sur la capacité des huit principaux facteurs de risque à prédire la récidive (générale et avec violence) chez les délinquants autochtones. La recherche a permis de trouver 44 sources de données utilisables, représentant 49 échantillons indépendants d'Autochtones (tirés de 32 rapports ou articles et de 12 ensembles de données). La taille totale de l'échantillon de délinquants autochtones dans cet examen est de N = 57 315.

Réponse

Les huit principaux facteurs de risque permettent tous de prédire de manière significative à la fois la récidive générale et avec violence chez les délinquants autochtones. Les meilleurs facteurs prévisionnels de la récidive générale sont les antécédents criminels, la personnalité antisociale et les fréquentations qui favorisent la criminalité, alors que pour la récidive avec violence, il s'agit des antécédents criminels, de la personnalité antisociale et des attitudes procriminelles.

D'autres analyses ont révélé que les antécédents criminels, la toxicomanie et la personnalité antisociale permettaient de mieux prévoir la récidive chez les délinquants non‑autochtones que chez les délinquants autochtones. Pour ce qui est des cinq autres facteurs, il n'y avait pas de différences importantes entre les deux groupes en matière de prédiction de la récidive générale. Pour ce qui est de la récidive avec violence, aucune différence n'a été observée entre les deux groupes quant à la capacité de prédiction des huit principaux facteurs.

Deux questions connexes doivent être mentionnées. D'abord, malgré nos efforts, nous n'avons pas été en mesure de déterminer les études qui se sont penchées sur les facteurs de risque adaptés à une culture en matière de récidive. Ensuite, on a observé un grand nombre de variantes entre les études utilisées pour le présent examen, ce qui montre la nécessité d'effectuer davantage de recherches dans ce domaine.

Répercussions sur les politiques

  1. Les huit principaux facteurs de risque de récidive, dont bon nombre font habituellement partie des outils d'évaluation du risque de récidive chez les délinquants, ont montré une capacité satisfaisante en matière de prédiction de la récidive générale et avec violence chez les délinquants autochtones.
    L'utilisation d'outils d'évaluation relativement aux huit principaux facteurs de risque de récidive chez les délinquants autochtones est empiriquement défendable.
  2. Il faudra effectuer d'autres recherches pour comprendre pourquoi trois des huit principaux facteurs ont donné des résultats beaucoup plus faibles pour les délinquants autochtones, comparativement aux délinquants non‑autochtones.
  3. Les délinquants autochtones sont un segment culturellement distinct de la population canadienne et, jusqu'à maintenant, il n'y a eu aucun examen systématique des facteurs de risque possibles qui sont adaptés à la culture. On invite donc les chercheurs du milieu correctionnel à effectuer d'autres recherches dans le domaine pour accroître notre compréhension des facteurs de risque propres aux délinquants autochtones.

Source

Pour de plus amples renseignements

Leticia Gutierrez
Recherche correctionnelle
Sécurité publique Canada
340, av. Laurier Ouest
Ottawa (Ontario)
K1A 0P8
Tél. : (613) 949-9959
Téléc. : (613) 990-8295
Courriel : Leticia.Gutierrez@ps-sp.gc.ca

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